- Melenoh Melenoh Sewud Ndimbe est une trentenaire qui se passionne pour la conservation de la faune et particulièrement pour la biodiversité depuis qu’elle est enfant.
- Son inspiration lui vient de son père, enseignant de géographie, avec qui elle a souvent visité le jardin botanique de Limbe, chef-lieu du département du Fako dans le sud-ouest du Cameroun
- Comme tout activiste camerounais, elle effectue des missions sur le terrain bien qu’elle doive composer parfois avec des problèmes liés aux déplacements sans pour autant se sentir découragée.
- Ndimbe remercie ceux qui l’ont soutenue lorsqu’elle a entamé sa carrière, dont son père, ses frères et ses collègues.
Née dans les années 1980 à Limbe, dans la région du sud-ouest du Cameroun, la scientifique et activiste Melenoh Melenoh Sewud Ndimbe raconte qu’elle a été en contact très tôt avec la nature.
C’est en 2010 que sa carrière en conservation prend réellement son envol. Diplômée de l’université d’Oxford, en Grande-Bretagne, et spécialisée dans les pratiques internationales de protection de la faune, elle est lauréate du British Ecological Society en 2014.
Selon Ndimbe, la conservation exige de se rendre fréquemment sur le terrain pour étudier le comportement des animaux, évaluer leur nombre et effectuer d’autres tâches diverses.
Ainsi, en tant qu’activiste et chercheuse, elle a participé à plusieurs missions dans diverses régions du Cameroun dans le cadre de projets variés. Chaque fois, l’expérience est unique.
Elle se rappelle qu’en 2016, elle exécutait des tâches de surveillance lors d’une mission avec l’ONG Ebo Forest Research Project pour qui elle a par ailleurs travaillé plusieurs années. L’équipe de quatre personnes, dont elle faisait partie, a posé des caméras de surveillance dans des forêts, notamment la forêt d’Ebo dans la région du Littoral.
Un jour, raconte-t-elle, l’équipe est allée poser des caméras et d’autres appareils de communication pour observer les gorilles de la forêt d’Ebo, dans le département du Nkam. Sur le chemin du retour, un troupeau d’éléphants bloquait la route. L’équipe est restée bloquée jusqu’à tard dans la nuit.
« J’ai eu la plus forte montée d’adrénaline de ma vie. Je n’oublierai jamais cette journée », confie-t-elle.
Daniel Mfossa, son collègue d’alors, ne voit plus Melenoh Melenoh Sewud Ndimbe de la même façon depuis cette tournée dans la forêt et la rencontre d’un troupeau d’éléphants. Il ajoute qu’elle a montré un grand sens des responsabilités et, surtout, un amour véritable pour la conservation.
Une passion pour les chimpanzés
Cette espèce est en voie de disparition en raison du trafic de primates destinés à la consommation tant au Cameroun qu’au Nigeria voisin. Elle adore travailler auprès des primates mais les chimpanzés sont son premier amour.
« Le chimpanzé demeure mon premier amour en ce qui concerne la conservation de la faune. J’ai eu l’occasion d’étudier cet animal dans le cadre d’un projet qui visait le Cameroun et le Nigeria. Je m’intéresse à cette espèce animale parce qu’elle est menacée d’extinction », raconte-t-elle.
Il y aurait entre 1 200 et 2 400 chimpanzés au Nigeria et au Cameroun, selon des sources. Ndimbe se félicite que, malgré les dangers qui planent sur cette espèce, elle arrive à protéger ces primates grâce à son travail.
Le braconnage menace la conservation
Ndimbe déploie toute son énergie pour condamner et combattre les actes de braconnage dans les aires protégées du Cameroun ou au-delà. Elle pense que le gouvernement camerounais lutte efficacement contre le braconnage mais qu’il peut encore faire mieux.
Elle demande notamment au gouvernement d’augmenter considérablement le nombre de patrouilles dans les aires protégées, de hausser le nombre de gardes dans les parcs et, surtout, d’établir des liens de collaboration entre les services de la conservation de la faune et les communautés locales ou riveraines des aires protégées.
Elle propose d’assurer la protection des chimpanzés par des outils d’information et de communication tels que ceux servant à identifier les troupeaux d’éléphants qui se déplacent au Cameroun, à cartographier leur territoire et à surveiller leurs mouvements.
Selon elle, des outils pareils ont aujourd’hui permis de réduire les massacres d’éléphants au Cameroun. Certaines statistiques prévoient même une augmentation de la population d’éléphants au Cameroun et ailleurs grâce à cette méthode.
« Il suffirait d’étendre les actions menées pour réduire le braconnage des éléphants. Elles pourraient s’appliquer à toutes les espèces fauniques, en particulier aux chimpanzés, singes et gorilles dont les effectifs ne font que diminuer » estime Ndimbe
Protéger la mangrove du littoral : une obligation
La mangrove est un réservoir de carbone. C’est un lieu de reproduction des poissons et, enfin, une barrière naturelle contre la montée des eaux et des courants marins violents.
Cependant, l’activiste déplore que la destruction de ce milieu naturel ait un impact sur le climat local, régional et planétaire. Le réchauffement climatique a d’ailleurs été l’objet de la COP26 de Glasgow en novembre 2021.
« Il faut protéger la mangrove parce que c’est une forêt qui piège le gaz carbonique contenu dans la vase », affirme-t-elle avec détermination en évoquant ce qui se fait au Cameroun.
Les femmes, parties prenantes de la conservation
Melenoh Melenoh Sewud Ndimbe est convaincue que les femmes du Cameroun ont levé toutes les barrières. Elle cite en exemple le milieu de la conservation où les femmes travaillent de concert avec les hommes parce qu’elles en sont capables.
Sur le plan professionnel, les hommes et les femmes se complètent et seule la solidarité mène à la réussite.
D’après son expérience, il faut se frayer un chemin dans la société, que l’on soit homme ou femme et peu importe le métier choisi. Or, si une personne, sans distinction de sexe, a la possibilité de faire évoluer les mentalités, elle a l’obligation de le faire pour le bien de l’humanité.
Son père, son premier mentor
La scientifique et activiste loue les qualités exceptionnelles de son père qui l’a toujours soutenue et encouragée à devenir scientifique et activiste.
« Dans ma carrière, j’ai été beaucoup encouragée par des hommes : par mon père, indirectement au début, ensuite directement », a-t-elle expliqué.
Elle souligne également qu’elle a reçu l’appui de ses frères qui, avec le temps, sont devenus à leur tour des amoureux des animaux et de la nature. Au travail, collègues et supérieurs hiérarchiques masculins ont joué un grand rôle dans sa vie professionnelle.
« Ils ne m’ont jamais traitée comme une personne inférieure parce que je suis une femme », partage Ndimbe. Elle conseille aux femmes de « s’intéresser et de prendre part activement à la conservation ici et ailleurs ».
Son père, ex-enseignant de géographie, avait l’habitude de syntoniser les chaînes de télévision spécialisées en environnement, ce qui l’a poussée à s’y intéresser aussi.
Elle raconte que son père avait l’habitude d’amener ses enfants en promenade dans la nature. Il en profitait pour leur faire comprendre toute l’importance de la préserver.