- Les cyclones tropicaux augmentent de manière significative la mortalité infantile dans les pays en développement, quelle que soit leur intensité – un impact qui ne s’explique pas par la détérioration des infrastructures sanitaires.
- Les impacts varient toutefois en fonction des pays, certains enregistrant jusqu’à 10 décès pour 1 000 naissances, tandis que d’autres très peu.
- Les différences pourraient être dues à divers facteurs, tels que le contexte géographique et la situation politique.
Une récente étude révèle que tous les cyclones tropicaux, y compris ceux de faible intensité, accroissent notablement la mortalité infantile dans les pays en développement. Curieusement, selon les chercheurs, les impacts de ces aléas sur les services de soins prénataux ne suffisent pas à expliquer ce taux élevé de mortalité. D’où la nécessité d’améliorer la réponse aux catastrophes au niveau de ces régions, d’autant plus que le changement climatique augmentera leur fréquence et leur gravité.
Les impacts liés aux catastrophes naturelles telles que les cyclones tropicaux et les ouragans constituent l’un des plus grands défis en matière de santé publique. En particulier, les modèles climatiques indiquent que ces phénomènes augmenteront à la fois en fréquence et en intensité à mesure que le climat se réchauffe.
Mis à part leurs répercussions immédiates, comme les blessures et les traumatismes, les cyclones peuvent aussi avoir des conséquences sanitaires indirectes et à long terme, en raison de la destruction des infrastructures dédiées. L’ouragan Maria, qui a frappé Porto Rico (dans les Caraïbes), en 2017 a, par exemple, détruit une grande partie des infrastructures de santé publique, ce qui a entraîné 4 645 décès supplémentaires.
Ces effets pourraient être encore plus importants au niveau des pays à faible revenu et revenu intermédiaire. Étant donné qu’ils ne disposent que d’infrastructures sanitaires peu développées, en raison de leurs ressources limitées, ces pays sont les plus vulnérables aux impacts des cyclones.

Les effets pourraient être encore plus graves chez les nourrissons et les enfants, ceux-ci étant beaucoup plus sensibles à la hausse de la prévalence des maladies et à la perturbation des services sanitaires. « De nombreuses théories établissent un lien entre l’exposition aux cyclones tropicaux et la santé infantile », explique dans un courriel à Mongabay, Zetianyu Wang, chercheur au RAND Corporation, une société de conseil et de recherche américaine pour l’amélioration des politiques.
« Outre les blessures ou les décès directement causés par les forces physiques des cyclones tropicaux, comme la noyade ou les impacts d’objets volants, les cyclones tropicaux peuvent nuire à la santé des enfants par de nombreux autres biais indirects », indique-t-il. Cependant, les études concernant ces impacts se concentrent principalement sur les cyclones intenses ou très intenses.
Dans le cadre de l’étude publiée, le 21 mai dernier, dans la revue Science Advances, Wang et ses collègues, ont exploré plus qu’avant les impacts des cyclones tropicaux, toutes intensités confondues, sur la mortalité infantile dans les pays à revenu faible et intermédiaire. Leurs résultats apportent un nouvel éclairage sur les réels impacts de ces catastrophes naturelles.
Une hausse de 11 % de la mortalité infantile due aux cyclones
Pour réaliser leur enquête, Wang et ses collègues ont analysé près de 1,7 million de dossiers médicaux d’enfants provenant de sept pays en développement, notamment Madagascar, l’Inde, le Bangladesh, le Cambodge, les Philippines, la République dominicaine et Haïti. Leurs résultats révèlent que les cyclones ont augmenté la mortalité infantile de 11 %, en moyenne dans l’ensemble des pays, soit 4,4 décès sur 1 000 naissances.

