- Les populations d’oiseaux indigènes en Afrique ont décliné, suite aux facteurs anthropiques provoqués directement ou indirectement par l'activité humaine.
- En Afrique, l’intensification de l’agriculture reste le facteur le plus déterminant dans le déclin global de l'avifaune local.
- Les espèces d’oiseaux indigènes forestiers ont longtemps contribué en Afrique à une gamme de fonctions écologiques importantes, notamment la pollinisation.
- La mobilisation des citoyens, dans des initiatives de conservation à travers la documentation et la surveillance des espèces d’oiseaux, reste aussi importante.
Une nouvelle étude montre que la disparition criarde des espèces indigènes d’oiseaux affecte de nombreux aspects de la vie humaine en Afrique, soulignant l’importance de restaurer les écosystèmes et d’accorder une priorité à cette rare biodiversité et à la compréhension de leur fonctionnement.
L’étude, publiée début octobre 2024, par un groupe de chercheurs de l’École de géographie, des sciences de la terre et de l’environnement de l’université de Birmingham (Royaume-Uni), montre que les populations de certains oiseaux indigènes en Afrique ont décliné à cause directement ou indirectement de l’action de l’homme.
Parmi les espèces disparues figurent notamment les frugivores indigènes (oiseaux qui mangent des fruits) connues pour leur fonction importante de dispersion des graines des plantes fruitières consommées en grande partie par l’homme.
Espèces indigènes forestiers
En Afrique, les analyses montrent que c’est l’intensification de l’agriculture, qui est le facteur le plus déterminant dans le déclin global de l’avifaune locale.
« Ces espèces d’oiseaux ont, longtemps, contribué, en Afrique, à une gamme de fonctions écologiques importantes, notamment la pollinisation, les interactions prédateurs-proies et la dispersion des graines », souligne Dr Tom Matthews, Professeur associé à l’École de géographie, des sciences de la terre et de l’environnement de l’université britannique de Birmingham (Royaume-Uni), co-auteur de cette étude.
Parmi les espèces citées par les chercheurs, il y a 13 types d’oiseaux-éléphants, dont le plus grand Aepyornis maximus mesurant 3 m de haut, ainsi que les Mascareignes avec 41 espèces d’oiseaux ayant disparu, notamment l’emblématique dodo connu pour son importance à maintenir l’équilibre dans l’écosystème.
« L’une des conclusions clés est tout simplement que 610 espèces d’oiseaux sont connues pour avoir disparu, la grande majorité d’entre elles étant imputables aux activités humaines », a dit Dr Matthews à Mongabay.
Disparition alarmante
Selon l’étude basée sur des données recueillies sur une période de 130 000 ans, publiée dans la revue « Science », les oiseaux jouent un rôle crucial dans le fonctionnement des écosystèmes. Les chercheurs estiment que leur présence et leurs activités influencent de nombreux aspects de la nature, de la dispersion des graines à la régulation des populations d’insectes.
En Afrique, Mattews et son équipe ont constaté ces extinctions, notamment chez les oiseaux-éléphants, une espèce géante, faisant partie des ratites qui vivaient exclusivement à Madagascar.
Certes, les différences les plus importantes sont observées pour chaque région en Afrique en termes de perte de l’habitat et de la biodiversité.
Alors que certaines régions sont plus impactées par l’activité humaine, la destruction des habitats dans la plupart des cas s’explique surtout par la conversion d’habitats vierges et le changement d’utilisation des terres pour l’agriculture.
Le taux d’extinction des espèces s’accélère avec de graves impacts sur les populations à différents degrés pour chaque région, selon l’étude.
Le bassin du Congo, par exemple abrite une grande diversité d’espèces d’oiseaux, dont plusieurs sont emblématiques de la région.
Professeur Beth Kaplin, chercheur principal au Centre d’excellence en biodiversité et gestion des ressources naturelles de l’université du Rwanda, a confié à Mongabay, que la restauration des écosystèmes et la priorité aux oiseaux indigènes forestiers sont cruciales pour maintenir la biodiversité et la santé en Afrique.
« Tous les acteurs dans le domaine de la conservation ont besoin d’anticiper cette perte importante d’espèces d’oiseaux et mettre en place des meilleures stratégies pour protéger les écosystèmes et maintenir les fonctions écosystémiques », a dit Kaplin.
Selon elle, la mobilisation des citoyens dans des initiatives de conservation, à travers la documentation et la surveillance des espèces d’oiseaux, reste aussi importante.
Dans la restauration des écosystèmes, les chercheurs misent sur le partage des connaissances de base des oiseaux pour chaque région, en vue de faire face au déclin drastique de ces animaux menacés.
Même si l’étude montre que la disparition de ces espèces reste un processus naturel, elle se produit généralement à un rythme beaucoup plus lent que celui des 500 à 100 000 dernières années.
Inverser la tendance actuelle
On compte un petit nombre d’extinctions naturelles d’oiseaux au cours de cette période : certaines sont plus anciennes en raison du changement climatique et de l’élévation du niveau de la mer, et d’autres dues par exemple à des éruptions volcaniques.
Toutefois, Dr Mattews, affirme que les acteurs dans la conservation ont besoin de déployer tous les moyens à leur disposition, en vue de stopper, inverser et atténuer les principaux facteurs d’extinction et mobiliser plus de financement pour pérenniser ces efforts.
Selon lui, il existe déjà de nombreuses ONG de conservation, qui font un travail formidable, mais il incombe aux pouvoirs publics de contribuer à fournir des ressources supplémentaires (et de donner davantage la priorité) à la conservation dans la mesure du possible.
Les récentes estimations de la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES) montrent qu’environ 1 million d’espèces en Afrique, essentiellement des oiseaux, sont menacées d’extinction.
Selon la plateforme, la croissance démographique, les pratiques agricoles extensives, l’urbanisation rapide, le développement des infrastructures et le trafic illicite d’espèces sauvages figurent parmi les principales causes de ce phénomène qui pourra occasionner, d’ici à 2100, la disparition de 50 % des espèces d’oiseaux d’Afrique.
« Ces espèces d’oiseaux jouent des rôles fonctionnels variés dans la protection de l’environnement en Afrique et lorsqu’ils disparaissent, nous perdons également ces fonctions », a dit Mattews.
Image de bannière : Moucherolle des Mascareignes dont l’image a été prise dans la réserve de la forêt d’Ebony, Maurice. Image de Mikael Mildén via Flickr (CC BY-SA 2.0).
Citation:
Matthews, J. T., Triantis, A. K., Wayman P. J., Martin, E. T. & al. (2024).The global loss of avian functional and phylogenetic diversity from anthropogenic extinctions. Science, Vol 386, Issue 6717, 55-60. DOI: 10.1126/science.adk7898.
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