Bunda Bokitsi. Photo de la Société zoologique de Milwaukee.
De nombreux héros s’efforcent de sauver la vie sauvage de la destruction mondiale. Certains sont honorés pour leur travail mais d’autres demeurent dans l’ombre, faisant chaque jour du bon travail voire même un dangereux travail, et ce, sans grande reconnaissance. Ce ne sont pas des scientifiques ou de célèbres défenseurs de l’environnement mais des agents de protection de la faune, des membres d’ONG et de petits responsables. Bunda Bokitsi qui est le chef du poste de patrouille d’Etate dans le Parc national de Salonga en République démocratique du Congo est l’un de ces héros de la protection. Dans un pays connu pour sa longue guerre civile, son extrême pauvreté et sa corruption – tout autant que pour son étonnant héritage naturel – Bunda Bokitsi travaille chaque jour pour protéger le Parc national des braconniers, des chasseurs de viande de brousse et des trappeurs. Durant ses années de service en tant qu’agent de protection de la faune et à présent en tant que chef de patrouille, Bokitsi a non seulement mis sa vie en danger mais a aussi été emprisonné injustement voire même torturé
“Si l’on me donne pour ordre aujourd’hui, par exemple, de pister des braconniers dans la forêt, pour moi, cela revient à dire que soit le braconnier soit moi devra mourir,” a déclaré Bokitsi à mongabay.com. “Les braconniers détruisent notre environnement. En 2002, lorsque j’étais le chef du poste de patrouille de Boangui, j’ai découvert dans la forêt deux braconniers armés et deux défenses d’éléphants alors que j’étais en patrouille […] L’un des braconniers s’est enfui, l’autre a commencé à nous tirer dessus. J’ai fait feu à mon tour et j’ai finalement pu le capture; il s’appelait Batuka. Nous avons récupéré l’ivoire. Dans de telles situations, cela se transforme en du corps à corps. N’importe quoi peut survenir.”
Armes confisquées aux braconniers. Photo de la Société zoologique de Milwaukee. |
Bokitsi est cette année l’un des lauréats du prix Alexander Abraham, lequel a été institué en partie pour reconnaître les héros de la conservation qui sont en première ligne en Asie et en Afrique. Beaucoup de ces prix sont décernés à titre posthume à ceux qui ont perdu leur vie dans leur lutte pour sauver les lieux sauvages de la planète. Cette année, sept hommes qui ont perdu la vie en accomplissant leur devoir ont été honorés, neuf autres dont Bokitsi ont aussi reçu des prix.
Bokitsi qui travaille au Parc national de Salonga depuis 1990 et a vécu toute sa vie dans la région, a assisté à beaucoup de changements
“Il y avait énormément de braconnage dans les années 90 — les gardes du parc pouvaient être attaqués lors de leurs patrouilles par les braconniers en plein jour. Les braconniers s’emparaient vraiment de tout, y compris des épouses des gardes et des pêcheurs. C’est justement ce qui s’est passé près d’Etate, où il y a une petite zone de pêche du nom de Boma Libala [mot en Lingala pour “briseur de mariage”]. […] ll y avait partout du braconnage. A l’heure actuelle, les villageois ne se voilent plus la face. Ils commencent à comprendre l’importance du parc en tant que havre de paix où les populations animales peuvent se sentir bien et se reproduire.”
Cependant, ce continuel braconnage a laissé des traces.
“Il y avait un lieu où se baignaient les éléphants du nom de Papa Baudouin— tous les éléphants y venaient. A présent, ce vieil endroit est envahi par la végétation et aucun éléphant ne s’y rend plus,” dit Bokitsi.
