- Une équipe de chercheurs montre à partir d’observations basées sur une application pour smartphone, que la biodiversité constitue un facteur de bien-être naturel.
- L’étude remet en question la qualité de la vie dans les environnements à forte densité pour cause de « faibles caractéristiques naturelles » et démontre que le fait de voir ou d'entendre des oiseaux, de voir des arbres, des plantes, de voir ou d'entendre de l'eau sont des associations positives et significatives pour le bien-être mental des hommes.
- Selon les chercheurs, la présente étude souligne l’importance de considérer à la fois l’accessibilité des milieux naturels et la richesse de la biodiversité qu’ils contiennent lors de la conception d’espaces visant à améliorer la santé mentale.
- Elle fait une comparaison entre la vie en ville et la vie dans les zones avec une riche biodiversité.
Les éléments naturels tels que les arbres, les plantes, les cours d’eau ou les animaux sont indispensables à la santé des populations. C’est la conclusion d’une étude menée par des chercheurs du King’s Collège de Londres et publiée en avril 2024 par la revue Nature.
Il s’agit de la première étude examinant l’impact quotidien des rencontres avec différents niveaux de biodiversité naturelle sur notre santé mentale, en contextes et en temps réels.
Les chercheurs ont recueilli les données à partir de Urban Mind, une application pour smartphone utilisée pour mesurer l’impact de l’environnement sur le bien-être mental. Au total, 41 448 évaluations ont été réalisées entre avril 2018 et septembre 2023, soit 65 mois. Cette évaluation a mobilisé près de 1 998 participants à travers le monde.
Ryan Hammoud, Doctorant à l’Institut de psychiatrie, psychologie et neurosciences au King Collège de Londres (Royaume-Uni) et principal auteur de l’étude contacté par Mongabay, affirme que l’application a utilisé des évaluations écologiques momentanées (EMA), collectant ainsi des informations sur les données démographiques des participants, leurs facteurs socio-économiques, leurs habitudes de sommeil et leurs antécédents de santé mentale auto-déclarés.
« Au cours des 14 jours suivants, l’application a programmé 42 évaluations écologiques momentanées (3 par jour), qui ont permis de collecter des informations sur les perceptions des participants sur leur environnement bâti et social subjectif, ainsi que sur leur emplacement via la géolocalisation basée sur GPS », explique-t-il.
Le contraste de la vie urbaine
La vie urbaine représente un ensemble de dysfonctionnements des paramètres de l’écosystème, pouvant, directement ou indirectement, conduire à la maladie mentale. Pour les chercheurs, cette étude souligne l’importance pour les urbanistes, les décideurs politiques et les professionnels de la santé mentale de concevoir, d’entretenir et de promouvoir l’utilisation d’espaces verts diversifiés dans les zones urbaines pour, non seulement, améliorer la biodiversité des écosystèmes, mais aussi faciliter une meilleure coexistence entre l’homme et la nature, améliorant ainsi le bien-être des populations (communautés locales).
Selon Hammoud, « les environnements présentant un plus grand éventail de caractéristiques naturelles étaient associés à un bien-être mental accru par rapport à ceux présentant un plus petit éventail de caractéristiques naturelles ». A l’en croire, les environnements avec des arbres et des oiseaux ont montré une augmentation de 0,74 (IC intervales de confiance à 95 % : 0,68, 0,80) de l’échelle de bien-être mental par rapport à ceux ne comportant qu’un seul élément tel que des arbres ou des oiseaux. « Ces résultats étaient également significatifs jusqu’à 8 heures après l’exposition initiale. Nous avons également constaté que si les environnements naturels étaient bénéfiques au bien-être mental, la biodiversité représenterait 23,4 % de cet effet », ajoute-t-il.
Une forme de thérapie efficace
« Les effets thérapeutiques et les bienfaits physiologiques de la nature sur notre santé mentale sont indéniables », déclare Mamadou Yalpha Diakité, Chargé de santé mentale à International médical corps (IMC) au bureau de Tombouctou (Mali). Selon lui, la biodiversité est une réponse adaptative efficace aux troubles défavorisant la stabilité psychique des individus. Une alternative naturelle donc, contre des maladies mentales. Certains pays ont développé des techniques thérapeutiques uniques de contact avec la nature. « Le yoga, dans un jardin aménagé tôt le matin, dans un environnement calme, est extrêmement bénéfique pour notre équilibre mental et nous évite beaucoup de troubles mentaux, comme les troubles de comportement », explique Diakité.
« La nature a des bénéfices pour la réduction du stress. Une simple promenade de quelques minutes dans un parc ou une rue arborée suffit pour baisser ou réguler notre niveau de cortisol, l’hormone responsable du stress et des troubles anxieux, la dépression, l’hyperactivité et les troubles d’humeur », assure Diakité.
Joint au téléphone par Mongabay, Souleymane Coulibaly, Professeur à l’Ecole normale supérieure de Bamako, confirme les apports de la biodiversité dans la prise en charge des patients souffrant de troubles mentaux. « Des sorties dans la nature permettant d’être en contact avec la biodiversité contribuent à faire baisser les foyers de tension au niveau du cerveau et d’apaiser des souffrances mentales » , indique le Psychologue malien.
De son côté, Dr Moussa Cissé, Psychopathologue au département psychopédagogie de l’Ecole normale supérieure de Bamako poursuit : « Les citadins doivent accepter de sortir momentanément des grandes villes pour aller se ressourcer. Le contact avec la nature est toujours bénéfique car on y trouve de l’air bien filtré, bien oxygéné, qui, du coup, contribue à régénérer nos cellules. Une fois que les cellules sont bien régénérées, ça veut dire que le cerveau est bien revitalisé à travers le champ oxygéné. »
L’homme et la biodiversité sous la menace de la chaleur en Afrique de l’Ouest
Image de Bannière : La biodiversité naturelle booste la santé mentale, Image par Mongabay.