- La région de l'Extrême-Nord du Cameroun, où les températures atteignent 49°C en saison sèche, est particulièrement touchée par les effets du changement climatique.
- Des jeunes, regroupés sous la bannière « U reporter », initient les élèves au reboisement, une activité essentielle pour lutter contre la chaleur et le manque d'ombrage dans les écoles.
- Malgré ces efforts, des difficultés comme le manque d'eau pour l'entretien des plans compliquent la pérennité de ce projet.
Dans la cour de l’école publique de Palar à Maroua dans l’Extrême-Nord du Cameroun, les élèves se disputent des plants d’arbres portés par les « U reporter », un groupe de jeunes engagés dans la protection de l’environnement. Dans cet établissement scolaire, la cour de récréation est totalement dépourvue de tout ombrage. Le programme de la journée prévoit une activité de reboisement impliquant les enfants.
« Moi, moi, moi aussi », s’écrit tout haut Mariam, 7 ans, élève au cours préparatoire (CP). Visiblement déterminée à participer à cette action, la fillette tend la main pour recevoir un plant de goyavier à mettre en terre. « Je suis contente, parce que, quand cet arbre va grandir, nous aurons de l’ombre et des goyaves », ajoute-t-elle, toute souriante.
Dans cette région du Cameroun, les températures avoisinent les 49 degrés en saison sèche. Les enfants sont de plus en plus vulnérables au réchauffement de la planète dans cette partie du pays. Selon l’Indice des risques climatiques pour les enfants (IRCE) publié par le Fonds des Nations unies pour l’enfance (UNICEF), le Cameroun est classé parmi les 10 pays du monde, où les enfants sont les plus exposés aux risques, chocs, stress climatiques et environnementaux. Cette partie du pays est la plus affectée par les effets de ces changements climatiques. C’est l’une des raisons pour lesquelles les enfants et les jeunes sont désormais impliqués dans les actions de protection de l’environnement, nous avoue un responsable d’UNICEF Cameroun.
La communauté de jeunes dénommée « U reporter » a été créée en 2016, au Cameroun, avec pour slogan « Ta voix compte ». Cette initiative de l’UNICEF a pour but de sensibiliser et d’éduquer les populations sur plusieurs thématiques, dont la lutte contre les changements climatiques. À travers des actions de terrain et sur les plateformes numériques, les jeunes veulent éveiller les consciences sur les enjeux du reboisement dans cette partie du Cameroun.
Impliquer les jeunes pour le changement
« Aujourd’hui, nous sommes à plus de 200 arbres plantés dans la ville de Maroua », confie Moustapha Boukar, U reporter de la communauté de Maroua. Le sourire aux lèvres, le jeune homme de 27 ans présente fièrement le bilan des activités de reboisement qu’il mène avec son groupe dans la ville. En ce début de saison sèche dans la région, les jeunes sillonnent les artères de la ville pour échanger avec les populations sur l’importance du reboisement et la prévention des catastrophes naturelles telles que les inondations. « Cette année, nous avons vraiment ressenti les effets des changements climatiques, ici, dans notre région. Les températures étaient très élevées entre février et avril. Et pendant la saison pluvieuse, certains quartiers ont été inondés alors que ce n’était jamais arrivé avant. Nous nous sommes organisés pour toucher plus facilement les populations. Nous allons vers eux et expliquons pourquoi il est important de contribuer à la lutte contre les changements climatiques. Nous avons une page Facebook et Instagram sur lesquelles nous partageons des messages tels que « La Rigole n’est pas une poubelle » et « Tous engagés pour l’action climatique ». Nous allons aussi dans les écoles pour parler aux enfants. C’est eux l’avenir. Si nous ne faisons rien, ils hériteront d’une planète totalement pourrie et invivable », explique Moustapha.
À quelques kilomètres de la ville de Maroua, dans la localité de Maga, Déborah Hassane fait partie de ces jeunes engagés pour un éveil de mentalité sur les changements climatiques. Cette année, « nous nous sommes mobilisés pour aider la communauté. Nous travaillons sur un projet de fabrication de compost pour la fertilisation de nos terres. Nous encourageons aussi les populations à planter des arbres dans leurs domiciles », fait savoir Hassane.
Tenir le pari de la survie des arbres
Reverdir la région de l’Extrême-Nord du Cameroun, c’est le défi des jeunes U reporter. Seulement, ils font face à de nombreux obstacles. Selon Aissatou Asta, directrice de l’école publique de Palar, ce n’est pas la première tentative de reboisement dans son établissement. L’enseignante déplore le manque de ressources pour l’entretien des arbres après la mise en terre. « Quand les jeunes sont venus avec les plants, tout le monde était tellement joyeux, surtout les enfants. Quand il fait chaud, nous avons tellement de peine avec les enfants. Nous sommes très heureux, ces arbres vont nous faire du bien. Seulement, nous avons des problèmes d’eau. Il n’y a pas de forage dans notre école. Ce qui rend très difficile l’entretien de ces arbres », explique-t-elle.
Parmi les jeunes écoliers, certains sont choisis pour diriger le suivi de l’activité de reboisement en interne. Ils représentent la sentinelle dans cet établissement. C’est la stratégie adoptée par les U reporter pour faire pérenniser la plantation des arbres. « Nous avons décidé de nous appuyer sur ces enfants qui sont déjà conscients des enjeux du reboisement. Nous leur avons montré des techniques d’arrosage, et tous les matins, ils viennent avec des bouteilles d’eau pour arroser les plants. Les efforts sont visibles, mais nous n’atteignons pas encore les objectifs attendus. La création d’un point d’eau dans cette école serait vraiment bénéfique pour tous », confie Hapsatou, membre de la communauté U reporter de Maroua.
La crise climatique est un grand pari pour la génération actuelle. Elle entraîne des conséquences dévastatrices sur le bien-être des enfants à travers le monde. Professeur Kossoumna Libaa, ancien coordonnateur du Centre de formation en météorologie de Kousseri, une annexe de l’école polytechnique de Maroua, pense que les prochaines années risquent d’être plus difficiles pour les populations de l’extrême nord du Cameroun, au vu de la dégradation des ressources. Il appelle les populations à s’impliquer davantage pour sauver la planète et préserver les vies. Il recommande de mener des actions de protection des sols à travers des techniques antiérosives.
« Un arbre, un écolier », c’est le slogan adopté par l’école publique de Palar, pour être reverdie. La communauté U reporter de Maroua envisage d’élargir son champ d’action en reboisant plus d’école dans la ville, afin de créer un véritable changement dans cette partie du pays.
Image de bannière : Mise en terre d’un manguier dans une école à Maroua, dans l’extrême nord du Cameroun. Image de Fideline Minda via UNICEF.
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