- Le Sénégali de Shelley (Cryptospiza shelleyi) est classé sur la liste rouge de l’Union internationale pour la conservation de la nature (IUCN), parmi les espèces d’oiseaux en danger critique d’extinction.
- Dans la région des Grands Lacs en Afrique centrale, le Sénégali de Shelley vit essentiellement dans la forêt tropicale humide.
- Cette nouvelle forme de science citoyenne focalisée sur le Sénégali de Shelley cherche à combler des grosses lacunes existantes en matière de connaissances sur des populations aviaires menacées.
Jean de Dieu Lemmy Mbonigaba se souvient que depuis sa jeunesse, sa passion était d’observer et compter les oiseaux dans son village situé à proximité d’une petite forêt lacustre au Nord du Rwanda.
« J’avais une attirance naturelle au point de passer plusieurs heures à les observer et en essayant de maitriser leurs chansons et leurs cris », affirme à Mongabay ce professeur de lycée, qui s’est reconverti en guide touristique des oiseaux.
Son implication dans des activités communautaire de la conservation lui a valu d’être intégrée en 2023, dans une équipe de jeunes bénévoles d’une initiative sur la vocalisation des oiseaux au Rwanda, pour travailler dans la collecte de données et d’informations.
Actuellement, Mbonigaba fait partie d’un groupe de guides touristiques mobilisées dans une nouvelle initiative communautaire en cours au Rwanda, qui cherche à mettre la science citoyenne au service de la conservation.
Protéger les oiseaux en danger critique d’extinction
Cette nouvelle campagne vise à attirer l’attention de tous les acteurs de la conservation, notamment les chercheurs sur l’importance de préserver le Sénégali de Shelley (Cryptospiza shelleyi), une espèce énigmatique d’oiseau classée sur la liste rouge de l’Union internationale pour la conservation de la nature (IUCN), parmi les espèces d’oiseaux en danger critique d’extinction.
Parmi ces espèces, 41 % des amphibiens, 12 % des oiseaux dont le Sénégali de Shelley et 27 % des mammifères sont menacés d’extinction au niveau mondial.
Grâce à une mobilisation communautaire en cours, la Fondation « Planet Birdsong », une organisation caritative établi au Royaume Uni, qui œuvre dans la conservation des animaux en voie de disparition, focalise son attention sur les oiseaux en voie de disparition, notamment au sein du Parc national de Nyungwe, situé dans le Sud-Ouest du Rwanda.

Amélioration des savoirs dans la conservation
Avec leur connaissance, un groupe de guides du Parc national de Nyungwe travaille actuellement en collaboration avec les populations riveraines de cette réserve naturelle, pour protéger et restaurer le Sénégali de Shelley.
Cette campagne, qui va cibler d’autres réserves naturelles, notamment le Parc national des Volcans, situé dans le nord du Rwanda, s’inscrit dans un mouvement coordonné à travers la science citoyenne, pour laquelle les populations locales collaborent avec les scientifiques sur la recherche et l’innovation, susceptible d’améliorer la conservation de la faune aviaire dans ce pays.
« Cette nouvelle forme de science citoyenne focalisant sur le Sénégali de Shelley cherche à combler des lacunes critiques [existantes] en matière de connaissances sur des populations aviaires menacées », explique Hilary MacBean, administratrice de la Fondation « Planet Birdsong », qui mise sur l’amélioration des savoirs locaux dans la conservation.
En renforçant l’écosystème de données générées par la science citoyenne, MacBean est persuadée que les scientifiques peuvent tirer profit de cette plateforme qui leur est offerte, faisant avancer les efforts de conservation des oiseaux en voie de disparition au Rwanda et ailleurs en Afrique centrale. « L’identification des menaces pesant sur différentes espèces d’oiseaux menacés [au Rwanda] nécessite des efforts renouvelés, pour une conservation proactive et durable », affirme MacBean à Mongabay.
Certains experts au Centre d’excellence en biodiversité et gestion des ressources naturelles de l’université du Rwanda, consultés par Mongabay ont affirmé qu’au niveau de la sous-région, le Sénégali de Shelley vit essentiellement dans la forêt tropicale humide.
L’IUCN estime entre 1,000 et 2,499 son nombre restant dans le monde, dont plus de la moitié vit dans des forêts tropicales d’Afrique, notamment.

En Afrique centrale, cet oiseau rare est présent en République démocratique du Congo, au Rwanda et au Burundi.
Dr Wenceslas Gatarabirwa, chercheur et responsable de la conservation des voies pour les oiseaux migratoires pour la Société royale pour la protection des oiseaux (RSPB, sigle en anglais), l’une des plus grandes organisations en matière de protection et de conservation des oiseaux établi au Royaume Uni, affirme que le Sénégali de Shelley est également localisée dans plusieurs parties de la sous-région des Grands Lacs, tout au long du rift Albertin en Afrique centrale.
Un oiseau sédentaire
Dans un entretien au téléphone, Dr Gatarabirwa, ornithologue, cite notamment la partie occidentale du rift est-africain, qui s’étend de l’extrémité nord du lac Albert en Ouganda jusqu’à la pointe sud du lac Tanganyika au Burundi, en passant par le lac Kivu situé à la frontière entre le Rwanda et la République Démocratique du Congo, comme étant les sites privilégiés pour abriter cet espèce d’oiseau.
« Contrairement aux oiseaux migrateurs, qui parcourent de longues distances chaque année, le Sénégali de Shelley est une espèce d’oiseau qui trouve facilement des ressources suffisantes dans son habitat local pour survivre », affirme Dr Gatarabirwa à Mongabay.

En vue de mieux pérenniser ces efforts de conservation ciblant cette espèce rare d’oiseau, la Fondation Planet Birdsong travaille actuellement en étroite collaboration avec les membres de la communauté locale, constitués en grande partie de guides du Parc de Nyungwe (Sud-Ouest), ainsi que de jeunes volontaires, pour collecter et rassembler toutes les informations permettant aux chercheurs d’analyser les interactions des oiseaux en voie de disparition avec leur environnement.
Professeur Beth Kaplin, chercheuse principale au Centre d’excellence en biodiversité et gestion des ressources naturelles de l’université du Rwanda, affirme que cette initiative en cours, qui implique directement les citoyens dans la collecte de données et d’informations sur le terrain, contribue à augmenter les connaissances scientifiques en matière d’ornithologie.
« La science citoyenne sur les oiseaux en danger d’extinction semble être une initiative prometteuse pour pérenniser les efforts de conservation au Rwanda », affirme-t-elle à Mongabay.
Dans cette veine, la Fondation Planet Birdsong, travaille actuellement en étroite collaboration avec les institutions de recherche au niveau local et international en vue de mobiliser plus de financement pour faire progresser le travail des guides déployés sur le terrain à la poursuite des oiseaux. « Les moyens financiers limités nous imposent de repenser et de limiter nos déplacements au milieu de la savane », explique Mbonigaba à Mongabay.
Malgré la présence d’un groupe de sept techniciens en ornithologie qui se consacre pleinement à ce projet, Mbonigaba affirme que la récolte de données sur le terrain, n’en est qu’à ses débuts. « Au-delà de ces défis, il n’y a aucune cartographie jusqu’ici disponible et pas de métadonnées à consulter lorsque nous sommes déployées ce terrain », dit-il.
Image de bannière : La recherches sur les oiseaux les plus rares font partie de cette initiative de la science citoyenne au Rwanda. Image de Hilary MacBean fournie par Aimable Twahirwa.
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