Le risque de mortalité le plus élevé était observé au cours de la première année suivant un cyclone. « Les conséquences [des cyclones] affectent la santé de tous, mais les enfants dépendent largement des soins de leurs parents et de leur famille, et le traumatisme post-catastrophe peut être complexe », explique dans un courriel à Mongabay, Andrea Monica D. Ortiz, professeur associé au département de géographie de l’université de Concepción, au Chili, qui n’a pas participé à la recherche.
Les cyclones peuvent aussi avoir des impacts à moyen et à long terme sur le développement de l’enfant. Selon Wang, les cyclones peuvent entraîner des complications à la naissance lorsque les mères y sont exposées pendant leur grossesse, ce qui peut nuire à leur développement à long terme.
Une récente étude a en outre révélé que les épisodes de chaleur extrême amplifient les impacts des cyclones sur le développement cérébral des enfants, démontrant une étroite corrélation entre le système climatique, les cyclones qui en résultent et la santé infantile. « L’exposition prénatale aux catastrophes naturelles, comme les cyclones, crée un stress physiologique chez les femmes enceintes qui a un impact direct sur le développement du cerveau du fœtus », indique, à Mongabay, l’un des auteurs de la recherche, Yoko Nomura, chercheuse au département de psychologie du Queens College de New York et la City University of New York.
Des impacts qui varient en fonction des pays
Cependant, alors qu’on pourrait penser que les impacts sanitaires des cyclones sont principalement attribués à la détérioration des infrastructures sanitaires, l’analyse de Wang et de ses collègues montre que cela ne suffit pas pour expliquer la hausse de la mortalité infantile. D’autre part, les cyclones semblent influer sur les enfants, quel que soit leur niveau d’intensité.
Selon l’expert, des études complémentaires seront nécessaires pour identifier les facteurs exacts à l’origine de cette hausse de la mortalité. « Ce domaine mérite d’être approfondi, car intuitivement, des cyclones plus forts pourraient entraîner une plus grande étendue des impacts et, donc, une mortalité infantile plus importante », confirme Ortiz.
Par ailleurs, les impacts varient considérablement en fonction du pays. Au Bangladesh, en Haïti et en République dominicaine, les cyclones ont été suivis d’une augmentation de plus de 10 décès pour 1 000 naissances. En revanche, l’Inde, les Philippines, le Cambodge et Madagascar n’ont enregistré que de légères augmentations.

Selon les chercheurs, cette variation pourrait être due à différents facteurs. Certains pays n’ont par exemple connu que quelques tempêtes de catégorie 3 (voire plus faible) au cours de la période de l’étude. Un autre facteur est la différence en matière de capacité de prévention ou la présence de problèmes de santé publique sous-jacents.
D’autres facteurs, tels que le manque de données ou les politiques locales, sont aussi à considérer. « Des facteurs sociaux et politiques, tels que les systèmes d’alerte précoce, la communication, les politiques locales et nationales de gestion des catastrophes et de santé, peuvent tous influencer les résultats, outre la disponibilité et la qualité des ressources financières nécessaires au soutien de ces initiatives », dit Ortiz.
Des stratégies de prévention qui doivent être adaptées au contexte
Malgré quelques points à éclairer encore, ces résultats soulignent la nécessité d’améliorer les réponses aux catastrophes, surtout dans les pays en développement. Selon Wang, « il n’existe pas de « meilleurs moyens » de prévenir l’impact des cyclones tropicaux sur la mortalité infantile, car les efforts de réduction des risques de catastrophe doivent toujours être adaptés au contexte ».
« Cependant, il existe des lignes directrices internationalement reconnues, telles que le « Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe », qui peuvent aider les pays et les décideurs politiques à élaborer des politiques et des stratégies de réduction des risques de catastrophe spécifiques à chaque pays », indique-t-il.
Ortiz recommande en outre d’établir des systèmes d’alerte précoce et des campagnes d’information, afin que les populations soient mentalement mieux préparées. Nomura conseille des stratégies pour une protection à long terme de la santé maternelle, qui, par extension, bénéficiera aux enfants.
Image de bannière : Une mère et son enfant dans un hôpital du Burundi pour cause de paludisme. Image de Maria Cierna, Slovak Republic/UNDP via Flickr (CC BY-NC-ND 2.0).
Citations :
Zetianyu Wang et al.The impact of tropical cyclone exposure on infant mortality in low- and middle-income countries. Sci.Adv.11, eadt9640(2025). DOI:10.1126/sciadv.adt9640
DeIngeniis, D., Blum, M., Lee, R. M., Shereen, A.D., Nomura, Y. (2025). Prenatal exposure to extreme ambient heat may amplify the adverse impact of Superstorm Sandy on basal ganglia volume among school-aged children. PLoS One 20(6): e0324150. https://doi.org/10.1371/journal.pone.0324150
Nishant Kishore et al. Mortality in Puerto Rico after Hurricane Maria. N Engl J Med 2018;379:162-170. VOL. 379 NO. 2. DOI: 10.1056/NEJMsa1803972
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