Depuis 1990, les corails de la Grande barrière coralienne d’Australie connaissent un ralentissement record de leur taux de croissance en 400 ans suite au réchauffement et à l’acidification des océans, soutiennent des chercheurs ayant publié dans la prestigieuse revue de recherche “Science”.
Les résultats des chercheurs indiquent de biens pâles perspectives pour l’énorme écosystème des récifs ainsi que pour des organismes calcaires marins à travers le monde.
En étudiant 328 colonies de coraux poreux de 69 récifs de la grande barrière de corail en Australie, Glenn De’ath, Janice M. Lough, and Katharina E. Fabricius ont mesuré une baisse de 13,3% en calcification depuis 1990, un déclin jamais atteint depuis au moins 400 ans. Les chercheurs mentionnent que même si l’on ne connaît pas encore les véritables causes de ce déclin, l’étude indique que l’accroissement du réchauffement des mers ainsi que la baisse de saturation des aragonites des mers pourraient réduire la capacité de la grande barrière de récif corallienne à permettre le dépôt des carbonates de calcium.
De’ath et compagnie ont sélectionné les coraux poreux pour leur longévité ainsi que leur capacité de prolifération annuelle relativement élevée qui peut être utilisée pour dater les coraux. En établissant un rapport entre deux mesures, la température de la surface des mers (TSM) et le taux de calcification (TC), les chercheurs ont constaté que la relation positive entre la TSM et le TC semble ne plus tenir, et cela est probablement du aux évènements de température extrême.
Grande barrière de corail en Australie |
« La récente vague de réchauffement a peut être contribué à la réduction de la calcification des coraux pendant la période 1990-2005 » affirment-ils. « Nos résultats portent à penser qu’après une période de léger accroissement dans l’extension et de baisse prolongée dans la densité, un point critique avait été atteint à la fin du 20ème siècle. La réponse non-linéaire et décalée pourrait induire des effets synergétiques de réchauffement environnementale de différentes formes. »
L’acidification des océans est davantage la conséquence de leur absorption du dioxide de carbone de l’atmosphère. Parce que la concentration dans l’atmosphère de dioxide de carbone ne fait que croître, les océans deviennent de plus en plus acide. L’acidification est cruciale parce qu’elle réduit la disponibilité d’ions de carbone dans les eaux de mers, rendant de ce fait plus difficile pour les organismes marins l’extraction de carbonate de calcium pour construire l’aragonite et les coquilles de calcite et les squelettes dont ils ont besoin pour survivre. L’un des organismes le plus affecté par cet état des choses est le petit polyp qui créé le récif corallien. Plus les taux de calcifications s’amenuisent, moins il y a croissance des barrières de corail, laissant ces derniers vulnérable aux aléas du climat via l’action des vagues et d’autres facteurs. D’autres organismes marins sont aussi affectés, notamment les micro-organismes qui constituent la base de la chaîne alimentaire océanique.
Les barrières coralliennes sont aussi affectées par l’augmentation de la température des mers qui peuvent provoquer des phénomènes de pâle décoloration. La décoloration pousse les coraux à expulser de l’algue zooxanthella symbiotique vivant dans leurs tissus, laquelle algue leur fournit un apport nutritif vital. Les coraux peuvent survivre à un phénomène de pâleur de courte durée, par contre un phénomène de décoloration prolongée (une semaine) peuvent susciter des dommâges irréversibles et entraîner la mort. Depuis 1979, au moins sept évènements de décoloration de masse se sont produit, dont chacun l’un après l’autre est intervenu dans un intervalle de temps toujours plus petit et avec des effets plus sévères. Certains chercheurs pensent que la grande barrière de corail pourrait perdre 95% de ces diverses espèces de coraux en 2050 si la température des océans venait à augmenter de 1,5°C tel que projeté par les climatologues.
La disparition des coraux dans la grande barrière de corail pourrait avoir des conséquences écologique et économique considérable. Le récif fournit un habitat pour plus de 1500 espèces de poissons ainsi que 400 espèces de coraux, alors qu’elle constitue en même temps un tampon pour le littoral contre les dégâts causés par les tempêtes et les érosions. Plus encore, chaque année plus de 1,8 millions de touristes visitent le récif, dépensant plus de 4 milliards de dollars australien dans toutes les activités développées autour de la grande barrière, de la plongée sous-marine à la location de bateau ainsi qu’au séjour dans des complexes hotêliers. Les revenus du tourisme écrasent largement ceux de l’industrie de la pêche et de la pêche de plaisance qui génère 360 millions de dollars australiens.
G. De’ath; J.M. Lough; K.E. Fabricius. Le déclin de la calcification des coraux et la grande barrière de corail. SCIENCE 2 JAN 2008.