- L’Union international pour la conservation de la nature (UICN) a modifié le statut des gorilles des montagnes de la catégorie En Danger Critique à la catégorie En Danger.
- La nouvelle étude cite le nombre croissant de cette sous-espèce, aujourd’hui plus de 1 000 individus, et les efforts de conservation menés.
- Les scientifiques déclarent que, même s’il s’agit d’une étape importante, la survie des gorilles des montagnes dépend de la poursuite de la conservation.
Des décennies de conservation « extrême » ont conduit les gorilles des montagnes au bord de l’extinction, amenant l’Union international pour la conservation de la nature (UICN) à modifier le statut de cet animal, de la catégorie la plus grave « En Danger Critique » à la catégorie « En Danger ».
« La bonne nouvelle est que cela montre réellement que lorsque nous investissons sur le long terme dans la conservation… nous pouvons faire évoluer le cours de ces animaux. » déclare dans une interview Tara Stoinski, PDG et directrice scientifique de l’association Dian Fossey Gorilla Fund.
La sous-espèce de gorille des montagnes (Gorilla beringei beringei) – qui a d’abord attiré l’attention des scientifiques occidentaux et des groupes de conservation par le biologiste George Schaller puis plus tard, dans les années 60, par la chercheuse Dian Fossey – a vu sa population chutée pour atteindre seulement une centaine de gorilles dans les années 80. La chasse, les troubles civils, la perte d’habitat des gorilles dans les terres arables dans les montagnes boisés de l’Ouganda, du Rwanda et de la République démocratique du Congo, ont amené Mme Fossey a avertir que ces animaux, l’un des pairs les plus proches de l’Homme, pourraient apparaître uniquement dans les pages des livres d’ici les années 2000 si aucun effort n’est entrepris pour les sauver.
Heureusement pour les gorilles, les gouvernements de nombreux pays, en partenariat avec l’association Dian Fossey Gorilla Fund et plusieurs autres groupes de conservation sont passés à l’action. Malgré le meurtre encore mystérieux de Mme Fossey en 1985, ils ont travaillé ensemble avec les communautés locales pour stopper la perte d’habitat et gérer le conflit entre les fermiers et les gorilles, soigner les blessures et les maladies affectant les populations de gorilles, et protéger ces animaux du braconnage. « Par rapport à la moyenne des autres animaux, les gorilles bénéficient actuellement de 20 fois plus de protection venant du personnel de terrain par zone donnée. » déclare Stoinski, l’une des auteurs de la nouvelle étude de l’IUCN publiée ce jour.
Aujourd’hui, pour la première fois depuis des décennies, on recense plus de 1 000 gorilles des montagnes, dont 600 d’entre eux sont des adultes, et c’est actuellement le seul grand singe non humain dont la population croit – les facteurs clés du statut de cet animal évoluent.
« Le fait que la médecine vétérinaire ait joué un rôle aussi important dans la guérison des gorilles des montagnes a été un privilège et nous a touché » indique dans un e-mail Kirsten Gilardi, vétérinaire et directrice de l’organisation à but non lucratif Gorilla Doctors aux États-Unis.
« Cela étant, la ligne entre En Danger Critique et En danger est très ténue. » ajoute-elle.
« Les vétérinaires et l’équipe de Gorilla Doctors sont souvent sur le terrain accidenté qui abritent les gorilles des montagnes, ils les surveillent pour soigner les maladies et les blessures causées par les pièges illégaux destinés aux gibiers sauvages, ce qui reste une menace pour la survie des gorilles » déclare Mme Gilardi, également l’une des auteurs de cette dernière étude.
« Les défenseurs de la conservation rencontrent un grand succès dans des conditions qui sont souvent très difficiles. » indique dans un e-mail Chris Tyler-Smith, généticien à l’institut Wellcome Sanger Institute, au Royaume-Uni. « Les gorilles, et les générations futures des personnes du monde entier, ont une énorme dette envers eux. » ajoute-il.
