- L'engagement des Koyas est fondamental pour la mise en œuvre de politiques environnementales.
- Les populations autochtones contribuent efficacement à la préservation de l'environnement. En y intégrant leurs savoirs traditionnels et leurs expériences, elles proposent des solutions adaptées aux défis climatiques.
- Les totems représentent des éléments symboliques incarnant les valeurs et les croyances des Koyas. Chaque groupe peut avoir des totems spécifiques souvent associés à des animaux ou des éléments naturels, considérés comme des ancêtres ou à des protecteurs.
- La communauté Koyas s'engage également dans des initiatives de sensibilisation plus larges, collaborant avec des organisations non gouvernementales, pour promouvoir la conservation des forêts et des ressources naturelles. De même, en intégrant ces valeurs dans l'éducation des jeunes, les Koyas s'assurent que les futures générations seront mieux préparées à défendre et à préserver leur environnement naturel.
Abijï revient d’une journée au campement, sa vieille lance sur l’épaule et un chargement de porc-épic frais, d’ignames sauvages et d’écorces dans son panier à dos. Il connaît tous les recoins de la forêt dense.
« Je suis allé chercher à manger pour ma famille. La forêt c’est notre TOUT », raconte-t-il, en posant son butin à terre, devant sa hutte en bois et paille.
Les Koyas, l’ethnie d’Abijï, seraient les plus vieux habitants des terres du Gabon. À Ibea où il vit, à 19 kilomètres de la ville de Mekambo, dans le canton Djouah (Nord-est), bien qu’il cohabite avec les communautés bantoues, partageant ainsi leur environnement et leurs ressources. Les modes de vie de son ethnie sont différents de ces derniers.
« Nous adoptons diverses stratégies pour protéger notre environnement, en intégrant des pratiques traditionnelles et des connaissances ancestrales. Nous pratiquons la chasse et la cueillette durable, en veillant à ne pas épuiser les ressources naturelles. Nous choisissons des périodes spécifiques pour la récolte des plantes médicinales et des fruits, permettant ainsi à la nature de se régénérer », déclare Papa Moïse, un aîné de la communauté Koyas d’Ibea.
« Préserver la biodiversité peut sembler être une tâche gargantuesque, mais nous pouvons tous, à notre échelle, faire de notre quotidien un bouclier de plus. Il suffit de pas grand-chose: ajuster nos modes de consommation…Chacun d’entre nous a un rôle à jouer », ajoute-t-il. « Il n’y a pas de geste trop petit ou insignifiant quand il s’agit de sauver le vivant », précise-il.
Les Koyas adoptent des pratiques spécifiques pour la gestion de leurs déchets, intégrant des méthodes traditionnelles et des approches modernes. Ces pratiques spécifiques incluent la mise en place de systèmes de tri sélectif, permettant de séparer les matériaux récupérables des déchets non récupérables.
Par exemple, les restes alimentaires sont fréquemment compostés pour enrichir le sol, tandis que les objets en plastique ou en métal sont récupérés pour être transformés en outils ou en objets d’art. Ce procédé leur permet, non seulement de réduire la quantité de déchets produits, mais aussi de maintenir un équilibre avec leur écosystème local.
« En ce qui concerne l’éducation des jeunes à l’agroécologie, nous utilisons les modes de transmission légués par nos ancêtres. La pratique est le meilleur moyen et le seul que nous ayons », précise Kangala, le chef de la communauté Koyas du Canton Djouah.
« Dès que la main droite fait le tour de la tête pour toucher l’oreille gauche, nous initions nos enfants aux techniques et aux savoirs à transmettre. Il s’agit de la reconnaissance des odeurs des animaux, des plantes, des arbres et des êtres sacrés. Quand et comment s’en procurer. Comment garder la forêt. En résumé, tout tourne autour d’une relation sacrée et respectée de la faune et de la flore », déclare Masona, Koyas du groupe Samuadi.
Du fait de la sacralité qu’ils vouent à la forêt-même, voisins des Bantoues, ils installent leurs camps au cul-de-sac des villages.
Pour préserver la biodiversité, les Koyas, tous les jours, font des choix de consommation et optent pour des alternatives plus responsables, sans pour autant se priver ! Côté alimentation, manger bio, local et de saison. Côté agriculture, champs agricoles très réduits: les lopins de terre. Contrairement à toute une littérature romancée concernant leur mode de vie, il n’y a pas aujourd’hui de groupes Koyas vivant indépendamment de l’agriculture et se consacrant uniquement à la chasse et à la cueillette.
« Avant d’entrer en forêt, je parle à l’entrée. Je dis pourquoi je viens. Si c’est pour chasser, je demande à la forêt de me donner de quoi nourrir ma famille ce jour. Si c’est pour couper une feuille ou une écorce, j’explique à la forêt mon intention finale pour qu’elle me soit utile. Tout doit être fait et dit de manière à respecter ces endroits qui nous donnent tout », explique Ossima, un jeune Koyas.
