- La forêt recouvre au moins 112 millions d’hectares dans la République Démocratique du Congo.
- Des études de 2013 indiquent que l’agriculture vivrière et le besoin de bois de chauffage menacent les forêts de la RDC, et des investissements dans les forêts du pays par des puissances industrielles pourraient contribuer au problème.
- Les dirigeants d’RDC ont signé des accords internationaux et commencé à recevoir des millions de dollars pour le financement de projets dont le but est de maintenir les forets d’RDC, protégeant ainsi le climat global et réduisant la pauvreté.
Les forêts considérables de la République Démocratique du Congo semblent être une lueur d’espoir au milieu d’un pays au reste plutôt perturbé. Avec ses forêts, qui recouvrent une aire plus grande que celle de la Colombie, la RDC a réussi à éviter les pertes soudaines subites par des pays riches en forêts en Amérique du Sud, Asie du Sud-Est, et ailleurs en Afrique.
La RDC est d’ailleurs devenue un pays partenaire important dans le programme REDD+ de l’ONU. Abrégé de « réduire les émissions de la déforestation et de la dégradation des forets dans des pays en développement », REDD+ promet à la RDC des centaines de millions de dollars pour du travail environnemental et de développement, venant des gouvernements de Norvège, d’Allemagne, de France, du Royaume-Uni, et de l’UE. En échange, les dirigeants du pays ont promis de préserver les réserves de carbone enfouies dans la végétation des forets, et que l’on estime font près de 22 milliards de tonnes métriques (48.5 billions de livres). Un apaisement des conflits de la RDC fatiguée par les guerres semble également de plus en plus proche, indiquant une stabilité, sinon une prospérité, que le pays n’a pas connu depuis des décennies.
Mais des inquiétudes ont émergé quant aux bases précaires du succès de la RDC – s’il survivra à une confrontation contentieuse dans laquelle le Président Joseph Kabila est resté au pouvoir après la fin de son dernier mandat, et les élections présidentielles ont été reportées en 2018, par exemple – ainsi que des doutes sur l’efficacité pratique de la conservation des forêts du pays.
En tant qu’hôte d’une telle forêt – estimée faire entre 112 millions et 154 millions d’hectares (entre 1 120 000 et 1540000 km2) selon la définition – la RDC a un rôle clé à jouer dans la mission pour garder la température moyenne mondiale en dessous d’une montée de 2 degrés Celsius, but définit lors des accords climatiques de Paris en 2015.
Cependant, réaliser des gains à la fois pour la conservation et pour le développement est encore une idée relativement nouvelle en RDC. Pour beaucoup des dirigeants du pays, « C’est soit l’exploitation, soit la conservation » dit Lionel Diss, anciennement de la Rainforest Foundation Norway (RFN), lors d’une interview. L’idée est qu’encourager des investissements internationaux dans les concessions forestières, ainsi que dans d’autres industries extractives tel que les exploitation minières, mène au développement économique.
S’attaquer à la pauvreté et à la déforestation
Diss argumente que cela n’a aucun sens de dépendre exclusivement des opérations industrielles pour relever le développement économique via la création d’emplois et d’exports profitables, aux dépens des forêts et sans défendre les droits des communautés locales. « Il n’y a aucune preuve que la déforestation en Afrique centrale ait entrainé le développement durable ».
Malgré cela, on a souvent attribué aux populations habitant les forêts la responsabilité de la déforestation récente de la RDC, où le conflit et l’instabilité politique ont dissuadé de nombreux groupes extérieurs d’investir dans l’exploitation du bois et des mines et dans l’agriculture.
D’après une série d’études datant de 2013 publiées par le programme REDD+ de l’ONU, , l’agriculture vivrière – qui emplie souvent des techniques d’agriculture sur brûlis – et la récolte de bois de chauffage contribuent à environ 40 pourcent de la déforestation dans le pays. Plus de la moitié de la dégradation des forêts – une détérioration, mais pas nécessairement une disparition complète – provient également de la recherche de bois de chauffage. Les gens récoltent le bois afin de directement l’utiliser dans des feux de cuisine, ou ils le brûle avec peu d’accès a l’air et sur une longue durée afin de créer du charbon dense en énergie.
