- L'entraide généralisée entre les oiseaux sur le long terme favoriserait la stabilité du groupe social.
- Les chercheurs se sont intéressés sur comment la forme physique directe et indirecte chez le choucador superbe influence l’entraide sur la vie quotidienne de ces espèces.
- Les liens sociaux entre les espèces d'oiseaux les plus communs peuvent aller au-delà de la famille. Les individus s’entraident parfois pour élever les progénitures en faisant varier le tuteur ou la tutrice.
Le fait que l’entraide ne nécessite pas de liens de parenté chez les oiseaux constitue l’un des facteurs qui justifie la survie des gènes chez ces espèces.
Une étude, publiée en mai 2025, dans la revue Nature, révèle que l’aide apportée à un proche chez les oiseaux permet indirectement de favoriser la survie de ses propres gènes.
Toutefois, l’étude montre que l’entraide généralisée entre les oiseaux sur le long terme favoriserait également la stabilité du groupe social, offrirait un gain collectif, même lorsque les espèces ne partagent pas des liens de parenté.
Pour Dr Alexis Earl, chercheuse postdoctorale en biologie à la Fondation nationale pour la science du Département de biologie computationnelle à l’université Cornell, aux Etats-Unis, et co-auteure de l’étude, il est normal qu’un être humain puisse aider à la fois les membres de sa famille, mais peut aussi être amené à aider une inconnue qui n’est pas forcément un proche ou un ami intime.
Relations d’entraide
En analysant les données recueillies pendant 20 ans chez le choucador superbe (Lamprotornis Superbus), une espèce d’oiseaux de la famille des Sturnidae, et que l’on rencontre notamment en Afrique de l’Est, les auteurs de l’étude se sont intéressés sur comment la forme physique directe et indirecte influence l’entraide sur la vie quotidienne de ces espèces.
Dans la phase d’expérimentation, l’étude a pris en compte plus de 12 000 observations d’aides avec 563 aidants dans 410 nids, à travers neuf groupes sociaux sur 40 saisons de reproduction.
Les résultats ont montré que les espèces d’oiseaux forment des relations d’entraide réciproque non aléatoires à long terme en échangeant les rôles de reproducteur et d’assistant de reproduction au cours des saisons.
Au cours de leurs travaux menés entre 2002 et 2021, les chercheurs ont étudié des milliers d’interactions entre des choucadors superbes, lors d’un premier exercice réalisé au Centre de recherche Mpala, située dans le comté de Laikipia, au nord-est du Kenya.

Des rapports privilégiés
Pour mieux connaître les liens de parenté entre ces oiseaux, les chercheurs ont aussi collecté l’ADN de ces espèces, comme seule moyen de déterminer si l’entraide se réalise aussi entre oiseaux non apparentés. « Ces relations surprenantes vont bien au-delà de la simple survie, car cette socialisation dépasse les barrières d’une espèce d’oiseau concernée », explique Dr Earl à Mongabay.
Les auteurs de cette recherche affirment que ce travail a nécessité une longue période pour la mise en place de l’entraide évaluée tout au long de plusieurs années auprès des choucadors superbes.
D’après eux, ces espèces d’oiseaux affichaient l’attitude de vouloir aider leurs proches, mais ils entretenaient en même temps des rapports privilégiés avec d’autres membres du groupe.
Arden G. Berlinger, chercheuse au Département des sciences végétales de l’université de Cambridge au Royaume-Uni et co-auteur de cette étude, affirme que l’aide apporté au nid à des oiseaux non apparentés est commune, même en présence de proches. « Ce qui est plus surprenant est qu’aucun autre travail de recherche ornithologique n’a été réalisé jusqu’à ce jour sur ce comportement des oiseaux en vue d’analyser ce phénomène » dit-elle à Mongabay.
Camille Tchankpan, un expert en ornithologie, qui a longtemps contribué aux dénombrements des oiseaux d’eau dans le sud Bénin dans le cadre du Dénombrement international des oiseaux d’eau (DIOE), affirme que ces relations d’amitiés entre les oiseaux reposent souvent sur des besoins partagés ou une forte compatibilité comportementale. « Parfois, on observe la relation intrafamiliale chez une espèce spécifique d’oiseaux, mais les liens sociaux peuvent aller au-delà de la famille », dit-il au téléphone, à Mongabay.

Manifestations d’amitié
Tchankpan affirme que ce comportement se manifeste également chez certaines espèces d’oiseaux migrateurs aux points de leurs déplacements, généralement du nord, où se trouvent leurs territoires de nidification, vers le sud, où ils passent l’hiver, notamment en Afrique.
Toutefois, l’étude montre que si certains oiseaux non apparentés familialement vont s’entraider, ces manifestations d’amitié s’observent, lorsque les oiseaux arrachent leurs propres plumes ou celles de leurs congénères.
Mais les auteurs de l’étude citent également le rôle du parent là où les individus s’entraident pour élever les progénitures, en faisant varier le tuteur ou la tutrice, d’une saison de reproduction à une autre.
Hilaire Yaokokoré Beibro, Professeur titulaire en biosciences à l’université Félix Houphouët-Boigny en Côte d’Ivoire, a mené plusieurs travaux de recherche sur les oiseaux migrateurs terrestres. Il affirme que déterminer l’existence d’une amitié chez certaines espèces d’oiseaux s’avère parfois complexe.
« Compte tenu de leurs zones de nidification qui sont parfois éloignées, certaines espèces d’oiseaux d’eau du nord de la Côte d’Ivoire restent méconnus, et il leur est parfois difficile de construire et de maintenir une amitié avec leurs congénères », confie l’ornithologue Yaokokoré, à Mongabay.
Image de la bannière : Le choucador superbe (Lamprotornis superbus) fait partie de la famille des étourneaux. On le trouve couramment en Afrique de l’Est. Image de Harvey Barrison from Massapequa, NY, USA via Wikimédia Commons (CC BY-SA 2.0).
Citation :
Earl, A.D., Carter, G.G., Berlinger, A.G. & al. (2025). A cryptic role for reciprocal helping in a cooperatively breeding bird. Nature, 642, 381–388. https://doi.org/10.1038/s41586-025-08958-4
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