- Une enquête indépendante de 16 mois confirme les allégations de violences perpétrées au sein du Parc national d’Odzala-Kokoua, en République du Congo.
- L’ONG African Parks, responsable de la gestion du Parc national d’Odzala-Kokoua, emploie des gardes forestiers accusés d’avoir battu et violé des membres du peuple autochtone Baka sur leurs terres ancestrales.
- Si l’organisation reconnaît que des abus ont eu lieu, elle n’a pas toutefois publié le rapport complet de l’enquête détaillant sa portée et ses conclusions.
- African Parks déclare qu’elle s’engage à tenir son personnel responsable des violences et des violations commises, à renforcer les mesures de protection, ainsi que la participation communautaire.
Début 2024, African Parks, l’organisation non gouvernementale basée en Afrique du Sud qui gère le Parc national d’Odzala-Kokoua en République du Congo, a mandaté le cabinet d’avocats Omnia Strategy LLP, basé au Royaume-Uni, pour enquêter sur les allégations de violations des droits humains commises par les gardes du parc à l’encontre des populations autochtones locales. L’enquête est maintenant terminée et African Parks a reconnu que des violations des droits humains ont été commises, sans toutefois publier le rapport d’enquête d’Omnia dans son intégralité.
Les allégations ont été publiées pour la première fois en janvier 2024, par le tabloïd britannique Daily Mail. Il fait état d’allégations de passages à tabac, de tortures et de viols infligés à des membres du peuple autochtone Baka, lorsque ces derniers entrent dans les forêts d’Odzala-Kokoua pour pratiquer la chasse, la pêche et la cueillette. Le Parc national d’Odzala-Kokoua a été établi sur les terres ancestrales de la communauté Baka.
« Maintenant, il n’y a plus que la torture dans la forêt. Aujourd’hui, si un Baka entre dans la forêt et tombe sur des gardes forestiers, ils le torturent jusqu’à sa mort », déclare Eyaya, un membre de la communauté Baka, dans une vidéo publiée par l’ONG de défense des droits des peuples autochtones Survival International, qui aurait soulevé ces allégations auprès d’African Parks dans un courrier à la mi-2023.
Dans une déclaration, le cabinet Omnia a indiqué qu’il s’était appuyé en partie sur les rapports de Survival International qui décrivent en détail l’expulsion forcée de la population Baka de ses terres ancestrales et les maltraitances subies par la suite.
L’enquête d’Omnia a porté sur les événements survenus entre 2010, date à laquelle African Parks a repris la gestion d’Odzala-Kokoua, et 2024. Le cabinet d’avocats a envoyé des enquêteurs en mission en République du Congo quatre fois en 16 mois. Ces derniers se sont entretenus avec environ 180 parties prenantes, notamment des victimes potentielles, des témoins, des gardes forestiers, des membres du personnel du parc et des représentants du gouvernement.
Bien que le rapport d’Omnia soit maintenant terminé, African Parks ne l’a pas rendu accessible au public. Mongabay a demandé à consulter le rapport à plusieurs reprises, mais a reçu à la place un communiqué indiquant que « African Parks reconnaît que, dans certains incidents, des violations des droits humains ont été commises, et nous regrettons profondément la douleur et la souffrance causées aux victimes ».
Le communiqué décrit les mesures qui seront prises par African Parks pour « garantir une approche pleinement intégrée et fondée sur les droits humains dans toutes nos entreprises ». L’ONG précise qu’elle s’engage à tenir les membres de son personnel responsables des abus perpétrés, à renforcer les mesures de protection et à collaborer avec les organisations de défense des droits humains, tout en renforçant la participation communautaire, grâce à des efforts tels que la mise en œuvre du Plan pour les peuples autochtones d’Odzala-Kokoua.
Toutefois, les critiques estiment que la réponse d’African Parks n’est pas suffisante. « Le fond du problème – qui n’a d’ailleurs pas été abordé par l’enquête – est qu’African Parks continue à s’accrocher à un modèle de conservation raciste et colonial qui chasse les populations autochtones de leurs terres, tandis que des étrangers en prennent le contrôle », a déclaré Caroline Pearce, directrice de Survival International. « Tant que cette situation perdurera, le peuple Baka continuera à être victime d’abus et à subir la destruction de ses moyens de subsistance ».
Dans un SMS envoyé à Mongabay, Trésor Nzila, directeur exécutif du Centre d’action pour le développement, une ONG de défense des droits humains en République du Congo, a déclaré : « La reconnaissance est une première étape. Nous devons maintenant réparer les injustices et renforcer les mécanismes de prévention et de sanction ».
Reportage complémentaire de Latoya Abulu.
Image de bannière : La communauté Baka de Makouagonda, dont les terres ancestrales ont été confisquées pour faire place au Parc national d’Odzala-Kokoua, vit désormais sur le bord de la route. Image de Survival International.
Cet article a été publié initialement ici en anglais le 13 mai, 2025.
African Parks s’engage à enquêter sur des allégations de violences dans un parc congolais