- Les régions d’Afrique centrale et de l'Ouest figurent parmi les zones expérimentant les pratiques agro-écologiques.
- Aujourd’hui, la révolution agro-environnementale s’impose et les pays d’Afrique centrale et de l’Ouest ont besoin d’adopter cette pratique en remplacement aux méthodes archaïques.
- L’acquisition des compétences en matière d’agriculture de conservation est importante pour la nouvelle génération.
- Les jeunes agripreneurs dans la sous-région sont censés être de véritables acteurs dans cette mobilisation.
Dans une interview exclusive, Professeur Olusegun Adedayo Yarokun, Recteur par intérim de l’Institut rwandais pour l’agriculture de conservation (RICA, sigle en anglais), estime que, malgré des progrès réalisés dans la promotion des technologies vertes en Afrique, le continent a toujours besoin de former de nouvelles générations d’agriculteurs sur les technologies innovantes, comme l’agriculture de conservation, l’une des solutions les plus efficaces pour réduire les émissions de CO2, à court et moyen terme.
Cette approche vise à limiter des impacts négatifs de l’agriculture sur les ressources naturelles, en maintenant la qualité du sol dans certaines parties du continent, notamment en Afrique centrale, qui continue de subir une dégradation accélérée de ses ressources en terrestres, du fait des différentes pressions exercées par l’homme.
Mongabay : Pourquoi une agriculture plus écologique reste indispensable pour l’Afrique centrale ?
Olusegun Adedayo Yarokun : Les régions d’Afrique centrale et de l’Ouest figurent parmi les zones où des pratiques agro-écologiques sont capitales pour mieux renforcer la résilience des agriculteurs face au changement climatique. Toutefois, la vulgarisation de ces pratiques reste encore faible, ce qui tend à conforter les critiques et le doute sur son application aux petites exploitations agricoles de cette partie du continent africain.
L’agriculture de conservation est basée sur trois principes étroitement liés : la réduction du travail du sol, la couverture du sol pour un maximum de biomasse produite et restituée, et l’utilisation limitée d’intrants chimiques dans les sols, notamment les pesticides.
L’une des plus grandes réussites de cette pratique se déroule au Rwanda, où l’agriculture de conservation est intégrée aux systèmes de vulgarisation mis en place par le gouvernement et ses partenaires dans le secteur privé, et les organisations paysannes. Plusieurs centaines de petits exploitants agricoles commencent à l’adopter progressivement.

Aujourd’hui, la révolution agro-environnementale s’impose, et les pays d’Afrique centrale et de l’Ouest, ont besoin d’adopter cette pratique par substitution aux méthodes archaïques de l’agriculture intensive, qui ne cessent de détériorer la qualité des sols.
Mongabay : Quelles sont les meilleures solutions pour le développement de l’agroécologie garantissant la transformation de l’agriculture en Afrique Centrale et de l’Ouest ?
Olusegun Adedayo Yarokun : Aujourd’hui, l’agriculture de conservation en Afrique centrale, comme dans la plupart d’autres parties à travers le continent, ne se limite pas seulement à l’adoption des cultures résistantes à la sécheresse. Il s’agit plutôt d’une approche holistique de la conservation des sols, de la gestion de l’eau, de la perturbation minimale des terres, par des pratiques minimisant les dommages sur la santé du sol.
Dans certaines régions en Afrique centrale, comme le bassin du Congo, les techniques d’agriculture de conservation intégrées aux pratiques climato-intelligentes, présentent aujourd’hui des avantages pour les petits exploitants agricoles, grâce à l’amélioration de la santé et de la rétention de l’humidité des sols et à l’augmentation des rendements des cultures.
Inverser la déforestation, notamment dans le bassin du Congo, et accroître la productivité agricole pour répondre aux besoins d’une population croissante, tout en promouvant les pratiques d’une agriculture conservation, figurent parmi les solutions essentielles pour inverser la tendance actuelle.
Créer une nouvelle génération d’agripreneurs, reste une opportunité, pour la sous-région, d’innover et d’avoir un impact positif en augmentant la biodiversité, et en améliorant la rentabilité des exploitations agricoles.
Mongabay : Pourquoi la création d’une nouvelle génération d’agripreneurs en agriculture de conservation s’avère indispensable pour l’Afrique ?
Olusegun Adedayo Yarokun : La population en Afrique est essentiellement jeune. Une croissance importante des populations rurales, mais surtout des populations périurbaines, cause déjà de nombreux dégâts en matière de dégradation des terres et de réduction du couvert végétal. L’acquisition des compétences en matière d’agriculture de conservation reste pertinentes, pour cette nouvelle génération en vue de promouvoir et valoriser des pratiques de gestion durable des terres.
Avec la démarche en cours, nous voulons que les techniques de l’agriculture de conservation soient adoptées sur une base large.
Encore une fois, pour préserver nos terres en Afrique et augmenter la productivité, la production, cela va permettre aux fermiers de générer plus de revenus dans leur activité, tout en contribuant à réduire les émissions de gaz à effets de serre.
Les jeunes agripreneurs dans la sous-région sont censés être de véritables acteurs dans cette mobilisation, et l’idée, c’est de les accompagner dans cette transition, tout en leur donnant les moyens de développer leurs compétences, pour mieux assurer la pérennité et la santé de nos terres agricoles.

Mongabay : Le Sommet des chefs d’État et de gouvernement africain tenue à Nairobi, en juin 2024, recommande d’inverser la tendance actuelle à la dégradation des terres et de restaurer 30 % des sols dégradés d’ici à 2034 sur le continent. Qu’est-ce que cela représente avec la mobilisation en cours dans l’agriculture de conservation ?
Olusegun Adedayo Yarokun : En prenant le cas de l’Afrique centrale, par exemple, les mauvaises pratiques agricoles continuent d’exacerber les processus de salinisation et d’acidification des sols. La dégradation des sols dans plusieurs parties du continent a des conséquences néfastes sur la biodiversité et des répercussions socio-économiques néfastes.
Même la plupart de ces jeunes étaient au départ réticents pour sortir de leur zone de confort, en vue d’embrasser la carrière agricole. On observe que leur mentalité évolue au fur et à mesure qu’ils se rendent compte que, loin de se limiter aux pratiques traditionnelles, l’agriculture de conservation, qui intègre les innovations technologiques pour améliorer les méthodes de production, devient ainsi un métier qui a du sens.
Les régions d’Afrique centrale et de l’Ouest surtout évoluent dans le bon sens quant à l’adoption et la valorisation de ces bonnes pratiques d’agriculture de conservation et ce n’est pas unique pour le Rwanda. Certes, il est vrai que l’adoption de la conservation de l’agriculture peut être lente au niveau de certaines régions, mais cela évolue au fur et à mesure, surtout avec le changement de mentalité et la mobilisation de tous les acteurs dans les secteurs publics et privés, ainsi qu’au niveau des jeunes. En formant cette nouvelle génération d’agripreneurs, nous voulons également s’assurer que ces solutions innovantes puissent être prises en compte et adaptées sur le plan local et sous-régional.
Image de bannière : Professeur Olusegun Adedayo Yerokun est pédologue spécialisé dans la fertilité et la chimie appliquée des sols. Image d’Olusegun Adedayo Yerokun avec son aimable autorisation.
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