Les rapports de UN REDD+ étaient censés représenter une étape critique pour la meilleure compréhension du terrain et des causes de la déforestation et de la dégradation des forets de RDC, afin d’aider les investissements REDD+ dans le pays à avoir du succès. Mais les études reconnaissent que la RDC risque de connaitre un changement dans les raisons de la déforestation.
Les auteurs des rapports, qui incluent des chercheurs de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), d’universités, d’ONGs de RDC, et du Programme Environnemental de l’ONU, ont également trouvé que 40 pourcent de la déforestation provient de l’agriculture commerciale, un chiffre qui pourrai augmenter dans un climat plus favorable à l’entreprise.
D’autres chercheurs ont identifié une tendance vers l’industrialisation en RDC et dans d’autres pays boisés, ainsi que les conséquences pour les forêts.
« Tandis que la stabilité politique et économique est survenue dans la région, les taux de déforestation ont augmenté », dit Gillian Galford, une scientifique en earth systems à la University of Vermont.
En 2015, Galford et ses collègues soupçonnaient que les taux bas de déforestation en RDC ne tiendraient pas, tandis que la situation devenait de plus en plus prometteuse pour les investissements en ressources naturelles. Utilisant ce que les scientifiques ont appris sur les modèles de déforestation dans d’autres parts du monde, son équipe a construit un modèle informatique traçant trois scenarios différents : que la déforestation continue son chemin actuel ; qu’une solution de conservation à grande échelle, tel que REDD+, soit instaurée ; et qu’on laisse survenir le développement agricole de façon plus ou moins libre.
Dans ce modèle, les forêts allaient le mieux dans le système de conservation, stockant une quantité considérable de carbone, tandis que le développement agricole menait à une hémorragie de 212 millions de tonnes métriques (467 millions de livres) de carbone par an sur les vingt-cinq ans à venir.
Ces conclusions représentent un paradoxe sérieux pour quiconque souhaite élever le niveau de vie des deux tiers des citoyens de RDC vivant sous le seuil de pauvreté, selon les chiffres de la Banque Mondiale. « Si vous prenez l’Afrique subsaharienne de manière large, le développement agricole est certainement l’un des plus grands défis », dit Glaford. Alors que la Révolution Verte d milieu de XXème siècle a élevé le niveau de vie dans beaucoup de régions à travers le monde, elle rappelle que cette empotée n’a, pour la plupart, pas touché l’Afrique subsaharienne.
But the spike in unintended knock-on effects that often accompany large-scale development hasn’t typically been accounted for in places like DRC – in particular, what happens with the construction of new roads.
Mais le pic d’effets inattendus accompagnant généralement le développement à grande échelle n’a généralement pas été expliqué dans des pays tel que la RDC – surtout en ce qui concerne la construction de nouvelles routes.
« En RDC, comme dans l’Amazonie, on voit que la déforestation a beaucoup à voir avec les routes », dit Galford, et le manque de routes en RDC est une des raisons qui expliquent la ténacité des forêts dans ce pays
Une étude datant de 2014 de l’Amazonie brésilienne révèle que près de 95 pourcent de la déforestation a eu lieu à 5,5 kilomètres d’une route ou à 1 kilomètre de rivières – qui, comme en Amazonie, jouent de facto le rôle d’autoroutes dans la forêt tropicale du Congo.
« Les routes donnent accès à différentes zones, ce qui peut mener à plus de déforestation et de dégradation », ajoute Galford.
Pas de solution miracle
Même au vu de la situation actuelle, accuser les petits fermiers de détruire la forêt ne résoudrait pas le problème, dit Diss du RFN. Toutes les formes d’agriculture traditionnelles n’ont pas le même impact sur les paysages.
« On ne peut pas généraliser sur les activités de brûlis », dit-il. D’ailleurs, nous rappelle-t-il, quand les terrains agricoles sont alternés et ont le temps de régénérer, « C’est une activité forestière durable ».
« C’est le cas dans beaucoup de régions de la forêt tropicale, où des communautés locales ont mené une agriculture de brulis de façon traditionnelle et où ils ont des règles et coutumes sur l’usage terrien et la gestion forestière qui contribuent à la protection de la forêt ».
