- WoMin a tenu du 09 au 11 octobre 2024, la troisième édition du Women Climate Assembly (WCA).
- Le WCA a réuni une centaine de femmes africaines qui ont échangé sur leurs expériences et porté le plaidoyer pour le renforcement de leurs rôles dans la quête de la justice climatique.
- La plupart des organisations présentes au WCA ont en commun une approche communautaire du changement climatique.
Saly, SENEGAL — La cinquantaine bien sonnée, Martha Agbeni s’exprime avec calme et assurance. « Nous avons l’objectif de reverdir 10 millions d’hectares au cours des dix prochaines années », souligne Martha Agbenila directrice exécutive de Lokiaka Community Development Center (LCDC), une organisation active dans le delta du Niger, une région jadis connue pour sa forte concentration en biodiversité.
L’immensité de la tâche, que s’est assignée son organisation ne semble guère l’intimider. Pour réussir une telle mission, Agbeni est d’avis que le mode opératoire passe par une mobilisation communautaire très forte, où la sensibilisation, la formation et le plaidoyer prennent une part essentielle.
« Jusqu’à présent, nous avons formé 316 femmes en technique de restauration de la mangrove », dit Agbeni, au cours d’un entretien avec Mongabay. La méthode utilisée par LCDC consiste en l’utilisation de plants d’asperges, que les femmes sèment dans les mangroves endommagées.
Nous avons rencontré Agbeni à Saly, une station balnéaire située au sud de la capitale sénégalaise, où elle prenait part à la troisième Assemblée des Femmes pour le Climat, organisée par WoMin en partenariat avec des organisations communautaires, notamment Lumière Synergie pour le Développement (LSD, Sénégal), Green Development Advocates (GDA, Cameroun), Kebetkache Women and Development Resource Centre (Nigeria).
Ce conclave, tenu du 09 au 11 octobre 2024, a réuni une centaine de femmes africaines venues d’une dizaine de pays (Burkina Faso, Cameroun, Côte d’Ivoire, Gabon, Ghana, Kenya, Mali, Sénégal, Sierra Leone, Zimbabwe), qui ont partagé leurs expériences et fait le plaidoyer pour des solutions endogènes dans la lutte contre le changement climatique et l’autonomisation des femmes.
L’ensemble des organisations de femmes, présentes lors de cette assemblée, ont la particularité de travailler au niveau communautaire, en contact direct avec les populations subissant les conséquences du changement climatique.
Mobilisation des victimes
Situé dans le sud du Nigeria, le delta du Niger est une région de 20.000 km2, connue comme l’une zones humides les plus polluées au monde. Aux marées noires provoquées par l’extraction pétrolière, se sont ajoutés les effets du changement climatique. De l’avis de Martha Agbeni, les effets néfastes sont palpables et avec la dégradation de l’environnement, c’est la survie même des populations qui est en jeu.
Face au désastre environnemental, LCDC a choisi de concentrer son intervention sur la restauration de la mangrove. Une orientation, que sa directrice exécutive explique par le fait que la mangrove est plus efficace dans le captage du carbone et aussi par le fait qu’elle est une source de revenus pour des milliers de femmes de la région.
« Nous ne pouvions pas attendre l’aide du gouvernement, il fallait qu’on agisse d’abord en comptant sur nos propres moyens. Aujourd’hui, nous pouvons restaurer 11 hectares », indique Agbeni.
L’approche communautaire de LCDC, outre les principales bénéficiaires, que sont les femmes, inclut aussi des groupes de pécheurs qui aident dans le ramassage des asperges que les volontaires regroupent dans une pépinière avant de procéder à leur semis dans les zones endommagées de la mangrove. Au bout de la chaîne de restauration, LCDC a mis en place un comité chargé de faire le suivi et le contrôle.
De l’Afrique australe au Centre en passant par l’Ouest et l’Est, les manifestations du changement climatique relatés durant l’Assemblée, sont multiformes. On note entres autres, la déforestation, la perturbation du cycle des pluies, les inondations, l’érosion côtière, la salinisation des terres, autant de méfaits qui sont sources d’appauvrissement des populations.
Aussi venues partager l’expérience de leur organisation dénommée Cyfund Africa (basée à Nairobi au Kenya), Nelima Ongaya et Stephany Mwangi évoquent de prime abord la disparition de la neige qui couvrait le mont Kenya comme étant l’un des plus frappants symptômes du changement climatique dans leur pays.
« Cette disparition consécutive à la hausse des températures s’ajoute à la sècheresse, la perturbation du cycle des précipitations et les inondations », confient les deux jeunes femmes à Mongabay.
Au niveau de Cyfund Africa, la lutte contre les effets du changement climatique passe par le reboisement et surtout l’adoption de la culture hydroponique, la technique qui consiste à faire pousser des plantes en utilisant une solution nutritive à base d’eau plutôt que de la terre. A l’instar de LCDC au Nigeria, Cyfund Africa dispose aussi d’une approche communautaire avec des partenariats noués avec des associations, des écoles aussi bien en milieu rural qu’urbain.
A la tête du secrétariat de Natural Resource Women Platform (NRWP), Veronica B. Gray, travaille dans tous les 15 départements que compte le Liberia.
« Nous faisons le renforcement de capacités des femmes surtout dans la formulation de leurs besoins et de leurs plaintes adressées au gouvernement », explique-t-elle. A l’en croire, « la plupart des zones d’intervention font face à une mauvaise qualité des récoltes à cause des inondations qui cette année ont eu la particularité d’avoir affecté des zones jusqu’ici intactes ».
En plus de ces activités de sensibilisation des femmes sur les dangers de la coupe de bois, NRWP et ses partenaires ont développé un mécanisme d’octroi de crédits aux femmes accompagné d’une formation sur la création d’activités génératrices de revenus.
La vision de WoMin, une organisation basée à Johannesburg en Afrique du Sud et qui se définit comme « éco-féministe et panafricaniste », est celle d’une Afrique dans laquelle toutes les femmes ont un accès sûr aux ressources dont elles ont besoin avec leurs familles et communautés pour vivre et gagner leur vie.
L’Assemblée des femmes pour le climat est une initiative entamée en 2022. En plus de la lutte contre le changement climatique, WoMin a intégré dans son action, la lutte contre les ravages de l’industrie extractive.
Image bannière : Femme arrosant des plantes dans un jardin communautaire à Kédougou, Sénégal. © Markus Mauthe / Greenpeace.
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