Le Parc national de Salonga, la plus grande réserve de forêt tropicale du continent abrite une faune incroyablement riche et diversifiée parmi laquelle on compte les bonobos (Pan paniscus), répertoriés comme étant en danger d’extinction sur la liste rouge de l’Union internationale pour la Conservation de la Nature; les léopards (Panthera pardus), les bongos (Tragelaphus eurycerus eurycerus, le chat doré africain (Profelis aurata), le pangolin arboricole (Manis tricuspis), l’okapi (Okapia johnstoni)— tous répertoriés comme bientôt menacés; les crocodiles africain au museau fin (Crocodylus cataphractus) pour lesquelles les données sont maigres ; le faisan du Congo (Afropavo congensis) qui est vulnérable; et les éléphants de forêt (Loxodonta cyclotis). Plus petits et possédant des défenses plus droites que leurs cousins de la savane, les éléphants de forêt seraient en fait, selon une récente étude, une espèce distincte de celle des éléphants de la savane africaine
Bonobo. Photo de Richard Brodzeller. |
Le travail de Bokitsi est soutenu par l’Initiative pour la biodiversité au Congo et les Bonobos (BCBI), un programme de la Société zoologique de Milwaukee (ZSM). Celui-ci est dirigé par Gay Reinartz (appelé Mme Gay par Bokitsi ), laquelle a passé beaucoup de temps non seulement à travailler avec Bokitsi et ses hommes mais aussi à soutenir les communautés locales. Bokitsi fait souvent office auprès des communautés locales d’avocat et de porte-parole du Parc contre le braconnage et la chasse pour la viande de brousse. Il nous a donné un exemple de ce qu’il dit aux villageois: “‘Je vous dis ceci dans votre intérêt et celui de vos enfants. Mme Gay vient ici et vous donne des affaires scolaires, des graines et des outils et les agronomes vous apprennent comment cultiver. Tout ceci a pour but d’extirper cet esprit de destruction de vos vies […] Mme Gay ne vient pas ici pour contrôler ce que vous faites mais pour voir si vous parvenez à élever votre niveau de vie.'”
Bokitsi considère le Parc national de Salonga comme un trésor à transmettre à ses enfants et il ajoute qu’il faut que les gens dans le monde comprennent la valeur de tels lieux et ne cessent jamais de les protéger.
“Les gens qui vont lire cet article doivent savoir quelle valeur a la forêt, quelle importance a le Parc national de Salonga. Car bien d’autres personnes l’ont lu mais n’ont pas été capables de voir cela. Il se peut que certaines personnes aient déjà vu dans un zoo quelques-uns des animaux qui vivent ici. Si nous ne protégeons pas aujourd’hui le Parc et ses espèces, bientôt nous protégerons un espace vide. […] En ce qui concerne le Congo, c’est un pays riche. Il fait bon vivre ici. Sa richesse vient de ses forêts. Lorsque nous bâtirons le Congo, tout sera en paix et les gens voudront vivre ici. Le Parc constitue notre actuelle réserve.”
Dans une interview de novembre 2011, Bunda Bokitsi parle à mongabay.com de l’époque où il a été emprisonné injustement pour avoir tiré sur un braconnier, il lui explique aussi à quoi ressemble maintenant une journée ordinaire pour lui en tant que chef de patrouille et lui révèle quel est son animal préféré dans la forêt.
INTERVIEW AVEC BUNDA BOKITSI
Bunda Bokitsi recevant son Prix Alexander Abraham. Photo de la Société zoologique de Milwaukee.
Mongabay: Tout d’abord, félicitations pour avoir gagné le prix Alexander Abraham. Que signifie cette reconnaissance pour vous?
Bunda Bokitsi: Elle montre que le travail que j’ai fait est récompensé. J’en suis très content; sans ce travail, je n’en serais pas où j’en suis aujourd’hui. Le prix va m’aider à préparer l’avenir de mes enfants et servir d’exemple tout à la fois à mes enfants et à mes collègues afin qu’eux-mêmes se consacrent à la protection des animaux et des plantes de La République démocratique du Congo. J’espère qu’un jour mes enfants pourront suivre le chemin que j’ai moi-même choisi.
Mongabay: Pourquoi le Parc national de Salonga constitue-t-il une importante réserve pour le monde?
Bunda Bokitsi: Il est important parce la forêt recèle beaucoup de richesses dont certaines encore cachées comme des arbres et divers animaux. Les arbres rendent notre air respirable. L’importance du Parc de Salonga n’était pas auparavant connue. A présent, cependant, grâce à la recherche et aux connaissances quant aux effets de la destruction des forêts, nous comprenons l’importance de préserver un tel lieu. Le Parc peut aussi devenir un facteur de développement pour le pays en raison de sa richesse.
Mongabay: Quelles espèces sont les plus en danger dans le Parc?
Bunda. Photo de la Société zoologique de Milwaukee. |
Bunda Bokitsi: En particulier l’éléphant de forêt —cette espèce est la plus menacée. Mais d’autres espèces de mammifères telles que de plus petits singes et diverses antilopes comme les Bongos et les Sitatungas sont aussi menacés. Pour les bonobos, la menace n’est encore limitée à l’heure actuelle qu’au parc — mais cela peut rapidement changer.
Mongabay: Pendant des années, le parc national de Salonga a été envahi par des braconniers armés et des forces rebelles. Comment avez-vous fait face avec les autres rangers à cette menace?