Un problème avec l’agriculture de brulis survient quand les développements à grande échelle tel que les concessions forestières ouvrent de nouvelles zones de forêts auparavant difficiles d’accès, souvent suivi de routes et de colonies. Diss a indiqué la région autour de la ville de Kisangani, sur le fleuve du Congo, où ce type d’agriculture « en lien direct avec les activités forestières » a été une source importante de déforestation.
Le brûlis, le charbon et la déforestation soi-disant à petite échelle [ou] artisanale sont de vrais problèmes autour de grandes régions urbaines », dit-il. Kisangani, situé dans le centre de la RDC, est la troisième plus grande aire urbaine du pays. « Là-bas, ces activités peuvent être empirées [ou] encouragées par l’industrie forestière, et peuvent souvent être conduites par des acteurs externes, plutôt que par des communautés locales », ajoute Diss.
RFN et ses partenaires en RDC argumentent que la recognition de prétentions traditionnelles devrait être une partie intégrale de la solution. Et la recherche actuelle soutient cet argument.
De nombreux responsables politiques et organisations concernés à la fois par le développement humain et par la conservation des forets font du REDD+ le meilleur espoir pour l’intégration de ce qui peut parfois sembler être des buts contradictoires. Mais comment accomplir cette stratégie est une question critique, dit Pieter Moonen, un ingénieur biologique de l’Université de Leuven en Belgique.
« Vous devez adapter votre stratégie selon les conditions spécifiques et les raisons spécifiques qui entrainent la déforestation », dit Moonen.
Dans une étude de 2016, Moonen et ses collègues Belges et Congolais ont trouvé que le niveau auquel les individus pratiquent la déforestation varie considérablement selon des facteurs tel que la distance les séparant de villes, la taille de la population locale, et la culture locale.
L’équipe a conclu que, sans prendre en compte les raisons locales de la déforestation – des raisons qui peuvent varier selon la communauté – REDD+ aura moins de chance de rencontrer le succès.
Une meilleure compréhension des contextes locaux pourrait expliquer pourquoi certains efforts de conservation n’ont pas l’impact voulu. Par exemple, une stratégie pourrait défendre la transition d’une agriculture de brûlis pour survivre à des vergers générant du profit. Le problème, selon Moonen, est que ces arbres peuvent prendre plusieurs années avant de donner des fruits.
« [Les fermiers utilisant des méthodes de brûlis] ont besoin d’alternatives pour le jour d’après, pas pour les deux ou trois prochaines années, car ils n’ont pas – ou très peu – de réserves », dit-il. « Les gens sont encore en mode de survie, donc ils veulent des résultats rapides ».
Les droits à la terre
Pour faire participer les communautés locales à la conservation, il est essential de parler de leur droit à la terre, disait Diss. Et pourtant, les défenseurs d’une zone de test du projet, en RDC et dans les organisations internationales, ont souvent évité la question des droits de la communauté à la terre.
Le projet REDD, qui vaut plus de 70 millions de dollars, fut lancé en 2016 dans la province nouvellement formée de Maï-Ndombe, qui s’étend au nord-est de la « mégalopole » de Kinshasa. Un programme de la Banque Mondiale, nommé le Forest Carbon Partnership Facility, ou FCPF, a assuré le financement initial.
Dans un bilan du projet publié en Janvier 2016, le FCPF dit que les progrès effectués à Maï-Ndombe sont vus par le gouvernement d’RDC comme étant « la première étape dans l’implémentation de la stratégie nationale REDD+ sur un niveau juridique, un modèle pour le développement écologique dans le bassin du Congo, [et] un test essentiel de l’action pour le climat sur le continent Africain ».
Les architectes du projet souhaitent encourager la conservation et décourager la déforestation à travers des activités pour améliorer les technologies agricoles; introduire des cultures de rente au long terme tel que le café, le caoutchouc, et l’huile de palme; et lancer des projets de régénération forestière pour la production du charbon. Environ 80% de Maï-Ndombe est recouvert de forêt, ce qui égale environ 9,8 millions d’hectares, et la province produit une quantité importante de bois et de charbon pour les cuisines de nombreux habitants de Kinshasa, une ville d’environ 10 million de personnes.