L’écosystème des Koyas peut être défini aujourd’hui en tenant compte de plusieurs dimensions interconnectées, qui reflètent à la fois leur mode de vie traditionnel et les défis contemporains auxquels ils font face. Les pratiques de chasse, de cueillette et d’agriculture itinérante des Koyas sont profondément ancrées dans leur culture et leur identité, leur permettant de vivre en harmonie avec les ressources naturelles tout en préservant leur patrimoine culturel.
« Ce qui peut distinguer notre communauté des Bantous, c’est déjà l’habitat. Ensuite, la chasse responsable. Nous n’en tuons pas plus qu’on doit en manger. Nous ne tuons pas tout ce qui bouge. Il y a des animaux totem dans chaque clan. Nous ne nous limitons pas seulement à la production alimentaire, mais englobons également des dimensions sociales, culturelles et environnementales qui sont essentielles à notre mode de vie », explique Jeanne Marthe Minkoue-Mi-Ella, Koyas et présidente de l’ONG AGAFI.
Les Koyas possèdent une connaissance approfondie de leur environnement. Ils savent identifier les espèces végétales comestibles et médicinales, ainsi que les périodes propices à leur cueillette. Cette expertise leur permet de maximiser les bénéfices, tout en préservant l’équilibre écologique de leur habitat. De plus, la cueillette est souvent accompagnée de rituels et de traditions qui renforcent les liens sociaux au sein de la communauté, soulignant l’importance de la solidarité et du partage des ressources.
Par ailleurs, il est important de se demander si les décideurs politiques sollicitent les Koyas pour partager leur expertise et leurs connaissances. La reconnaissance de leur savoir traditionnel est cruciale pour élaborer des politiques environnementales efficaces et inclusives. Un dialogue constructif entre les communautés Koyas et les autorités peut favoriser une meilleure compréhension des enjeux écologiques et promouvoir des solutions adaptées, qui respectent les droits et les modes de vie des Koyas tout en contribuant à la durabilité de l’environnement.
Malheureusement, les savoirs et savoir-faire des autorités traditionnelles et coutumières, dans le domaine de la prévention, ne sont pas entendues.
Ce jour-là, plusieurs bantoues, assis à même le sol, se faisaient consulter et soigner chez un chef guérisseur.
« On nous sollicite qu’à des fins personnelles. Jamais pour faire bénéficier notre expertise au plus grand nombre, à la République. Très souvent c’est pour se soigner ou se purifier avec nos feuilles par des méthodes que, seuls, nous connaissons », dit Masona
Les populations autochtones d’Afrique centrale, notamment les Koyas, occupent une place essentielle dans la lutte contre le changement climatique. Leur connaissance approfondie des écosystèmes et des pratiques durables leur permet de contribuer efficacement à la préservation de l’environnement. En y intégrant leurs savoirs traditionnels et leurs expériences, elles peuvent proposer des solutions adaptées aux défis climatiques.
D’autre part, les Bantous, qui occupent des terres fertiles, ont développé des modes de vie sédentaires basés sur l’agriculture et l’élevage. Leur culture est souvent marquée par des pratiques agricoles intensives, ce qui peut entraîner une pression sur les ressources naturelles. La coexistence de ces deux modes de vie, bien que parfois conflictuelle, offre une opportunité unique de collaboration.
En intégrant les savoirs traditionnels des Koyas sur la gestion des forêts avec les techniques agricoles des Bantous, il est possible de créer des pratiques de gestion des ressources qui respectent à la fois les besoins des populations et la préservation de l’environnement.
Pour parvenir à une meilleure gestion des environnements, il est crucial d’encourager le dialogue entre les Koyas et les Bantous. Cela pourrait se traduire par des initiatives de cogestion des ressources naturelles, où chaque groupe apporte ses connaissances et ses compétences.
Des programmes éducatifs et des projets de développement durable pourraient également favoriser une compréhension mutuelle et une valorisation des pratiques respectueuses de l’environnement. En unissant leurs forces, ces communautés pourraient non seulement améliorer leur qualité de vie, mais aussi contribuer à la conservation des écosystèmes fragiles d’Afrique centrale.
« Au-delà de quelques personnalités et des organisations internationales qui essaient de prêter une oreille à nos conseils pour une meilleure préservation de la forêt et des autres écosystèmes, il y encore ce regard de haut qui fait que les choses n’avancent pas. Personne ne prend réellement en compte nos conseils dans ce sens », se plaint Minkoue-Mi-Ella.
Image de bannière : Abijï (droite) et Papa Moïse (gauche). Les Koyas, l’ethnie d’Abijï, seraient les plus vieux habitants des terres du Gabon. Les pratiques de chasse, de cueillette et d’agriculture itinérante des Koyas sont profondément ancrées dans leur culture et leur identité, leur permettant de vivre en harmonie avec les ressources naturelles, tout en préservant leur patrimoine culturel. Image de Géraud Wilfried Obangome pour Mongabay.
La gestion durable de l’eau combine savoirs ancestraux et solutions modernes en RCA
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