Bunda Bokitsi:Nous avons compris en ce qui nous concerne l’importance du Parc. Les gardes ne pourraient pas juste rester assis à regarder les braconniers détruire le Parc de Salonga. Grâce au soutien de plusieurs ONG partenaires, les gardes ont reçu les moyens d y remédier — et ce soutien perdure à ce jour.
Mongabay: Avez-vous jamais eu peur pour votre vie?
Bunda Bokitsi: Si; des situations comme celle-ci arrivent. Si l’on me donne pour ordre aujourd’hui, par exemple, de pister des braconniers dans la forêt, pour moi, cela revient à dire que soit le braconnier soit moi devra mourir. Les braconniers détruisent notre habitat. En 2002, lorsque j’étais le chef du poste de patrouille de Boangui [Secteur sud du Parc national de Salonga], j’ai découvert dans la forêt deux braconniers armés et deux défenses d’éléphants alors que j’étais en patrouille avec Isasi [un autre agent de la protection de la faune qui se trouve actuellement au poste de patrouille d‘Etate] …] L’un des braconniers s’est enfui, l’autre a commencé à nous tirer dessus. J’ai fait feu à mon tour et j’ai finalement pu le capturer; il s’appelait Batuka. Nous avons récupéré l’ivoire. Dans de telles situations, cela se transforme en du corps à corps. N’importe quoi peut survenir. Malheureusement, son complice s’est débrouillé pour s’échapper; c’est un célèbre braconnier du nom de “Microbe.” Ce jour-là, j’ai eu de la chance.
Mongabay: Vous avez vécu et travaillé pendant des années dans le Parc national de Salonga, de quelle manière la région a-t-elle changé?
La forêt touffue du Parc national de Salonga. Photo de la Société zoologique de Milwaukee. |
Bunda Bokitsi:J’ai commencé ma carrière en tant qu’agent de la protection de la faune en 1990.
“Il y avait énormément de braconnage alors— les agents du parc pouvaient être attaqués lors de leurs patrouilles par les braconniers en plein jour. Les braconniers s’emparaient vraiment de tout, y compris des épouses des gardes et des pêcheurs. C’est justement ce qui s’est passé près d’Etate, où il y a une petite zone de pêche du nom de Boma Libala [mot en Lingala pour “ briseur de mariage”].
Des choses telles que celles-ci n’arrivent plus; avec le temps, les agents ont été mieux équipés et mieux formés pour faire face aux braconniers.
Les villageois qui vivaient à l’époque dans la région du Parc ne s’en souciaient pas. ll y avait partout du braconnage. A l’heure actuelle, les villageois ne se voilent plus la face. Ils commencent à comprendre l’importance du Parc en tant que havre de paix où les populations animales peuvent se sentir bien et se reproduire.”
Entre Etate et le village de Bofoku Mai, sur les rives du fleuve Salonga, il y avait un lieu où se baignaient les éléphants du nom de Papa Baudoui— tous les éléphants y venaient. A présent, ce vieil endroit est envahi par la végétation et aucun éléphant ne s’y rend plus. Mais au moins la paix est revenue.
Mongabay: Vous avez passé injustement des mois en prison pour avoir tiré sur un braconnier qui est ultérieurement mort. Quel impact a eu sur vous cette terrible expérience?
Bunda Bokitsi: J’ai grandement souffert en prison parce que la plupart des chefs militaires sont les ennemis des agents de parc. Ils savent que les agents sont là pour protéger le Parc tandis que ce sont les militaires qui donnent aux braconniers leurs fusils. Alors, si jamais ils détiennent un agent, ils le traitent vraiment mal et le torturent. Des membres de ma famille qui vivent à Boende ont dû payer 5000 francs congolais [environ 5,5$] juste pour pouvoir m’apporter de la nourriture en prison. Le commissaire militaire aux comptes m’a dit que, puisque j’avais détruit la viande qu’il avait commandée au Parc, je devais maintenant payer pour cela. Alors oui, l‘expérience a été dure mais cela ne m’a pas changé. Je ne crains toujours pas d’aller en forêt et de faire mon travail. Si j’avais peur maintenant, je ne pourrais pas faire mon travail.