Malgré des promesses initiales que les dirigeants du projet y feraient prendre part les leaders de la communauté, Diss affirme qu’ils n’y sont pas tenus.
« Quand on prend en compte à quelle point le processus de consultation dans la région était hâtif et superficiel, le peu qui a été fait pour identifier et sécuriser les droits fonciers des communautés locales, et la timidité du soutien à la gestion de forêts tropicales s’appuyant sur la communauté », dit-il, « ce n’est pas un bon signe que Maï-Ndombe serve de modèle pour le reste du pays ».
D’autres organisations ont souligné ces inquiétudes et conseillé d’approcher la mise en œuvre en RDC de la stratégie REDD+ de façon plus progressive.
Un avenir de taille pour REDD+
Cependant, d’après Diss, le gouvernement a fait des progrès en ce qui concerne reconnaitre les droits des communautés et modifier les projets pour répondre à leurs besoins.
Il dit que la lettre d’objectifs détaillant les $200 millions de REDD+ pour le financement des programmes en RDC, via la Central African Forest Initiative inclut la première référence « explicite » à la « protection des droits des populations indigènes » en RDC, et non seulement leurs besoins. Cette inclusion, dit-il, est le résultat d’un plaidoyer soutenu de la Rainforest Foundation Norway et d’autres ONGs internationales et Congolaises.
Mais ce n’est pas qu’une question d’éthique. Au niveau de la conservation, dit Diss, il est logique de maintenir des communautés engagées et de formaliser leurs droits à la terre.
« Les communautés locales…jouent un rôle dans la gestion des forets depuis très, très longtemps », dit-il. « C’est un potentiel qui devrait être utilisé dans un plan REDD+ national. ».
L’un des objectifs est désormais de maintenir le statut de la RDC en tant qu’un pays aux forêts denses et avec un taux de déforestation bas, tout en prouvant au continent et au monde entier qu’une stratégie aussi globale que REDD+ peut fonctionner. REDD+ a le potentiel de ralentir les émissions provenant de la déforestation et d’approvisionner les pays pauvres en fonds pour le développement, mais, comme le prouve la recherche en RDC et ailleurs, ce ne sera un succès que si la stratégie est correctement implémentée.
La solution est loin d’être parfaite et unique, disent les chercheurs, et dépendra de l’engagement sincère de communautés locales.
Pour la RDC, tandis que l’espoir d’une stabilité économique et politique s’éteint à l’horizon, la question est plus simple. Les forêts du pays ont survécu à des décennies de dysfonction, de conflit, et d’échecs gouvernementaux.
A présent, elles sont sur le point d’être des dirigeantes pour une solution climatique globale. Elles ont attiré l’attention de pays donateurs et d’entreprises internationales qui cherchent de nouveaux endroits ou se développer tout en amenant la promesse d’une prospérité économique. Survivront-elles à ce « succès » ?
CITATIONS:
- Galford, G. L., Soares-Filho, B. S., Sonter, L. J., & Laporte, N. (2015). Will Passive Protection Save Congo Forests? PloS one, 10(6), e0128473.
- Moonen, P. C., Verbist, B., Schaepherders, J., Meyi, M. B., Van Rompaey, A., & Muys, B. (2016). Actor-based identification of deforestation drivers paves the road to effective REDD+ in DR Congo. Land Use Policy, 58, 123-132.
- UN Environmental Program. (2013). Qualitative study of the causes and agents of deforestation and forest degradation in a post-conflict DRC.
- UN-REDD Program. (2013). Qualitative study of the drivers of deforestation and forest degradation in the DRC.
- UN-REDD Program. (2013). Quantitative study of the variables explaining deforestation and forest degradation in the DRC: data from the field.
- UN-REDD Program. (2013). Quantitative study of the variables explaining deforestation and forest degradation in the DRC: data from remote sensing, and historical and statistical analysis.
- UN-REDD Program. (2013). Summary report presenting and comparing results from the various studies undertaken on the causes of deforestation and forest degradation in the DRC.