Les autorités de l’Est de Madagascar ont arrêté un journaliste étranger qui enquêtait sur le trafic illégal de bois de Rose.
L’arrestation, qui a eu lieu il y a douze jours, se produit alors que le gouvernement central prétend sévir contre le commerce illicite de bois de Rose. Le journaliste, dont le nom et la nationalité ont été cachés pour protéger son identité, s’est vu confisqué son matériel vidéo par la police à Maroantsetra, une ville porte d’entrée du Parc National de Masoala, où est constaté le plus de tronçonnage de bois de Rose.
La police, accompagnée des trafiquants de bois de Rose, ont forcé le journaliste à effacer de son appareil ses photos des stocks de bois découpés. Le journaliste et son guide furent ensuite relâchés.
Le journaliste a rapporté ainsi cette épreuve:
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« [Nous] nous sommes faits arrêter lorsque nous sommes arrivés à Maroantsetra le Dimanche 5 Septembre à 21h. On nous a conduit au commissariat de police. Nous y avons passé quelques heures, s’y trouvaient le Commissaire, le Chef du District, le Chef de Cantonnement des Eaux et Forêts ainsi qu’un policier.
Ces officiels ont clairement exprimé leur volonté de détruire les séquences des stocks de bois de Rose que j’avais réalisé plus tôt dans la journée dans le village de Anandrivola, et celles de la veille dans la forêt de Makira, montrant des bucherons tronçonnant ces arbres.
Cette nuit ils confisquèrent mon passeport, les deux cartes mémoires de mes caméras ainsi que l’autorisation gouvernementale nous permettant à moi et mes collègues de filmer dans les parcs de Marojejy et Masoala. J’ai ensuite été libéré et autorisé à rester dans un hôtel durant la nuit.
Le lendemain matin je suis retourné au commissariat de police à 9 heures. Cette fois en plus des quatre mêmes personnes que la veille, étaient présents trois commerçants en bois de Rose réputés. Quand j’ai expliqué que j’avais contacté mon Ambassade et mon avocat, ils (et particulièrement le représentant Environnement et Forêts) se sont énervés et sont devenus agressifs, comme ils l’étaient la veille. Ils ont insisté sur le fait que j’avais besoin d’une autorisation spéciale pour filmer n’importe quel bois précieux à Madagascar. Ils ont ensuite essayé de visualiser le contenu de ma carte mémoire sur leur ordinateur. Mais échouant, ils me demandèrent de l’effacer directement depuis ma camera. En tant qu’étranger à la merci des autorités locales, sans ressources ni assistance, sans savoir de quoi ils étaient réellement capables, je me suis plié à leurs volontés. Mon guide aussi se montrait inquiet pour sa sécurité. J’ai dans ce contexte effacé les images des bois de Rose de ma camera ; et signé un document, dont la copie m’a été refusé. Il stipulait que je n’avais pas demandé la permission de filmer, et que j’avais illégalement filmé le bois précieux sans aucune autorisation spéciale. »
Informé de la situation, un observateur du commerce du bois de Rose a expliqué que cet incident amenait de sérieuses questions sur le gouvernement d’intérim, sa volonté et capacité de mettre en place son moratoire sur le commerce de ce bois.
« On s’attendrait à ce que ce policier, ce Chef de District et le représentant du Ministère de l’Environnement et des Forêts conservent telles quelles les séquences afin de poursuivre les bucherons filmés en action. A la place, ils ont effacé les images et supprimé les preuves de ces méfaits.” explique cet observateur. “N’est-il pas illégal de détruire une preuve de délits judiciairement recevable? »
L’observateur questionna ensuite les intérêts réels que défendait le Chef de District de Maroantsetra.
Buches de Bois de Rose
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L’arrestation, qui semble violer les droits de la presse prévus dans la Constitution de Madagascar, survient peu après les révélations affirmant que les entrepôts appartenant au principal commerçant de bois de Rose, proche de l’actuel premier ministre d’intérim Camille Vital, ont échappé au contrôle du service chargé de surveiller ce commerce. Le service a été mis en place suite à de vives critiques internationales sur l’échec du gouvernement d’intérim de Madagascar à contrôler le pillage grandissant de bois précieux dans ses parcs nationaux—Ce gouvernement s’était emparé du pouvoir après un coup d’état militaire l’an dernier.
Le stock de bûches de bois de Rose du commerçant se trouve actuellement dans une raffinerie d’huile à Analankinina. Ce bois de construction sera ensuite exporté vers la Chine par Taomasina (Tamatave), le port principal de Madagascar. Le bois est ensuite le plus souvent travaillé en meubles, très populaires en Chine.
Le commerce malgache de bois de Rose—qui est géré par un petit groupe de riches et influents trafiquants qui usant de l’instabilité gouvernementale ou des catastrophes naturelles pour reconstruire leur stock de bois précieux—leur nombre a augmenté drastiquement suite au coup d’Etat de Mars 2009 qui a destitué Marc Ravalomanana le président démocratiquement élu en poste, mais qui se montrait de plus en plus autocratique. Andry Rajoelina, maire de la Capitale Antananarivo et ancien disc jockey, remplaça alors Ravolamanana.
Le coup d’Etat fut unanimement condamné par la communauté internationale. De nombreux pays, y compris les Etats-Unis et l’Afrique du Sud, stoppèrent leurs aident et privilèges accordé à Madagascar, faisant plonger son économie. Cependant, bien que celle-ci reprenne, le tourisme reste en berne à cause de l’instabilité politique et des craintes pour la sécurité des étrangers. Le pillage intense de la forêt tropicale des parcs, conséquence du coup d’Etat, a encore plus aggravé le Réputation de l’île en tant que havre de la biodiversité, qui habite plus de 100 différentes espèces de ces rares et magnifiques reptiles que sont les lémurs, et de plantes rares.