- L’Assemblée des Nations unies pour l’environnement se tient cette semaine à Nairobi, à un moment où les guerres, les politiques économiques protectionnistes et les divisions internationales compromettent la capacité des nations à parvenir à un consensus sur le changement climatique, l’érosion de la biodiversité et la pollution ; des enjeux qui exigent une action collective.
- Le président de l’Assemblée, Abdullah Bin Ali Al-Amri, a rappelé aux délégués que, malgré les turbulences, la coopération multilatérale demeure la seule voie crédible.
L’Assemblée des Nations unies pour l’environnement (ANUE), la plus haute instance décisionnelle mondiale en matière d’environnement, a ouvert, lundi matin, sa septième session à Nairobi, avec l’ambition d’agir face aux défis environnementaux majeurs, dans un contexte de profondes divisions géopolitiques.
Les émissions mondiales continuent d’augmenter, les objectifs de la biodiversité sont hors trajectoire, et les négociations sur la pollution plastique sont dans l’impasse, menaçant les moyens de subsistance et les économies à travers le monde.
Réunie sous le thème « Promouvoir des solutions durables pour une planète résiliente », la 7ème session de l’ANUE se tient à un moment, où le multilatéralisme est soumis à de fortes pressions. Ainsi que l’ont souligné plusieurs orateurs à l’ouverture de cette session, les guerres, les politiques économiques protectionnistes et l’aggravation des divisions mondiales compromettent la capacité des États à parvenir à un consensus sur le climat, la biodiversité et la pollution; autant d’enjeux exigeant une action collective.
La coopération multilatérale demeure la seule voie crédible
Pourtant, sur le campus de l’ONU à Nairobi, un sentiment persiste : celui d’une volonté manifeste d’aller de l’avant.
En ouvrant la session, le président de l’ANUE, Abdullah Bin Ali Al-Amri du Sultanat d’Oman, a rappelé aux délégués que la coopération multilatérale demeure la seule voie crédible malgré les turbulences.
« L’ANUE a été créée pour être la conscience de l’environnement mondial, un forum où la science et la diplomatie convergent pour protéger la planète, qui nous soutient tous. Le multilatéralisme produit des résultats lorsque nous associons science, solidarité et solutions », a-t-il déclaré.
Al-Amri a exhorté les pays à faire preuve d’ambition, de solidarité et de décisions fondées sur la science. L’incrémentalisme, c’est-à-dire les petits pas progressifs, a-t-il averti, n’est plus suffisant.
« L’incrémentalisme est insuffisant face au rythme des changements. Les engagements doivent se traduire en projets, en investissements, en cadres juridiques et en résultats mesurables », a-t-il insisté.
Ses remarques reflétaient la tension entre une fragmentation mondiale croissante et la nécessité d’une gouvernance environnementale collective, un thème récurrent dans plusieurs discours.
Des eaux géopolitiques turbulentes
La directrice exécutive du PNUE, Inger Andersen, a souligné les contradictions qui marquent ce moment environnemental : les impacts climatiques s’aggravent et la biodiversité décline, mais des avancées existent, comme le traité sur la haute mer ou les progrès en matière de financement de l’adaptation et des forêts lors des négociations climatiques récentes à Belém, au Brésil.
« Les défis environnementaux s’accélèrent », a-t-elle averti. « La hausse moyenne des températures mondiales dépassera probablement 1,5 °C dans la prochaine décennie ».
Elle n’a pas éludé le contexte géopolitique. « Le monde traverse des zones géopolitiques turbulentes, ce qui ajoute des tensions au multilatéralisme », a-t-elle déclaré. Elle a néanmoins appelé les délégués à « tendre la main pour trouver le consensus » et à « raviver l’esprit de Nairobi, célèbre et indomptable ».
Malgré les tensions, notamment les divisions entre grandes puissances, la méfiance croissante entre Nord et Sud, et la montée d’une posture « America First » à Washington, Andersen a indiqué que la diplomatie environnementale fonctionne encore lorsque les pays privilégient le compromis plutôt que la paralysie.
Elle a rappelé que l’ANUE accueille cette semaine près de 6 000 participants issus de plus de 170 pays, preuve que l’engagement multilatéral persiste.

Plaidoyer pour une action audacieuse, intégrée et inclusive
Le pays hôte, le Kenya, a cherché à faire de l’ANUE-7 un moment de renforcement de la cohésion mondiale. La ministre kényane de l’Environnement, du changement climatique et de la foresterie, Deborah Barasa, a accueilli les délégués en soulignant l’urgence.
