- Un centre de réhabilitation en la République démocratique du Congo (RDC), a récemment reçu une trentaine de primates saisis auprès des trafiquants.
- Les animaux — y compris des cercopitheques et des chimpanzés — qui sont dans des conditions précaires et mortelles, pour certains individus, ont commencé leur restauration.
- Un mois après, les primates sauvés poursuivent leur restauration au centre réhabilitation de l'ONG P-WAC au Kongo central.
LUBUMBASHI, République démocratique du Congo — Fin août, le ministère congolais de l’Environnement sollicite auprès d’une ONG, Project for Wildlife and Apes Conservation, P-WAC, qui tient un centre de sauvetage et de réhabilitation pas loin de Matadi, dans le sud-ouest de la République démocratique du Congo (RDC), l’accueil d’un chimpanzé saisi à Bunia, capitale provinciale de l’Ituri, au nord-est. Ils ont organisé le transfert du grand singe depuis Bunia via Kisangani jusqu’à Kinshasa, où il serait remis à l’ONG.
Le grand singe arrive à l’aéroport de Kisangani, le 15 septembre 2025, en transit vers Kinshasa. « Une fois les formalités administratives réglées, le chimpanzé a été amené près de l’avion », écrit P-WAC, dans un rapport circonstancié sur la remise de l’animal à Kinshasa. « C’est à ce moment-là que l’officier qui le surveillait a remarqué la présence d’une trentaine de primates ».
A l’arrivée du chimpanzé saisi à Bunia à Kinshasa, ces autres cages contenant les primates vus à Kisangani étaient également à bord de l’avion.
Le ministère de l’Environnement charge alors des inspecteurs d’enquêter sur cette cargaison. Le 19 septembre, en présence des inspecteurs, les agents de P-WAC sont allés récupérer ces cinq cages. Ils y découvrent 35 primates vivants, y compris trois bébés chimpanzés. Trois autres singes ont été retrouvés morts : deux dans des cages et un derrière un pneu au sol.
« Les inspecteurs ont fait leur travail (un travail remarquable…) et sont remontés jusqu’à la personne qui les avait », explique Amandine Renaud, fondatrice et directrice de P-WAC, dans une réponse par mail à Mongabay.
Les animaux confiés aux soins du P-WAC incluent une variété des singes du genre cercopithèque — des ascagnes (Cercopithecus ascanius), des cercopithèques de Allen (Allenopithecus nigroviridis), des cercopithèques à tête de hibou (Cercopithecus hamlyni — vulnerable, selon le Redlist de l’UICN), des cercopithèques de l’Hœst (Allochrocebus lhoesti — vulnerable aussi), et des jeunes chimpanzés aussi (Pan troglodytes troglodytes — en danger d’extinction).
Le rapport de P-WAC décrit « des conditions dramatiques » dans lesquelles ont été trouvés ces animaux, marquées notamment par l’accumulation des défections de 10 jours : « forte fièvre, malnutrition, déshydratation, infection respiratoire, grippe, anémie et traumatisme psychologique important ».

Un centre des soins et de réhabilitation des primates
Un mois après, les primates sauvés poursuivent leur restauration au centre réhabilitation du Kongo central. P-WAC travaille avec le mnistère de l’Environnement à accueillir les primates confisqués par des éco-gardes, inspecteurs, et policiers. L’ONG opère avec un centre de réhabilitation et de soins, où les animaux peuvent être restaurés dans des zones forestières sécurisées qui reproduisent les conditions naturelles et préparés à être relâchés.
L’objectif est de réintroduire ces primates dans leur milieu naturel, dit Renaud , mais cette étape n’est pas au programme actuellement. « Les rescapés sont trop jeunes (le plus jeune primate pèse 500 grammes), et leur état de santé reste préoccupant. Ils sont victimes du braconnage et, après avoir été retirés de leur famille, de leurs forêts, ce qui est déjà un événement traumatique en soit, ils sont restés des jours enfermés, entassés sans soins et sans l’alimentation nécessaire à leurs besoins. Ils sont tous arrivés malades, affaiblis, anémiés, blessés et déshydratés. Aujourd’hui, l’équipe veille à les remettre sur pied ».
Plus tard, les singes et les chimpanzés seront intégrés aux groupes existants et pourront réapprendre à vivre dans les arbres, dans les forêts, où ils vont, écrit-elle.
Le centre de réhabilitation de P-WAC dispose de plus de 200 hectares. « Le refuge, situé au cœur d’une forêt, propose ainsi un environnement similaire au milieu d’origine des primates. Les structures d’accueil (uniquement des forêts, aucune cage ni volière) et l’espace ne sont donc pas un problème », écrit Renaud.
« La difficulté réside dans les dépenses alimentaires qui augmentent de surcroît. Il a également fallu recruter de nouveaux soigneurs et leurs salaires sont donc à financer ».

Les trafiquants tentent de reprendre les animaux saisis
Par ailleurs, une organisation locale a écrit au directeur national de l’ICCN, Yves Ngangay, pour réclamer les animaux saisis. Ngangay confirme la demande d’un trafiquant à Mongabay, au téléphone : « Je leur ai demandé de fournir les permis qui les autorisent à capturer ces animaux, le lieu de provenance et les dates de captures », explique ce dernier, sans divulguer le nom du groupe, ni du responsable de la cargaison saisie. Mais depuis, ces personnes n’ont plus fait signe, indique-t-il.
Mais Adams Cassinga, responsable de l’ONG congolaise Conserv Congo, spécialisée dans la protection de la faune, explique à Mongabay, que le responsable de la cargaison destinée à Kinshasa est connu. « Il s’agit d’un trafiquant connu », explique Cassinga. « Il doit d’abord être interpellé et chargé officiellement. Mais, il est connu par la fraternity de la conservation. Il n’est pas seul. Toute une équipe ».
Les saisies d’animaux illégalement trafiqués, notamment des chimpanzés qui sont protégés par la loi, sont courantes en RDC. Les sanctions ne suivent pas souvent, à l’instar du dossier de 38 primates à destination de la Thaïlande, saisis le 2 décembre 2023, au Togo et rapatriés en RDC.
« Il faut renforcer la sécurisation de nos parcs et même de nos frontières, et surtout avec les compagnies aériennes. Des fois, ils ne sont pas informés, ils croient que ce sont de petits animaux. Surtout sur les espèces protégées, ils n’en savent pas. Il faut des sensibilisations », insiste Ngangay.
Pour lui, les mesures dissuasives sont importantes pour arrêter le trafic des animaux. Il suggère aussi le renforcement de la surveillance aux frontières et envisage plus de sensibilisations auprès de divers services publics.
Ces animaux ne peuvent plus revenir aux braconniers, assure Ngangay. « C’est inadmissible. C’est pourquoi on a saisi ça », insiste-t-il, en indiquant que le « réseau mafieux » des braconniers doit être démantelé. Ngangay explique, en outre, que les recherches sont en cours pour identifier les braconniers, ainsi que ceux qui les ont aidés à embarquer les cargaisons identifiées à Kisangani dans l’avion à destination de Kinshasa.
Image de bannière : Une petite singe au réveil de l’anesthésie — elle a été amputée au refuge suite à une blessure. Image avec l’aimable courtoisie de P-WAC.
CORRECTION : Cet article a été mis à jour le 17 octobre afin de corriger des erreurs concernant la chaîne de conservation des primates sauvés.
Des Tamarins-lion dorés et perroquets saisis chez des trafiquants au Togo grâce à TWIX WEST AFRICA
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