- La République démocratique du Congo dispose d’une nouvelle loi sur l’aménagement du territoire.
- Cette loi complète l’arsenal administratif qui clarifie la politique nationale en matière de gestion des terres et des forêts.
- Les défenseurs de l’environnement insistent sur la nécessité de respecter la loi, afin de protéger les droits des paysans et des peuples autochtones en matière foncière.
La République démocratique du Congo (RDC), dispose de sa première loi sur l’aménagement du territoire. Le 5 juillet 2025, après son adoption le 12 juin, par le Sénat, le président Félix Tshisekedi a promulgué cette loi.
Cette loi suscite l’espoir dans le rang des défenseurs de l’environnement et des droits des paysans, notamment des Bambuti (Twa ou Pygmées), un peuple autochtone de l’Afrique centrale. Il signifie un nouveau départ pour le respect des droits fonciers de ces populations.
Depuis l’indépendance du pays, le foncier a accumulé plusieurs conflits et frustrations, en raison du fait que les paysans ne sont pas propriétaires des terres sur lesquelles ils sont établis et exploitent.
Durant plusieurs années, l’administration minière a donné la primauté aux titres miniers au détriment des terres agricoles et des agglomérations. Dans les zones minières comme le Lualaba et le Haut-Katanga, où l’on exploite le cobalt et le cuivre, les carrés miniers sont encore attribués sans distinction des terres agricoles et des villages. Et, les processus de délocalisation y attisent les conflits entre exploitants artisanaux, industriels et paysans souvent victimes des délocalisations dénoncées comme injustes.
Vaste pays de l’Afrique centrale avec 2,45 millions de kilomètres carrés, la RDC était donc régie, jusqu’à cette loi, selon le média français RFI, par un décret de 1957, datant de la colonisation belge.

L’espoir d’une remise de l’ordre dans le foncier
La loi sur l’aménagement du territoire apporte des changements majeurs dans l’affectation des terres, explique Joseph Bobia, responsable du Bureau de Veille et de gouvernance des ressources naturelles (BVGRN), une plate-forme réunissant des organisations de la société civile environnementale basée à Kinshasa, capitale de la RDC. La loi délimite les terres selon leur usage : agriculture, foresterie, conservation, exploitation minière, etc., explique Bobia.
Surtout, explique encore ce dernier, elle met fin aux « affectations désordonnées » des terres et introduit un zonage du territoire national pour une répartition claire et d’après les fonctions de différents types de terres. « Toute affectation des terres devra désormais respecter les plans d’aménagement établis, évitant les superpositions de droits fonciers et l’exploitation anarchique des espaces », explique Bobia à Mongabay.
Cette loi émerge dès 2017, dans le cadre de l’engagement du gouvernement pour réformer l’aménagement du territoire soutenu par l’Initiative pour les forêts de l’Afrique centrale (CAFI). Le but est alors, pour CAFI, d’opérer une préservation cohérente des forêts.
Dans le cadre de cette réforme, le gouvernement a initié, en 2023, une étude sur le capital forestier et s’est doté d’autres outils de sa politique d’aménagement du territoire que la nouvelle loi vient compléter.

Une forte déforestation peu maîtrisée
Avec plus de 60 % des forêts équatoriales du bassin du Congo, la RDC compte à ce jour un réseau d’aires protégées cumulant une superficie de 31 675 000 ha (78270629,58 acres) et 14 750 000 ha (36448043 acres) des concessions de conservation.
À ce jour, elle compte également, d’après le PFBC, 2 800 000 des concessions des forêts des communautés locales, 39 466 000 ha (97522609 acres) des permis miniers et 211 000 ha (521392 acres) des concessions agro-industrielles et des périmètres agroforestiers.
Outre ces espaces non accessibles au public pour des exploitations diverses, il faut compter les concessions forestières et agricoles attribuées aux privés. Cela réduit dans certaines régions les espaces accessibles aux communautés qui pourtant en dépendent et vivent souvent dans le dénuement. La clarification de leurs droits s’impose, selon Rights and Ressources, une coalition d’une centaine d’associations défendant les droits des peuples autochtones dans plusieurs pays au monde.
Or, à ce jour, en même temps, la RDC connaît une forte déforestation qui prive les populations des ressources forestières et parfois les éloigne de ces écosystèmes vitaux pour eux.
« Ce qu’il faut faire pour exécuter correctement cette nouvelle loi, c’est d’avoir une prise de conscience collective face au diagnostic actuel peint dans le secteur de l’aménagement du territoire », explique à Mongabay Bartélémy Mafuta, le Directeur de Programmes au sein de l’ONG Program manager Geofirst Développent. « Ainsi, l’exécution correcte passera avant tout par les actions de sensibilisation et de vulgarisation de mass pour rechercher son appropriation par les acteurs à tous les niveaux, s’engager dans le processus d’identification et d’élaboration de ses mesures d’application, encourager la démarche du processus d’approbation des outils d’aménagement du territoire élaborés en phase pilote, rendre effectif les différents conseils d’aménagement du territoire comme de cadre multi acteurs de concertation, appliquer les sanctions exemplaires sans complaisance, etc. », ajoute Mafuta.
Avec cette loi, explique Joseph Bobia, la gouvernance forestière prend en compte de nouveaux acteurs, notamment les instances administratives et locales inférieures à la province jouissant d’une autonomie de gestion, sans oublier les chefs coutumiers, les organisations de la société civile, ainsi que le secteur privé. « Toute action sur les terres, y compris les forêts, doit respecter le consentement libre, informé et préalable des communautés locales et des peuples autochtones pygmées », indique Bobia.
Image de bannière : Les Pygmées mènent une vie nomade au sein des écosystèmes forestiers, où ils se nourrissent des produits de la chasse et de la cueillette. Image de Pasteur JONATHAN ASSANI HEMEDI via Wikimédia Commons (CC BY-SA 4.0).
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