- En Ouganda, l’exploitation des zones humides favorables aux cultures et des espaces riches en pétrole et en gaz, entraînent des pressions foncières de la part des gardes forestiers, et provoquent l’augmentation des conflits et des crimes environnementaux selon les autorités.
- L’Autorité Nationale de Gestion de l’Environnement, le « NEMA » a averti qu’à partir du 1er avril, elle va alourdir les peines pour les infractions environnementales tant en amendes qu’en peines privatives de liberté, en plus de l’application d’une loi en vigueur sur l’environnement.
- Les leaders de l’opposition saluent cette mesure de l’application de la loi vieille de 24 ans, portant réorganisation de l’environnement. En revanche, ils dénoncent le nombre croissant des expulsions forcées et brutales des communautés. Ces dernières craignent que l’application de la loi cible les personnes à faible revenu.
- La société civile parle d’un manque des titres fonciers appropriés, qui alimente la violation flagrante de certains règlements environnementaux et les expulsions forcées des communautés dans leurs terres.
L’Autorité Nationale de Gestion de l’Environnement ou « NEMA » vient d’annoncer des sanctions contre toute personne qui ne respecte pas les lois de l’environnement de l’Ouganda.
Cet organe de l’Etat prévoit même le renforcement des poursuites pénales existantes, à partir du 1er avril prochain. Par ailleurs, de nouvelles sanctions d’urgence contre les auteurs de pollution de l’environnement seront appliquées.
Ce régime de sanctions dit « Express Penalty Scheme » selon le communiqué de NEMA vise à « dissuader le non-respect des lois sur l’environnement, à punir par le paiement de sanctions pécuniaires et emprisonner les auteurs afin de prévenir la dégradation de l’environnement».
Il stipule que les contrevenants vont encourir une amende pour des infractions environnementales spécifiques allant de trois à cent millions de shillings ougandais.
L’Autorité Nationale de Gestion de l’Environnement bénéficie donc de ce droit, qui privilégie l’engagement de poursuites judiciaires ou de faire payer une amende comme prescrit dans ces sanctions en plus de la suspension des opérations d’une entreprise qui pollue la nature.
Selon James Okot-Okumu, qui dirige le conseil d’administration de NEMA, l’ancienne loi nationale sur l’environnement limitait son pouvoir.
« Elle veillait à ce que les mesures de protection environnementales soient respectées en retirant les certificats, le permis, la licence et tout autre document pertinent, mais la grande responsabilité appartenait aux entités administratives locales », raconte-t-il.
Ces nouvelles sanctions d’urgence contre les pollueurs interviennent dans un contexte où des rapports comme celui de Mananga Ronald Kakumba dans Afrobarometer « Let the people have a say » disent que même les directives du chef de l’Etat ougandais Yoweri Museveni, d’expulser les personnes où les entreprises qui empiètent sur les zones humides, n’ont guère fait de changement.
Dans les zones humides de l’Ouganda, l’accaparement des terres reste l’une des causes de conflits fonciers entre les communautés elles-mêmes et parfois entre les communautés et les industriels qui y exploitent selon une étude des éditions scientifiques et académiques de l’Ouganda.
Sans permis de conservation de l’environnement, ces occupants, très appliqués à leurs activités, entrent en conflit avec la loi, expliquent les défenseurs des droits fonciers.
Selon le rapport de la Banque mondiale, (….) seulement « 10% des terres de l’Afrique subsaharienne sont enregistrés. Le reste est sans papiers, administrés de manière informelle et donc vulnérable à l’accaparement et à l’expropriation sans compensation adéquate ».
Bob Ambrose Nuwagira, responsable principale de la communication à NEMA a affirmé que « la perte et la dégradation » des zones humides sont en partie dues à la surexploitation des occupants illégaux.
L’extraction et les installations connexes se produisent dans les zones comme dans les villages où les droits fonciers ne sont pas clairement bien définis.
De plus, toujours d’après ces rapports, des conflits d’acquisition des terres, dans ce pays riche en pétrole estimé à 6,5 milliards de barils, augmentent et les medias locaux signalent souvent des incidents en particulier dans les zones extractives.
En conséquence, « les collectivités locales en sont perdantes » selon Richard David Otyaluk, un défenseur du droit à la terre.
Les inspecteurs de l’autorité nationale de l’environnement dénoncent, quant à eux, l’utilisation des technologies de fabrication obsolètes et l’absence d’usines de traitement des effluents fonctionnelles pour bon nombre d’industries.
