- La demande de corne de rhinocéros sur les marchés de la médecine traditionnelle a placé ce mammifère dans la catégorie des animaux vulnérables.
- L'une des menaces qui pèsent aujourd’hui sur cette espèce concerne notamment la dégradation et la perte de son habitat.
- Assurer le bien-être des rhinocéros sortis du confinement reste essentiel. Une équipe vétérinaire déployée dans le parc avec des unités de gardes dédiées aux rhinocéros assurent la bonne protection de ces espèces.
En 2021, African Parks a transféré 30 rhinocéros blancs d’Afrique du Sud vers le Parc national de l’Akagera situé à l’Est du Rwanda. Avec 70 individus complétés récemment, cette population s’élève désormais à 111, selon les chiffres officiels qui témoignent des efforts consentis pour protéger cette espèce en danger dans ce pays d’Afrique centrale.
En vue de mieux pérenniser ces efforts de conservation, une clôture anti-prédatrice alimentée à l’énergie solaire de 120 kilomètres a été construite dans ce parc, afin d’empêcher toute pénétration suspecte dans cette aire protégée et réduire les conflits entre l’homme et la faune sauvage. « La demande de corne de rhinocéros sur les marchés de la médecine traditionnelle en Asie ont placé cette espèce de mammifère dans la catégorie des animaux vulnérables », explique à Mongabay, Eugène Mutangana, responsable du département chargé de la conservation pour l’Agence rwandaise pour la promotion du développement (RDB, sigle en anglais).
Selon lui, cette initiative permet au Rwanda de devenir un pays modèle dans la conservation de la biodiversité au niveau de la région.
Méthodes innovantes pour restaurer les habitats
À travers un nouvel accord conclu en septembre 2025, entre la RDB et l’ONG African Parks, basée à Johannesburg, en Afrique du Sud, des mesures appropriées seront encore prises, pour mieux protéger la population de rhinocéros dans ce parc.
Les experts dans le domaine de la conservation affirment que l’une des menaces qui pèsent aujourd’hui sur cette espèce, concerne notamment la dégradation et la perte de leur habitat, mais surtout le braconnage, pour les vertus – non avérées – de leur corne, précipitant vers une extinction plus ou moins à long terme.
L’objectif de l’initiative en cours dénommée « Rhino Rewild » et mise en œuvre par l’ONG African Parks, est de réintroduire plus de 2 000 rhinocéros dans des zones protégées sûres et bien gérées, à travers le continent y compris dans le Parc national de l’Akagera.
D’ores et déjà, 40 rhinocéros ont été transférés dans la réserve de Munywana dans la région de Kwazulu natal (Afrique du Sud), alors qu’un groupe de quelques 120 individus ont rejoint les réserves membres de la Fondation pour la protection de l’environnement du Grand Kruger toujours en Afrique du Sud.
D’autres espèces ont été transférées récemment vers d’autres sites en Afrique, dont 70 rhinocéros envoyés en juin 2025, vers le parc national de l’Akagera.

Les rhinocéros ont disparu du Rwanda en 2007, date à laquelle le dernier individu est décédé. Dix ans plus tard, 18 rhinocéros noirs – huit mâles et dix femelles – ont été réintroduits au Parc national de l’Akagera depuis l’Afrique du Sud, grâce à un partenariat entre la RDB et la Fondation Howard G. Buffett, basée aux Etats-Unis.
Sur une période de dix ans, African Parks prévoit de relocaliser ces animaux dans des réserves naturelles à travers l’Afrique, notamment en Namibie, au Zimbabwe, en Zambie et au Mozambique.
L’ONG African Parks prévoit de mobiliser deux millions USD auprès de différents partenaires, pour financer cette nouvelle campagne qui verra quelque 2000 rhinocéros, réintroduits dans plusieurs zones protégées à travers l’Afrique.
D’abord en bomas (enclos) puis dans le parc
Une fois transférés au Rwanda, les rhinocéros restent dans les bomas, ces enclos aménagés et spécialement construits pour permettre leur suivi rapproché et leur acclimatation avant d’être remis en liberté dans la nature. « Cette translocation constitue une opportunité pour ces espèces qui vont regagner leur habitat naturel », affirme Jean Paul Karinganire, responsable du financement et des rapports au Parc national de l’Akagera.
Les responsables de ce parc affirment que certains individus sont parfois capturés à nouveau, pour être soignées en cas de détérioration de leur état de santé, et leur permettre d’accéder à la nourriture complémentaire à proximité des bomas. « Des mesures appropriées ont été mises en place pour veiller à la sécurité et au bien-être des rhinocéros dans le parc », dit-il à Mongabay.
Outre une équipe vétérinaire déployée dans ce parc, plusieurs unités de gardes dédiées aux rhinocéros ont été également constituées, pour mieux s’assurer que ces espèces soient bien protégées.
Certains défenseurs de l’environnement estiment que dans la plupart des cas, l’adaptation de leur enclos (bomas) est un élément important des translocations de rhinocéros, pour permettre la transition vers de nouveaux régimes alimentaires, un espace restreint et une quarantaine pour le dépistage des maladies.

