- Les parties prenantes au Partenariat sur les forêts du bassin du Congo, (PFBC), ont tenu, début juin, la 20è réunion de cette organisation sous-régionale à Kinshasa, capitale de la République Démocratique du Congo (RDC).
- Lors de cette réunion, les participants ont insisté sur l’urgence de passer des discours aux actes en vue d’éviter le péril face aux effets des dégradations climatiques ressentis de plus en plus dans la région.
- Face à la montée des crimes contre l’environnement les participants ont recommandé plus de fermeté dans la répression et plus de collaboration au niveau régional.
Des experts en environnement, en biodiversité, en conservation de la nature et en gouvernance forestière, des scientifiques en matière de l’environnement et la biodiversité animale et végétale, des représentants de la société civile et des décideurs publics ont appelé lors d’une conférence à actions urgentes pour les forêts d’Afrique centrale.
Tout en reconnaissant l’intérêt des forêts du bassin du Congo (268 millions d’hectares sur un territoire de 540 millions), plus grand puits de carbone au monde, pour le monde, les 500 personnes, pour la plupart spécialistes des forêts qui ont pris part à la conférence, ont lancé des appels pour passer des discours aux actes en vue d’éviter le péril face aux effets des dégradations climatiques déjà ressentis de plus en plus dans la région.
Au cours de la conférence de trois jours qui s’est tenue au début du mois de juin (3-5 juin), les experts ont échangé, entre autres sur la consolidation des aires protégées, la planification de l’utilisation des terres ou encore la lutte contre la criminalité environnementale.
Cette 20e conférence du Partenariat pour les forêts du Bassin du Congo (PFBC) a été organisée par le gouvernement congolais, sous la facilitation de la France et du Gabon, sous le thème « accélérer la protection et la gestion durable des écosystèmes forestiers d’Afrique centrale ».
La conférence a identifié plusieurs défis, notamment de gouvernance foncière, avec un besoin ressenti dans plusieurs pays comme la RDC quant à l’établissement des cadastres agricole et forestier. Les défis sécuritaires et de participation des communautés locales aux efforts de conservation et de restauration des écosystèmes ont aussi meublé les discussions.
« Il faut quitter la théorie et passer à la pratique »
Sanctus Niragira, ministre burundais de l’Environnement a invité les parties au PFBC, à passer à l’action, notamment en ce qui concerne l’accès à l’eau. Niragira a insisté sur la réponse à la résolution du problème d’eau pour ne pas disparaître, selon lui.
Dans plusieurs pays de la région, le cas du Burundi dont une partie de l’ouest du pays fait encore face aux inondations depuis le lac Tanganyika, les raretés et abondance de cette ressource déplacent les populations. « Cela signifie que nos interventions ne sont pas à la hauteur des défis et nous devons trouver les solutions », a dit Sanctu Niragira. « C’est l’heure de changement », car, selon lui, le défaut d’adaptation condamnant à disparaître . « Il faut quitter la théorie et passer à la pratique », a-t-il insisté sans ambages lors de son allocution.
Pour sa part, la ministre de l’Environnement de la RDC, Eve Bazaiba a particulièrement défendu la conciliation des « besoins climatiques et le besoin de pain ». Il importe, pour elle, de tenir compte des besoins et priorités des populations propriétaires et gardiens des forêts. Bazaiba souhaite que les parties au PFBC quittent l’aide au développement en matière environnementale, pour aller vers le partenariat gagnant-gagnant.
Au cours d’une table-ronde sur la gestion inclusive des forêts et de la biodiversité au service des conditions de vie des populations locales, les participants ont montré que les Etats investissent peu dans les initiatives de développement au bénéfice des peuples autochtones et des communautés locales.
Toutefois, ils ont indiqué que initiatives encourageantes se développent dans la région. L’Angola, par exemple, implique de plus en plus les communautés dans la conservation des forêts. En même temps, la République du Congo prend aussi des mesures qui allient conservation des forêts, de la biodiversité et développement communautaire comme l’indique même le rapport de la table-ronde.
La fermeté face à la criminalité environnementale
En vue de consolider les efforts de conservation qui existent dans la région du bassin du Congo, les participants à la réunion de Kinshasa souhaitent aussi davantage d’implication des entreprises privées dans les efforts de conservation, ainsi que plus de collaboration entre divers ministères (économie, finances et environnement, par exemple) plutôt que d’en rester à des secteurs presque cloisonnés, ainsi que l’implication de la Banque africaine de développement dans le financement des projets phares de conservation et développement communautaire.
Mais la collaboration, il en faut avantage également pour lutter contre la criminalité environnementale, c’est-à-dire, des crimes contre les espèces végétales et animales comme les éléphants, les primates et les perroquets, qui sont protégées.
A la table-ronde sur la criminalité, les spécialistes ont montré que ce fléau environnemental exerce une pression sur les forêts du bassin du Congo. Les experts s’inquiètent d’une « recrudescence de la criminalité environnementale » dont les auteurs sont des bandes armées organisées en réseaux susceptibles d’engendrer l’insécurité dans la région.
Selon Paul Bour, Directeur du Projet d’appui au complexe transfrontalier d’aires protégées BSB Yamoussa, entre le Cameroun et la Centrafrique, la justice peut aider à faire reculer le braconnage. Lors de son intervention dans un atelier sur la criminalité faunique le 5 juin à Kinshasa, il a dit que l’implication des personnes issues des communautés environnant les aires protégées donne de bons résultats dans la lutte contre le braconnage. Ces éco-gardes ne sont donc pas des agents de l’Etat, contrairement aux pratiques courantes dans la région. « Il faut absolument qu’on parvienne à donner un statut à ces personnages. Ces personnages sont des employés du projet mais n’ont pas mandat à travailler seul sur le terrain », explique Bour.
La solution aux crimes environnementaux, selon les experts, implique des actions régionales coordonnées : partage de renseignements, adoption des législations strictes, surveillance des frontières notamment avec le concours des technologies performantes. Les participants ont aussi recommandé plus de fermeté face à ces crimes. « Il faudra y opposer une réponse pénale efficace » avec une coopération entre instances judiciaires régionales, écrivent-ils dans un rapport.
Soutenir la recherche
Au cours de la conférence, le collège des scientifiques qui est un des organes du PFBC, a insisté sur l’importance de soutenir la recherche en vue, entre autres, de trouver une solution au besoin exprimé par les parties : rendre plus visible le bassin du Congo et ses ressources.
Pour leur part, la France et le Gabon qui ont assuré la facilitation de cette réunion du PFBC, une coalition internationale dédiée à la conservation et à la gestion durable des forêts, « jusqu’à Belém [dans la capitale espagnole Lisbonne, NDLR], la mobilisation pour les forêts tropicales du bassin du Congo doit s’intensifier dans les enceintes multilatérales », indiqué le communiqué conjoint de la co-facilitation. Les deux pays ont pris l’engagement de renforcer la collaboration avec le secteur privé, en vue de contribuer à en vue d’améliorer la conservation des forêts. Ils promettent aussi d’organiser en 2025 une conférence sur la criminalité environnementale.
Image de bannière : La 20e conférence du Partenariat pour les forêts du Bassin du Congo (PFBC) a axé ses travaux sous la thématique de l’accélération de la protection et la gestion durable des écosystèmes forestiers d’Afrique centrale. Image de Didier Makal pour Mongabay.