- Le gouvernement congolais a approuvé de nouveaux projets d’exploration et d’exploitation de blocs pétroliers dans la plus grande aire protégée du pays.
- Les organisations de défense de la nature alertent sur les menaces potentielles de cette exploitation minière sur la biodiversité et de ses conséquences irréversibles sur les communautés.
- Les études d’impact environnemental et social n’ont pas encore été rendues publiques et les autorités de la République du Congo se murent dans un silence face au plaidoyer de la société civile, pour l’abandon de ces projets.
Le Parc national de Conkouati-Douli, la plus grande aire protégée de la République du Congo, située à l’ouest du pays, et couvrant une superficie de 504 950 hectares (1 247 758 acres), soit deux fois la taille du Luxembourg, est fortement menacée par des projets d’exploitation pétrolière.
Le gouvernement congolais a approuvé, en l’espace de 13 mois, deux blocs d’exploration pétrolière, qui, ensemble, chevauchent plus de la moitié de la superficie terrestre du parc et près de 90 % de ses zones humides.
Après l’octroi d’une licence pour le bloc pétrolier de Conkouati en février 2024, à la société chinoise China Oil Natural Gas Overseas Holding United, les autorités congolaises ont également accordé, en avril 2025, un deuxième permis pour le bloc de Niambi à la compagnie nigériane Oriental Energy.
Cette approbation intervient en dépit des appels incessants des organisations de défense de la nature nationales et internationales, invitant le gouvernement à renoncer à ces projets miniers.
Les ONG américaine Earth Insight et congolaise « Centre d’actions pour le développement » (CAD), alertent une nouvelle fois, dans un nouveau rapport publié ce 4 septembre 2025, à la veille de l’Africa Climate Week, prévue du 8 au 10 septembre 2025, à Addis Abeba, en Éthiopie, sur les menaces sans cesse croissantes, liées à l’exploration pétrolière au sein de ce parc.
Dans un courriel à Mongabay, Katie Boston, Senior Spatial Analyst à Earth Insight, explique que les partenaires régionaux ont souhaité profiter de l’Africa Climate Week et l’Africa Climate Summit « pour attirer l’attention sur cette préoccupation, d’autant plus qu’il est encore temps d’influencer la trajectoire, les permis étant destinés à l’exploration et non à la production ».

Le nouveau rapport de Earth Insight et du CAD, publié un an après le dernier sur le même sujet, révèle de nouvelles informations sur le bloc pétrolier de Niambi et la menace croissante qu’il représente pour les communautés, la faune, les forêts et les écosystèmes de la réserve naturelle.
Il présente également la menace combinée des deux blocs d’exploration actifs, Niambi et Conkouati, et précise qu’en 2024, 24 % du parc était déjà en danger ; et qu’avec l’ajout du bloc de Niambi, 32 % supplémentaires sont désormais menacés, ce qui porte à 56 % la superficie totale du parc terrestre menacée.
Engagements internationaux bafoués
Le Parc national de Conkouati-Douli, qui partage sa frontière nord avec le Parc national de Mayumba au Gabon, couvre plus de 8 000 km² de forêt tropicale, de zones humides, de mangroves, de rivières, d’estuaires et de zones marines.
Il abrite des populations importantes d’espèces sauvages menacées, dont environ 900 gorilles des plaines de l’Ouest, 7 000 chimpanzés communs et 900 éléphants de forêt africains, ainsi que le dauphin à bosse de l’Atlantique, etc.
De nombreuses communautés dépendent également des ressources de cette forteresse de la nature, mais avec ces projets pétroliers controversés, ce sont environ 7 000 personnes vivant dans les emprises des blocs pétroliers qui risqueraient d’en pâtir.

À en croire Trésor Nzila Kendet, Directeur exécutif de l’ONG congolaise CAD, très active auprès des communautés de la zone, l’activité minière n’a pas encore démarré dans le parc, mais les communautés s’inquiètent pour leur avenir. Il a dit dans un courriel à Mongabay que « les communautés n’ont pas été consultées ni impliquées dans le processus de prise de décision. Leurs droits à l’information, à la participation et à un consentement libre et éclairé ont été ignorés ».
Nzila dit également que les activités extractives auront un impact significatif sur la vie des communautés et qu’il sera indispensable de renforcer leur résilience, ainsi que leurs capacités d’adaptation face à cette situation.
Ce militant de la société civile congolaise rapporte, par ailleurs, que les études d’impact environnemental et social, pour l’exploration des deux blocs pétroliers, n’ont pas encore été réalisées.
Il dénonce une violation des exigences légales et des standards internationaux. « Les autorités continuent d’ignorer leurs propres engagements. Cette situation s’inscrit dans un contexte plus large de mépris, par les autorités gouvernementales, non seulement des lois et conventions ratifiées, mais également des préoccupations légitimes exprimées par les organisations nationales », dit-il.

Earth Insight et CAD appellent le gouvernement congolais à révoquer les permis pétroliers qui empiètent sur le Parc national de Conkouati-Douli et ses zones tampons, à respecter et à appliquer les lois environnementales, afin de garantir que les aires protégées restent exemptes d’activités extractives.
Ils invitent également l’État congolais à garantir un processus décisionnel transparent et inclusif, notamment en rendant publiques les évaluations d’impact environnemental et social, en consultant de manière significative les peuples autochtones, les communautés locales et la société civile.
Mongabay a adressé au début de cette semaine une demande d’interview à la ministre de l’Environnement, du Développement durable et du Bassin du Congo, Arlette Soudan-Nonault, restée sans réponse.
En insistant dans le projet d’exploration de ces blocs pétroliers dans une aire protégée, le Congo se met en marge de ses engagements internationaux pris en faveur de la protection de la biodiversité, violant notamment l’article 8 de la Convention des Nations unies sur la diversité biologique (CBD), qui oblige les Parties à protéger les écosystèmes, à réglementer les activités nuisibles à la biodiversité, et à assurer la conservation effective des zones protégées.
« La décision d’accorder ces permis d’exploration pétrolière risque de nuire à la crédibilité internationale du Congo, d’affaiblir l’accès au financement de la biodiversité et de compromettre sa position dans les négociations environnementales mondiales », souligne Boston de Earth Insight.
Image de bannière : Le Parc national de Conkouati-Douli, qui partage sa frontière nord avec le Parc national de Mayumba au Gabon, abrite des populations importantes d’espèces sauvages menacées, dont des gorilles des plaines de l’Ouest et des chimpanzés communs, comme cette femelle chimpanzé avec un bébé sur les mangroves de la Réserve de Conkouati-Douli, en République du Congo. Image de Maryleine via Flickr (CC BY-ND 2.0).
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