- Les villageois riverains des plantations de SOGB au sud-ouest de Côte d’Ivoire s’opposent à la certification RSPO de SOGB.
- Les chefs de villages disent que les populations riveraines ont perdu les terres. Elles souffrent des inondations et de la pollution liée aux plantations industrielles d’hévéas et de palmiers à huile de SOGB.
- Le ministère de l’agriculture et du développement rural fait savoir que ce complexe agro-industriel fût installé conformément aux textes de loi en vigueur dans ce pays.
- Un des principes de la certification RSPO est que le droit d’exploiter la terre ne doit pas être légitimement contesté par les populations locales et cette organisation dit qu’elle n’a reçu aucune plainte concernant les opérations de la SOGB.
En août 2021, les chefs de villages et du bureau exécutif de l’Association des Villages Déplacés (AVD) au sud-ouest du Côte d’Ivoire ont dénoncé les abus des principes de la Roudntable on Sustainable Palm Oil (RSPO).
Egalement, ils ont dénoncé le non-respect des engagements de la Société des Caoutchoucs de Grand-Béréby (SOGB), propriété du géant transnational de l’agroalimentaire Socfin.
Ils demandent l’annulation de la certification des plantations sur une concession qu’ils disent être en conflit. Ils reprochent à la SOGB le non-respect des recommandations émises en octobre 2019 par le sous-préfet de Grand-Béreby, relatives à l’opposition au rafraichissement des limites avec ces villages.
La SOGB bénéficie du label RSPO depuis le 26 janvier 2021 alors que les chefs de villages et l’AVD avaient exigé la reprise du processus en vue d’obtenir une certification conforme aux normes RSPO pour une production d’huile de palme durable.
Les communautés riveraines reconnaissent les avancées opérées en matière de transparence lors des sessions d’audits de SCS Global, toutefois elles déplorent les problèmes socio-environnementaux qui persistent sur le terrain.
Quelle défense contre une législation coloniale ?
Ce complexe occupe actuellement des terres d’une superficie de 34 712 ha, lesquelles à l’origine étaient occupées par des autochtones Kroumen au sud-ouest du pays dans la sous-préfecture de Grand-Béréby.
Pourtant le procès-verbal d’une réunion d’information du 12 juillet 1974 des chefs de villages concernés par ce projet, révèle que l’Etat de la Côte d’Ivoire a concédé un domaine dont la superficie est seulement 30 830 ha à la SOCATI (l’actuelle SOGB).
Djou Gbouyou Saint Claire, secrétaire général de l’AVD, estime que la SOGB devrait d’abord restituer cette partie des terres évaluée d’une superficie de 4 000 ha occupées illicitement, avant d’entamer la phase du processus de certification RSPO.
« Nos droits coutumiers ont été violés, nous sommes devenus des paysans sans terre », dit-il.
Et il a ajouté : « l’Etat ne nous a pas dédommagés et actuellement, la croissance démographique aggrave davantage la situation ».
Djou déplore également que la SOGB a bafoué leurs sites sacrés. Il regrette en disant : « Aujourd’hui, pour masquer cette action aberrante, elle parle de « sites sacrés actifs » pour dire qu’elle ne peut pas détruire ses plantations au profit de simples manifestations culturelles ».
Pour la SOGB, aucune extension supplémentaire n’a été faite. Sa direction générale rappelle que la société détient un bail emphytéotique signé en 1995 et que la superficie que l’Etat de la Côte d’Ivoire lui a concédé est bel et bien 34712 ha.
Ouattara Nanakan, directeur du Foncier rural au Ministère de l’agriculture et du développement rural, explique que le bornage contradictoire relève du fait que les outils de mesures utilisés au moment de la concession provisoire en 1974 étaient de faible précision par rapport à ceux utilisés en 1983 au moment de l’immatriculation. « La preuve en est que ces populations n’ont été déplacées qu’une fois » précise-t-il.
Dans une interview avec Mongabay Ouattara dit que les procédures de l’immatriculation et les titres fonciers ont été créés sans qu’il y ait une quelconque opposition et que l’installation de la SOGB n’a pas violé les textes de 1932 des réglementations coloniales qui étaient et qui sont toujours en vigueur dans ce pays selon lui.
Ouattara affirme en effet que les villageois ont été informés et que l’Etat a suivi les mêmes procédures que dans l’installation des autres unités agroindustrielle partout en Côte d’Ivoire.
« Néanmoins, si ces communautés de villages déplacés ont des preuves que l’Etat ne les a pas indemnisées conformément aux textes de loi en vigueur au moment de l’installation de cette société, elles peuvent toujours saisir la commission de contrôle des opérations immobilières de l’Etat au ministère du budget », ajoute-t-il.
Toutefois, Djou fait savoir que les communautés riveraines ont toujours exposé inutilement leurs préoccupations aux autorités habilitées.
La certification RSPO malgré tout
Un des principes et critères de la norme RSPO est que le droit d’exploiter la terre doit être démontré. Ce droit ne doit pas être légitimement contesté par les populations locales pouvant prouver leurs droits légaux, coutumiers ou d’exploitation.
Djou raconte à Mongabay : « En plus du manque criant de terres, nous sommes toujours menacés par les inondations causées par les drainages, menacées par la pollution causée par des déchets provenant des usines de production de l’huile de palme et de caoutchouc ».
Il explique que ces eaux polluées ont un impact négatif sur les poissons, sur les cultures vivrières et que les plantations de cacao de la population riveraine sont en train de mourir à petit feu.
Il explique que « La vie est devenue compliquée davantage avec l’occupation des bas-fonds pour ses cultures de palmier à huile, il n’y a plus assez d’espace pour cultiver du riz, notre aliment de base »
Zeeneeshri Ramadass, responsable de la communication Asie-Pacifique RSPO, indique à Mongabay dans un courriel, que la RSPO n’a jusqu’à ce jour reçu ni plainte ni rapport des griefs concernant les opérations de la SOGB .
Dans le cas contraire, le secrétariat de la RSPO peut annuler, révoquer ou retirer les certificats émis par un auditeur indépendant (organisme de certification) si une plainte officielle est enregistrée dans le système de plaintes de la RSPO