- La forêt de Gishwati, fusionnée en 2016 avec la forêt naturelle voisine de Mukura, pour créer le Parc national de Gishwati-Mukura, couvre aujourd’hui une superficie de 3,558 hectares.
- Depuis 2023, plusieurs types de plantes exotiques, dont le théier, l'avocatier, l'eucalyptus et l'acacia, ont été déracinés de cette réserve naturelle.
- La création d’un couloir écologique de cafés d’ombres traversant la réserve naturelle de Gishwati-Mukura s’avère une solution efficace.
- Le couloir écologique constitué par les cafés d’agroforesterie et des arbres à canopée indigène peut entraîner de nombreux avantages écologiques et socio-économiques.
Un premier plan en matière de conservation communautaire propose la création d’un couloir écologique constitué par les cafés d’ombres au milieu de la réserve naturelle de Gishwati-Mukura, pour préserver les habitats naturels de la faune et de la flore et soutenir les moyens de subsistance locaux autour de cette réserve naturelle située au Nord-Ouest du Rwanda.
La forêt de Gishwati, fusionnée en 2016, avec la forêt naturelle voisine de Mukura, pour créer le Parc national de Gishwati-Mukura, couvre aujourd’hui une superficie de 3,558 hectares, qui pourtant, reste vulnérable aux nombreuses pressions et dégradations humaines.
Malgré la mobilisation des responsables du parc et des autorités administratives locales dans l’élimination des plantes exotiques qui constituaient jusqu’ici la base d’alimentation pour ces communautés locales vivant autour du parc, la réserve continue de subir des pressions humaines croissantes avec l’agriculture intensive et la pollution qui menacent son intégrité.
Dans cette campagne visant la restauration des écosystèmes naturelle, les responsables du Parc de Gishwati- Mukura envisagent de réhabiliter quelques 800 hectares de terres couvertes par les plantes invasives.
Mobilisation pour l’élimination des plantes invasives
Depuis 2023, plusieurs types de plantes exotiques dont notamment le théier, l’avocatier, l’eucalyptus et l’acacia, ont été déracinés de cette réserve naturelle nouvellement créée pour les remplacer avec les arbres indigènes.
Anaclet Budahera, gardien en chef du parc, estime une fois que ces plantes exotiques ne sont pas éliminées complètement, leur présence dans la nature risque d’entraîner une pénurie alimentaire pour la faune sauvage, tout en aggravant les conflits entre l’homme et les animaux au milieu de ce parc. « Ces espèces exotiques envahissantes sont reconnues comme une des causes principales de la perte de biodiversité », affirme-t-il à Mongabay.

Les données officielles de la direction du parc montrent que grâce aux efforts consentis dans la conservation de ce parc, la population de chimpanzés est passée de 13 en 2008 à 36 en 2023, et une étude de 2018, a révélé que la biosphère abrite 174 singes dorés en voie de disparition.
Le parc abrite également un certain nombre d’espèces menacées : les chimpanzés de l’Est (Pan troglodytes schweinfurthii, classés comme menacés sur la Liste rouge de l’UICN), les singes dorés (Cercopithecus mitis kandti, classés comme en voie de disparition), les singes des montagnes (Cercopithecus l’hoesti, classés comme vulnérables), et plus de 232 espèces d’oiseaux, dont 20 sont endémiques du Rift Albertin.
Cette région s’étend sur plusieurs zones transfrontalières entre l’Ouganda, le Rwanda, la République démocratique du Congo, la Tanzanie, ainsi que le Burundi.
Malgré les progrès accomplis à travers l’application de lois plus strictes contre la chasse et le braconnage, et la sensibilisation du public à l’importance de la conservation de la biodiversité, certains experts affirment que de multiples pressions dues aux activités humaines, fragilisent toujours l’état de la biodiversité autour de ce parc.
Impact des activités anthropiques
Une étude récente réalisée par un groupe de chercheurs issues de différentes universités et institutions de recherche au Rwanda et en Allemagne, a montré que malgré autant défis, la création d’un couloir écologique de cafés d’ombres traversant la réserve naturelle de Gishwati-Mukura, s’avère une solution efficace.
Dans cette étude, publiée en juillet 2025, dans la revue scientifique Trees, Forests and People, les chercheurs observent le fait que cette biodiversité de la réserve – soit confinée dans un petit espace, entouré d’une population dense. Cette situation a des répercussions inévitables sur les efforts de conservation et la disponibilité alimentaire pour les communautés locales.
« La création d’un couloir écologique de cafés d’ombres reste une solution gagnant-gagnant compte tenu du fait que le Rwanda ne dispose pas suffisamment de terres pour trouver l’endroit ou reloger ces communautés vivant autour du parc », explique Dr Athanase Mukuralinda, représentant pays pour le Rwanda au Centre international pour la recherche en agroforesterie (CIFOR/ ICRAF) et co-auteur de cette étude.