Par conséquent, déplorent-ils, les déchets bruts et nocifs sont rejetés, sans traitement, dans l’environnement.
L’intervention du gouvernement
Bien que le gouvernement ougandais ne soit pas directement impliqué dans les expropriations violentes commises, il intervient à ce que les entreprises privées respectent les lois environnementales.
Le chef de l’Etat Yoweri Museveni s’est adressé à plusieurs reprises à la nation, appelant à cesser les empiétements illégaux sur les écosystèmes fragiles, à évacuer sans condition les entreprises afin de sauver et de restaurer les écosystèmes au profit de la population.
« Les investisseurs ne sont pas au-dessus de la loi. Le nôtre est de veiller à ce que les règles et réglementations gouvernementales soient pleinement mises en œuvre, » a réagi dans son allocution le directeur exécutif de NEMA Barirega Akankwasah.
Place aux sanctions dures aux contrevenants
Les violations de l’environnement sont généralisées et les principaux contrevenants sont souvent soit protégés, soit laissés intacts, déplore Bulyerali Joan, responsable juridique de Witness Radio-Ouganda, membre des organisations de défense des droits fonciers.
Une majorité des ougandais classent la déforestation comme le problème environnemental le plus important, après l’élimination des déchets et décrivent les sacs en plastique comme une source majeure de pollution, raconte-t-elle.
La situation s’est produite alors que les zones protégées de l’Ouganda tombent à un rythme qui a poussé les autorités à tenter d’endiguer la tendance.
Des satisfactions et des craintes
Un opposant politique ougandais pointe du doigt des manquements graves dans les procédures d’octroi des titres fonciers et de réinstallation des populations affectées par l’expropriation des terres dans ce pays.
A la fin de l’année précédente, le chef de la plateforme de l’unité nationale Robert Kyangulanyi a déploré une dizaine de morts dans des affrontements entre les communautés et les opérateurs économiques où plus de 6000 personnes du district de Kikube ont été expulsées sur environs 1300 hectares afin de laisser la place à la plantation de canne à sucre au su et au vu des autorités.
Kyangulanyi indique qu’il est satisfait de la mesure, mais que son application lui tient à cœur au regard de l’injustice dont faisait face les communautés dans plusieurs régions du pays.
Ils craignent que « Express Penalty Scheme » va cibler les personnes à faibles revenus comme précédemment où les occupants expulsés ne recevaient ni un préavis pour quitter les lieux ni indemnisation.
Robert Kyangulanyi s’est joint à la société civile pour critiquer cette nouvelle loi.
Il a mentionné que les impacts environnementaux, les droits des propriétaires fonciers et tous les crimes environnementaux en Ouganda sont dus au manque de responsabilité et de transparence dans la gestion des différents projets.
Pour lui, cette nouvelle loi devrait donner la priorité à la lutte contre la corruption et à la promotion de la transparence dans la gestion des biens fonciers et forestiers.
James Okot-Okumu directeur de NEMA réfute les accusations. Il a indiqué que l’argument selon lequel seuls les pauvres seront ciblés est absolument infondé.
« Nous tenons à préciser que nos opérations vont cibler toutes les personnes qui enfreignent la loi sans discrimination. »
Des rapports accusent les corps de sécurité d’être impliqués dans les expulsions depuis plusieurs années.
La police tranquillise, mais reste ferme sur la gestion de l’environnement qui doit être selon le commissaire James Mwasigye, traitée avec l’urgence qu’elle mérite.
« Nos actions sont justifiées parce que le gouvernement a mis la zone de côté comme réserve de gibier et de forêt, nous devons prendre au sérieux la gestion de l’environnement. Nous devrions aller et faire ce que nous sommes censés faire » a-t-il déclaré.
Le manque de titre foncier alimente les conflits
Les défenseurs de l’environnement et des droits fonciers critiquent les irrégularités dans le système ougandais de titres fonciers.
Spiriano Baluma un des militants contre l’expulsion révèle que des hommes d’affaires obtiennent frauduleusement des titres fonciers sur des parcelles de terrain qui comprennent des territoires sur lesquels résident les communautés.
S’exprimant à la radio Witness, il a précisé que ce système alimente non seulement les conflits, mais aussi la déforestation et l’envahissement des endroits censés rester protégés.
Il explique que même les autres envahisseurs forestiers profitent de ce désordre pour occuper illégalement ces zones ou en spoliant les terres pour faire place aux installations des usines ou aux cultures industrielles.
Photo de bannière: Image de satellite de l’Ouganda
Source: Wikipedia