Un singe braconné et fumé pour la viande de brousse et des armes confisquées. Photo de la Société zoologique de Milwaukee. |
En juin 2010, Edmond, Bwase et Ndjuma [des agents d’Etate] ont été pris en embuscade durant leur patrouille par un groupe de braconniers conduit par le célèbre braconnier du nom de “Tofene”. Les agents ont été torturés, battus avec des bâtons pointus, humiliés et leur équipement ainsi que deux fusils leur ont été pris. Les agents ont survécu à cet incident, cependant, peu après, les autorités militaires ont envoyé des documents pour les accuser au pôle de l’Institut congolais pour la Conservation de la Nature de Watsi Kengo qui administre les parcs nationaux en République démocratique du Congo; ils ont demandé l’arrestation de ces trois agents d’Etate innocents . Lorsque le Conservateur de l’Institut congolais pour la Conservation de la Nature de Watsi Kengo a refusé de livrer ces agents à l’Armée, ils ont même voulu m’arrêter en tant que responsable des agents.
Mongabay: Vous dirigez actuellement une équipe de patrouille à Etate qui vit en pleine forêt. Est-ce difficile de se retrouver loin de sa famille?
Bunda Bokitsi: En ce qui me concerne, c’est une bonne chose. Je n’ai pas beaucoup étudié. J’ai besoin de continuer à approfondir mes connaissances, ainsi, je peux éduquer mes enfants. Si je reste toujours près de ma femme, il y aura de continuels petits problèmes qui ralentiront les choses. Mais je ne connais pas les épouses des autres agents —il se peut que cela leur pose plus de problèmes.
Mongabay: Que signifie pour vous le fait de travailler au poste de patrouille d’Etate?
Bunda Bokitsi: Travailler à Etate a changé radicalement ma vie comparé à l’époque où je vivais et travaillais aux environs de Monkoto [Siège de l’Institut congolais pour la Conservation de la Nature]. J’ai à présent amélioré mes patrouilles et je travaille avec un compas, un carte et un GP . A Monkoto, il n’y avait pas de suivi des et beaucoup des données relatives aux patrouilles étaient fausses. Ici, à Etate, c’est impossible. Vous ne pouvez pas sortir en patrouille, juste vous asseoir et ne rien faire. Ceci me rend très fier— je n’aurais jamais pensé que ces choses arriveraient dans ma vie. J’ai commencé à former mon premier enfant Bwase [Bunda parle de «ses» agents d’Etate comme s’ils étaient ses enfants]. Tout le monde peut voir maintenant que les autres agents développent aussi ces compétences et cela me rend très fier.
Mongabay: Qu’est-ce qu’une journée normale pour vous à présent?
Bunda et l’équipe des gardes d’Etate. Photo de la Société zoologique de Milwaukee. |
Bunda Bokitsi: L’ambiance quand je suis en forêt est différente; je ne fais qu’un avec mon travail. Lorsque je suis au campement, je rêve d’être en forêt et je me prépare à travailler avec la prochaine patrouille dès que possible.
Lorsque je suis en patrouille, nous nous levons vers 5h du matin et mangeons les restes du repas de la veille. S’il y a un peu de café, nous en prenons une tasse. Nous empaquetons nos affaires dans les sacs à dos puis nous reprenons la patrouille vers 6h. A midi, nous prenons une pause d’une heure. Vers 16h, nous commençons à chercher un endroit pour installer le campement, donc, nous cherchons un petit ruisseau avec de l’eau claire. Nous trouvons du bois sec et faisons un feu tandis que d’autres lavent changent de vêtements et les lavent. Nous suspendons nos vêtements près du feu afin qu’ils puissent sécher. Puis, nous préparons un repas fait de poisson fumé et de chiquangue [de la pâte de manioc préparée et enveloppée dans une grande feuille], parlons de tout ce qui nous passe par la tête ou des évènements de la journée et planifions le lendemain. Aux alentours de 18h -20h, nous allons dormir sous notre couverture.
A Etate, l’emploi du temps est à peu près le même. J’envoie des agents le matin vérifier nos filets de pêche et je parle à l‘équipe vers 7h30. Certains agents iront dans les proches villages pour acheter du chiquangue pour la prochaine patrouille tandis que d’autres feront quelques travaux de maintenance au poste de patrouille. Je copie aussi les données de ma patrouille sur des feuilles de données pour la Société zoologique de Milwaukee et l’Institut congolais pour la Conservation de la Nature et décide de la zone où doit se rendre notre prochaine patrouille.
Mongabay: Il y a de très pauvres gens qui vivent dans les villages aux alentours du Parc — comme par exemple celui de Bofoku Mai près de votre poste de patrouille. Comment leur expliquez-vous qu’ils ne peuvent pas prendre dans le Parc de la viande de brousse?
Les agents de protection de la faune brûlent un campement de braconniers Photo de la Société zoologique de Milwaukee. |
Bunda Bokitsi: Je leur donne des exemples de la vie d’autres villages, comme Monkoto et leur montre que les choses là sont différentes — il y a du développement. Je leur demande de réfléchir à changer leurs mentalités afin que Bofoku Mai puisse aussi être développé. Je leur dit qu’une fois qu’ils respecteront le Parc, ils pourront vraiment commencer à changer leur situation.
