- Au Cameroun, le site du projet d’exploitation de fer de Lobé dans le sud du pays renferme des sites sacrés, des tombes, des caveaux familiaux et des lieux de rites traditionnels, qui pourraient être détruits ou rendus inaccessibles aux communautés détentrices.
- Le parc marin Manyange na Elombo-Campo, qui est la première aire marine protégée du Cameroun, est menacé par ce projet d’exploitation de minerai de fer.
- Les organisations et communautés locales demandent à l’État de prendre des mesures, pour éviter que les eaux polluées du site minier ne menacent l’existence des tortues marines protégées, vivant non loin du site.
Si rien n’est fait, le projet d’exploitation de fer de Lobé à Kribi, dans le Sud du Cameroun, sera à l’origine de la destruction de sites ancestraux des communautés riveraines, y compris une communauté de pygmées Bagyeli.
Il va aussi occasionner la disparition progressive des espèces rares de tortues marines protégées, la destruction de la biodiversité, la pollution incontrôlable de l’environnement, la dégradation de la santé des riverains, ainsi que l’expropriation des terres arables des populations de la région.
C’est ce qu’à conclut Youth for Promotion of Development (YPD), après ses descentes sur le terrain, en avril 2025. « Des lieux sacrés ancestraux d’une importance culturelle et spirituelle, comme des tombes, des lieux de rites traditionnels, des caveaux familiaux, se trouvent au sein du site d’exploitation. Lorsqu’on va entrer dans la phase d’exploitation, les populations n’y auront plus accès, parce que cette est vouée à être totalement terrassée. Le site sera totalement décapé », explique, au téléphone à Mongabay, Jean Thierry Mvondo, gestionnaire de projet au sein de cette organisation de la société civile camerounaise.
Il ajoute : « Le terrassement a commencé, mais concerne pour le moment la partie où sera installée la base vie. Quand la société va entrer dans la phase d’exploitation, il y aura la pollution des sols, la pollution par des eaux de lavages et autres produits de la station de traitement des minerais. Les populations, y compris une communauté de pygmées, seront dépossédées de leurs terres, où elles avaient des activités agricoles ».

Espèces en danger menacées par l’exploitation
La Convention minière entre l’État du Cameroun et la société Sinosteel Cameroun, a été signée en avril 2022. Le projet couvre une superficie de 138,5 km², soit environ 19 393 terrains de football, entre Kribi et Campo au sud du Cameroun.
Selon cette Convention, dont Mongabay a pu avoir accès, « Sinosteel Cam SA prévoit d’extraire 10 000 000 de tonnes par an de minerai à 33 % de fer, puis de l’enrichir pour produire quatre millions de tonnes de concentré de haute teneur en fer, à plus de 60 % ».
Youth for Promotion of Development explique que le projet inclut aussi le développement d’une mine, d’une unité d’enrichissement du minerai, d’un pipeline pour le transport, d’une unité de production d’énergie et d’un terminal minéralier, pour la commercialisation des produits sur le marché international.
« Mon village, Ebodjé, est dans le périmètre du site d’exploitation du fer et se trouve à la fois sur deux aires protégées, le parc terrestre de Campo Ma’an inscrit dans la liste indicative du patrimoine de l’UNESCO et le parc marin Manyange na Elombo-Campo, qui abrite des espèces en voie de disparition, à l’exemple de Chelonia mydas, communement appelée tortue verte, qui est une espèce en danger », dit à Mongabay au téléphone, Njokou Djongo, chef du village Ebodjé. « Lorsque cette société va lancer sa production, le seul cours d’eau qui drainera les déchets en amont vers la mer, c’est le cours d’eau qui est dans mon village. Ce cours d’eau sera pollué, il mettra en danger les poissons et les tortues d’Ebodjé, et peut causer leur disparition », a-t-il ajouté.
« Ebodjé, le parc de Campo et le parc de Manyange sont en danger. Nous voulons que l’État prenne des dispositions pour que les eaux du site ne polluent pas la mer et n’affectent pas les tortues. Nous déplorons aussi le manque de respect de cette société. Il était prévu dans leur cahier des charges l’aménagement des routes, la construction d’une usine pour la fabrication locale d’huile et d’autres choses. Cela n’a pas été fait. Lorsque les communautés se révoltent, on les arrête et on les enferme dans les cellules », précise Djongo.

Youth for Promotion of Development indique que le projet d’exploitation de fer de la Lobé représente une opportunité économique pour le Cameroun, mais qu’il faut prendre en compte les préoccupations des communautés locales, pour garantir un développement durable et équitable. « Les autorités et les entreprises impliquées doivent œuvrer ensemble pour minimiser les impacts négatifs du projet. Il faut renforcer la participation des communautés locales à travers des consultations et la création de structures de dialogue. Il faut également soutenir le développement local à travers la création des infrastructures et des programmes de formation professionnelle », conclut Mvondo.
Image de bannière : Le site d’exploitation du fer de Lobé, à Kribi, dans le Sud du Cameroun, se trouve à la fois dans deux aires protégées, le parc terrestre de Campo Ma’an inscrit dans la liste indicative du patrimoine de l’UNESCO et le parc marin Manyange na Elombo-Campo, qui abrite des espèces en voie de disparition, à l’exemple de Chelonia mydas, communement appelée la tortue verte, une espèce en danger. Image par Mongabay.
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