Mais Chris Tyler-Smith fait écho au point de vue de Mme Gilardi, selon lequel ce travail n’est pas terminé.
« Il s’agit d’un progrès, pas d’une victoire. » déclare-t-il en ajoutant « Le niveau actuel d’efforts de conservation doit absolument se poursuivre. ».
L’une des inquiétudes à propos de ce petit nombre d’animaux est qu’ils n’auraient pas de stockage d’informations génétiques uniques assez solide pour soutenir la sous-espèce.
M. Tyler-Smith et ses confrères ont examiné cette question particulière en prouvant que l’ADN des gorilles des montagnes et leur sous-espèce sœur, le gorille de Grauer ou le gorille des plaines orientales (Gorilla beringei graueri), remonte à des centaines de milliers d’années. Dans une étude publiée dans le journal Science en 2015, il est mentionné que la longue chute des populations de gorilles des montagnes et de Grauer au cours des 100 000 dernières années a réduit la diversité de leurs génomes.
Cette uniformité est plus élevée que celle découverte chez les gorilles des plaines de l’Ouest (Gorilla gorilla) et « même chez les humains les plus consanguins », et cela serait préoccupant. Quoiqu’il en soit, le fait que les gorilles aient survécus avec de faibles niveaux de diversité génétiques suggèrent qu’ils ont la capacité de reconstruire leur population à partir d’une fondation génétique petite mais solide.
« Notre travail montre que la population est génétiquement saine et qu’il n’y a aucune raison génétique pour que les gorilles des montagnes ne se portent pas bien dans les milliers d’années à venir » déclare M. Tyler-Smith.
Stoinski indique que la coalition de groupes de conservation et des gouvernements est restée engagée pour la survie des gorilles des montagnes, même si la menace (que la coalition a réussi à maintenir à distance) persiste.
Au milieu d’un flot de nouvelles démoralisantes liées à l’environnement, dont la récente alerte sur ce qui pourrait arriver si nous ne nous attaquons pas au réchauffement climatique, venant du Panel intergouvernemental concernant les changements climatiques et d’un rapport de WWF à propos des baisses considérables chez les populations d’animaux vertébrés au cours des 40 dernières années, Stoinski indique qu’il pourrait être tentant de penser que la faune et les espaces occupés par ces animaux sont condamnés.
« Mais la tendance à la guérison en dollars des gorilles des montagnes fournit une source d’inspiration. » ajoute Stoinski. Plus encore, l’association Dian Fossey Gorilla Fund déploie aujourd’hui un modèle prouvé pour protéger les gorilles de Grauer dans leur pays natal, la RDC (République démocratique du Congo), où la population de gorilles a chuté de près de 80 % seulement au cours des deux dernières décennies.
De plus, cette étape importante pour les gorilles des montagnes prouve qu’il existe des possibilités lorsque les populations s’unissent pour un objectif commun de conservation.
« Cela montre que nous pouvons faire la différence » déclare Stoinski en ajoutant « Tout espoir n’est pas perdu. ».
Image en bannière d’un jeune gorille des montagnes, fournie par l’association Dian Fossey Gorilla Fund.
John Cannon est un rédacteur de Mongabay situé au Moyen-Orient. Suivez-le sur Twitter : @johnccannon
Citations
Hickey, J.R., Basabose, A., Gilardi, K.V., Greer, D., Nampindo, S., Robbins, M.M. & Stoinski, T.S. 2018. Gorilla beringei ssp. beringei. The IUCN Red List of Threatened Species 2018: e.T39999A17989719. Downloaded on 14 November 2018.
Xue, Y., Prado-Martinez, J., Sudmant, P. H., Narasimhan, V., Ayub, Q., Szpak, M., … & De Manuel, M. (2015). Mountain gorilla genomes reveal the impact of long-term population decline and inbreeding. Science, 348(6231), 242-245.
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