Au Cameroun, près du lac Ossa et du parc national de Doula-Edéa, de corpulentes sirènes nagent et se laissent flotter dans le bassin inférieur de la rivière Sanaga. Cette région abrite le lamantin d’Afrique (Trichechus senegalensis), un mammifère aquatique confronté à un déclin de sa population. Classé comme vulnérable sur la liste rouge de l’UICN, l’espèce est menacée par des abattages excessifs et par la dégradation et la disparition de son habitat. Pour ces raisons, et compte tenu du manque d’informations sur les lamantins, un groupe de scientifiques camerounais a adopté une approche ethnobiologique (c’est-à-dire axée sur les interactions entre l’homme et la nature) du problème en faisant appel à des habitants qualifiés et bien renseignés sur le sujet pour collecter des données sur ces animaux.
Lamantin d’Afrique dans l’aquarium de Toba, au Japon. Photographie réalisée par OpenCage et fournie sous licence/Creative Commons 2.5 |
Les chercheurs ont interrogé des pêcheurs, des ramasseurs de coquillages et des utilisateurs de ressources naturelles pour évaluer le statut de conservation actuel des lamantins dans les lacs, les rivières et les régions côtières. On ne sait que peu de choses sur les lamantins, en particulier en Afrique, car ces animaux vivent dans des eaux sombres et boueuses. Étant donné que les habitants aperçoivent des lamantins plus souvent que les scientifiques, ces derniers leur ont demandé si l’espèce était toujours présente dans le bassin inférieur de la Sanaga ; si la population avait augmenté, diminué ou stagné au cours des cinq dernières années ; et quels étaient les principaux problèmes rencontrés par les lamantins pour survivre.
L’étude, publiée dans Tropical Conservation Science, la revue scientifique en accès libre de Mongabay.com, indique que les lamantins sont toujours présents dans la région, et que leur nombre a augmenté ou s’est stabilisé. Cependant, malgré un niveau de population apparemment soutenable dans la région, il reste encore des menaces.
Un des problèmes rencontrés est la capture délibérée des lamantins pour leur viande ou leur prise au piège accidentelle dans des filets ou autre équipement de pêche. Un autre problème est la pollution de l’eau par les entreprises de pêche, les plantations industrielles et les individus. Selon l’étude, les solutions possibles incluent entre autres : une meilleure application de la loi, l’éducation, la sensibilisation et l’écotourisme.
Citations:
- Mayaka, T. B., Awah, H. C. and Ajonina, G. 2013. Conservation status of manatee (Trichechus senegalensis Link 1795) in Lower Sanaga Basin, Cameroon: An ethnobiological assessment. Tropical Conservation Science. Vol. 6(4):521-538.