Récemment, j‘ai parlé aux villageois de Bofoku Mai . Voici ce que je leur ai dit:
“‘Je vous dis ceci dans votre intérêt et celui de vos enfants. Mme Gay vient ici et vous donne des affaires scolaires, des graines et des outils et les agronomes vous apprennent comment cultiver. Tout ceci a pour but d’extirper cet esprit de destruction de vos vies. Avec tout ce que vous, vous gagnez ici de cette manière, à Monkoto, personne n’acccepterait qu’il y ait des braconniers parmi eux. Mme Gay ne vient pas ici pour contrôler ce que vous faites mais pour voir si vous parvenez à élever votre niveau de vie.'”
Mongabay: Ayant passé tant de temps au Congo, est-ce que vous voudriez nous parler d’au moins l’un de vos souvenirs quant à d’étonnantes rencontres avec la faune?
Bonobo sauvage à Etate. Photo de la Société zoologique de Milwaukee. |
Bunda Bokitsi:En 2002, lorsque je travaillais à Lokofa [une zone dans le secteur sud du fleuve Luilaka] avec Mme Gay et M. Steven (Steven Week est un Américain qui a été élevé à Mbandaka en République démocratique du Congo ), nous travaillions sur certains transects. Sur l’un de ceux-ci, nous nous sommes retrouvés face à des bonobos. C’était un groupe de 13 individus. Les bonobos étaient vraiment proches, comme d’ici à ce citronnier [il montre une distance d’environ 9 mètres] et ils nous ont même jeté des excréments! Certains autres bonobos hurlaient “wo wo wo” car c’était la première fois qu’ils voyaient l’homme blanc. Il y avait un petit qui grimpait dans un arbre bas et j’ai voulu le prendre dans mes mains mais Mme Gay m’a dit de ne pas le faire. (Rires)
Mongabay: Il faut que je vous demande quelque chose: quel est votre animal préféré?
Bunda Bokitsi: Je les aime tous; je n’ai pas d’animal préféré. Tous les animaux qui vivent ensemble dans un lieu sont faits les uns pour les autres. On doit tous les “préférer”! Lorsque je vais en un endroit et trouve quelqu’un qui a tué un éléphant, je ne peux dire “oh, ce n’est pas un problème parce que j’aime plus les bonobos .” Non, je serais autant furieux contre ceux qui tueraient n’importe quel animal!
Mongabay: Qu’aimeriez-vous que notre public mondial sache le plus quant aux forêts tropicales congolaises et à la République démocratique du Congo?
Bunda avec des pièges confisqués. Photo de la Société zooloqique de Milwaukee. |
Bunda Bokitsi: Les gens qui liront cet article doivent connaître la valeur de la forêt, l’importance du Parc national de Salonga. Je dis ceci car bien d’autres personnes l’ont lu mais n’ont pas été capables de les voir. Il se peut que certaines personnes aient déjà vu dans un zoo quelques-uns des animaux qui vivent ici. Si nous ne protégeons pas aujourd’hui le Parc et ses espèces, bientôt nous protégerons un espace vide. Si nous pouvons continuer à voir des animaux de nos propres yeux comme ceci, alors, un jour, les chercheurs et les touristes viendront les voir.
En ce qui concerne le Congo, c’est un pays riche. Il fait bon vivre ici. Sa richesse vient de ses forêts. Lorsque nous bâtirons le Congo, tout sera en paix et les gens voudront vivre ici. Le Parc constitue notre actuelle réserve. En dehors du Parc, les choses ne sont pas géniales; les gens ne protègent pas la vie sauvage et ne font que tuer des animaux.
Si un arbre est droit cela signifie qu’il est bien enraciné dans le sol. Mais lorsque l’arbre est penché c’est qu’une pression s’exerce sur ses racines et cela implique que d’autres arbres s’écraseront lorsque les grands arbres tomberont. C’est l’image du Congo. Nous devons redresser l’arbre.
La forêt et le fleuve du Parc national de Salonga. Photo de la société zoologique de Milwaukee.
Eléphant de forêt au Gabon. Photo de Rhett A. Butler.
Squelette d’un éléphant de forêt braconné dans le Parc national de Salonga. Photo de la société zoologique de Milwaukee.
Une Sitatung c’est-à-dire une antilope centre-africaine, au Gabon. Photo de Rhett A. Butler.