Des rhinocéros inadaptés
Une étude publiée en octobre 2022, dans la revue scientifique Journal des maladies de la faune sauvage, révèle que certaines causes et conséquences physiologiques de la mauvaise adaptation au confinement des espèces de rhinocéros dans les bomas restent mal comprises.
Cette recherche a porté sur l’analyse de 96 rhinocéros blancs capturés entre 2009 et 2011, dans le Parc national Kruger, avant d’être placés dans des enclos dans la phase de leur translocation à travers l’Afrique.
Dans leur conclusion, les auteurs de cette étude, ont montré que la perte de poids moyenne entre la période de capture et le temps de retrouver leur habitat naturel, était plus importante chez les rhinocéros inadaptés.
Dr Michele Miller, un expert de la conservation des rhinocéros sauvages en Afrique du Sud, membre de la chaire de recherche sur la tuberculose animale à l’université de Stellenbosch, et co-auteure de cette étude, affirme que les défis posés par le retour à l’état sauvage de ces espèces sont nombreux. « Mettre en place les mécanismes de suivis pour assurer le bien-être des rhinocéros blancs sortis du confinement reste essentielle, pour leur permettre de s’adapter dans leur nouveau milieu naturel », affirme-t-elle à Mongabay.

Dans son rapport rendu publique en septembre 2024, l’Union internationale pour la conservation de la nature (IUCN), affirme que la population de rhinocéros en Afrique continue d’augmenter malgré le braconnage, alors que certaines espèces en Asie sont confrontées à une menace existentielle.
Les données de l’IUCN montrent qu’en Afrique, les braconniers ont tué un total de 586 rhinocéros (principalement l’espèce la plus nombreuse de rhinocéros blancs) en 2023, soit plus que les 551 meurtres détectés en 2022.
La plupart des incidents de braconnage se sont produits en Afrique du Sud, qui abrite la plus grande population de rhinocéros du continent, alors que les incidents de braconnage ont également été enregistrés en Namibie, au Botswana, au Zimbabwe, en Zambie, au Kenya et en République démocratique du Congo (RDC).
D’après les chiffres de International Rhino Foundation qui œuvre à la protection et l’étude des cinq espèces de rhinocéros dans le monde, la population totale de rhinocéros noirs est aujourd’hui estimée à 6 421 espèces en danger critique d’extinction, en raison du braconnage, dans 12 pays africains, notamment en Namibie et en Afrique du Sud.
Image de bannière : Selon l’Union internationale pour la conservation de la nature (IUCN), la population de rhinocéros en Afrique continue d’augmenter malgré le braconnage. Image de Bernard DUPONT via Wikimedia Commons (CC BY-SA 2.0).
Citation :
Miller, M. A., Olea-Popelka, F., & Buss, P. E. (2022). Effect of boma confinement on hematologic and biochemical values in free-ranging white rhinoceros (Ceratotherium Simum) in Kruger National Park, South Africa. Journal of Wildlife Diseases, 58(4). https://doi.org/10.7589/jwd-d-22-00034
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