Café d’agroforesterie pour une conservation durable du parc
En effet, les chercheurs tentent encore de comprendre mieux les pratiques existantes de conservation de la biodiversité et qui peuvent être facilement associés aux nouvelles solutions de couloirs de plantation de café au milieu de cette réserve naturelle.
Il s’agit dans cette étude de prendre l’exemple du Parc de Gishwati- Mukura, localisé dans la partie rwandaise du bassin du Congo et d’en montrer les interactions entre les hommes et les écosystèmes en matière de pressions humaines sur la biodiversité. « Le café d’ombrage est une pratique bien connue au Rwanda et dans le monde entier, mais la façon dont cela se faisait jusqu’ici, ne tenait pas en compte la conservation de biodiversité », explique Dr Mukuralinda à Mongabay.
Selon lui, la plantation du caféier d’ombrage bien sélectionné au milieu du parc peut constituer un couloir écologique susceptible de soutenir les initiatives existantes en matière de conservation de la biodiversité au Rwanda.
Dr Marina Frietsch, enseignante-chercheuse à l’Institut des systèmes socio-écologiques, de la Faculté de développement durable à l’université Leuphana, en Allemagne et co-auteure de cette étude, estime qu’en adoptant le café cultivé à l’ombre au milieu du parc, les communautés locales peuvent tirer des bénéfices directs de la nature tout en contribuant à la conservation de la biodiversité. « Le couloir de la culture de café [au milieu du parc] va, non seulement contribuer à la conservation de la biodiversité, mais aussi c’est une solution durable pour renforcer les moyens de subsistance, pour plusieurs ménages établis à proximité de cette aire protégée », dit-elle à Mongabay.
D’après l’étude, le paysage de cette zone est fortement dégradé, et le Parc de Mukura-Gishwati semble être constitué de deux zones forestières distinctes.
Les recherches effectuées au milieu et aux alentours du parc ont montré que les communautés locales vivant autour de ces zones forestières protégées dépendent fortement de l’agriculture à petite échelle et sont souvent confrontées à l’insécurité de leurs moyens de subsistance.

Conservation communautaire
Les responsables de l’Office rwandais pour la promotion du développement (RDB, sigle en anglais), affirment que la conservation du Parc national de Gishwati-Mukura permet, non seulement de préserver le patrimoine naturel du pays pour les générations futures, mais ces efforts jouent également un rôle important dans la promotion de l’écotourisme en tant que pilier du développement économique.
Télésphore Ngonga, analyste de la conservation pour RDB, estime que les travaux de restauration du Parc national de Gishwati-Mukura ont été réalisées jusqu’ à 80-90 %, ce qui indique des progrès significatifs dans la préservation de cette importante zone naturelle. « Le braconnage a été pendant longtemps une menace majeure susceptible de compromettre les efforts de conservation, mais la donne a changé avec l’implication des communautés locales dans la conservation de la biodiversité au milieu du parc », dit-il à Mongabay.
En vue de pérenniser ces efforts, la Commission nationale pour l’UNESCO collabore avec les communautés locales dans des campagnes de sensibilisation sur l’importance de la préservation de la biodiversité autour de ce parc. « Des projets sont en cours pour éduquer les citoyens autour de l’importance de sauvegarder ces réserves de biosphère et aux bénéfices mutuels qu’elles apportent », explique à Mongabay Dominique Mvunabandi, directeur de l’unité des sciences, de la technologie et des innovations à la Commission nationale rwandaise pour l’UNESCO.

Toutefois, les résultats de cette nouvelle étude montrent que la création d’un couloir de plantations de cafés d’ombres pourrait être une voie supplémentaire pour garantir les moyens de subsistance et, en même temps, contribuer à la conservation de la biodiversité, en augmentant la connectivité entre les deux réserves naturelles qui couvrent le Parc national de Gishwati-Mukura.
« Le couloir écologique constitué par les cafés d’ombres et des arbres à canopée indigène peut entraîner de nombreux avantages écologiques et socio-économiques », affirme Dr Mukuralinda, dans une interview exclusive à Mongabay.
Image de la bannière : Le Parc national de Gishwati-Mukura comprend la forêt naturelle de Gishwati, couvrant 1 439,72 hectares, et la forêt naturelle de Mukura, qui s’étend sur 1 987,74 hectares. Une zone tampon entoure le parc, couvrant 992,48 hectares supplémentaires. Image de Aimable Twahirwa pour Mongabay.
Citation :
Tom Reckmann et al. (2025). A coffee corridor for biodiversity and livelihoods: climatic feasibility of shade coffee cultivation in western Rwanda, Trees, Forests and People, Vol. 21, 100941,. Doi : 10.1016/j.tfp.2025.100941.
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