« Le temps des petits pas prudents est révolu ; ce dont nous avons besoin aujourd’hui, c’est d’une action audacieuse, intégrée et inclusive », a-t-elle déclaré. « Ces crises ne peuvent être abordées isolément ».
Barasa a réaffirmé l’engagement du Kenya en faveur de la gouvernance environnementale et a appelé à une déclaration ministérielle solide assortie de résolutions concrètes. « Le partenariat n’est pas facultatif, il est absolument essentiel », a-t-elle souligné.
Les crises climatiques encore « surmontables »
Un thème récurrent a été « l’écart croissant entre science et politique ». Plusieurs rapports, produits par l’hôte de l’ANUE-7, ont averti que les émissions mondiales continuent de croître, tandis que le dernier « Rapport sur l’Avenir de l’Environnement Mondial » souligne l’ampleur totale de la triple crise planétaire.
Al-Amri a rappelé que les évaluations du PNUE montrent que les crises du climat, de la biodiversité et de la pollution sont « immenses », mais encore « surmontables », si les pays agissent à grande échelle.
Andersen a mis en avant le prochain rapport du PNUE, qui « décrit des trajectoires de transformation permettant d’obtenir un PIB mondial plus élevé, moins de décès, moins de faim et moins de pauvreté, grâce à l’action sur le climat, la nature et la pollution ».
Pourtant, la planète continue de se réchauffer, les écosystèmes se dégradent et la pollution augmente. Les avertissements des responsables traduisent une inquiétude croissante, à savoir quelques accords environnementaux multilatéraux sont dépassés par la vitesse et l’ampleur du déclin environnemental.

Fragilité de la coopération mondiale
En marge de la plénière, les jeunes et les organisations de la société civile ont exprimé les mêmes préoccupations, notamment sur la fragilité de la coopération mondiale.
La Déclaration mondiale de la jeunesse, présentée à l’ANUE-7, avertit que le monde fait face à « une crise profonde de la coopération internationale », marquée par des réalignements géopolitiques et un « déficit de confiance croissant ».
Les jeunes délégués estiment que le système multilatéral est « hors trajectoire pour presque tous les objectifs mondiaux », et que les communautés les plus touchées par le climat perdent confiance dans les financements et le soutien promis depuis longtemps.
Dans le même temps, ils reconnaissent « des signes de regain d’ambition », notamment après le Pacte pour l’Avenir et d’autres accords mondiaux, et appellent l’ANUE à passer des paroles aux actes.
Les négociations porteront sur 15 projets de résolution et deux projets de décision, avec des débats attendus sur le plastique, les minéraux, les produits chimiques, l’intelligence artificielle, la gouvernance de l’eau et les grands fonds marins. Un optimisme prudent demeure, quant à la capacité de l’ANUE-7 à produire une déclaration ministérielle solide et à faire avancer la Stratégie à moyen terme du PNUE (2026–2029).
Mais tout dépendra de la capacité des nations à surmonter leurs divisions à un moment, où la gouvernance environnementale multilatérale est mise à l’épreuve, par la polarisation et les recompositions du pouvoir mondial.
« Notre succès, cette semaine dépend, non seulement des résultats, que nous adopterons, mais aussi de la manière dont nous y parviendrons avec confiance, transparence, esprit de compromis et inclusion », a rappelé Al-Amri.
Andersen, pour sa part, de renchérir : « Nous vivons tous sur la même planète et faisons face aux mêmes défis. Si mon voisin souffre du changement climatique, moi aussi j’en souffre ».
La première journée de l’ANUE-7 a reconnu que la fragmentation mondiale est bien réelle, mais aussi que la détermination collective à avancer l’est tout autant. Et comme l’a déclaré Barasa : « L’ANUE-7 ne se contentera pas de parler de l’avenir, elle contribuera à le construire ».
Image de bannière : Après la cérémonie d’ouverture, le président de l’UNEA-7, Abdullah Bin Ali Al-Amri (Oman), et la directrice exécutive du PNUE, Inger Andersen, ont tenu une conférence de presse pour informer les journalistes des progrès de l’assemblée. Image de UNEP/Kiara Worth.
Assemblée des Nations unies pour l’environnement : les enjeux de l’Afrique à Nairobi
FEEDBACK : Utilisez ce formulaire pour envoyer un message à l’éditeur de cet article. Si vous souhaitez publier un commentaire public, vous pouvez le faire au bas de la page.