Nouvelles de l'environnement

Élément d’Afrique : des communautés ghanéennes contestent la réglementation minière et Shell déverse plus de pétrole dans le delta du Niger

  • La colère monte alors qu’un pipeline de Shell contamine une rivière et des fermes dans le sud-est du Nigeria.
  • Des activistes réclament que la nouvelle loi minière soit abandonnée alors que le gouvernement du Ghana accorde un permis d’extraire de l’or dans une réserve forestière.
  • Également au Ghana, des habitants manifestent contre un programme minier communautaire.
  • Élément d’Afrique est le bulletin bimensuel de Mongabay présentant de courts récits liés au secteur extractif en Afrique.

De la colère suscitée par le dernier déversement de pétrole alors qu’un pipeline de Shell contamine une rivière et des fermes au Nigeria

L’Agence nationale pour la détection et la réaction aux déversements accidentels de pétrole (NOSDRA) du Nigeria indique qu’un déversement de pétrole provenant du pipeline Trans Niger de Shell, qui traverse de nombreuses communautés dans le sud-est de l’État de Rivers, a contaminé en profondeur une rivière et des étendues de terres agricoles. Le pipeline transporte jusqu’à 180 000 barils de pétrole brut à travers l’Ogoniland, l’une des régions les plus polluées du pays.

NOSDRA a indiqué que du pétrole brut s’était déversé dans la rivière Okulu le 11 juin. Shell a déclaré qu’elle travaillait avec une équipe d’enquête mixte composée de représentants d’organismes de réglementation, d’habitants et de la société civile afin d’identifier la cause et l’impact du déversement.

A man in a red shirt standing on barren grey brown shore, oily water of Goi Creek flowing past. Friends of the Earth International via Flickr (CC BY-NC-ND)
Conséquences d’un déversement de pétrole en 2010 à Goi Creek, en pays Ogoni. Cette partie du delta du Niger a été fortement polluée par l’industrie pétrolière. Friends of the Earth International via Flickr (CC BY-NC-ND)

Les enquêteurs n’ont pas encore donné d’estimation du volume du déversement, mais un activiste local a dit qu’il s’agissait du pire déversement dans la zone depuis plus de dix ans.

« Il a duré pendant plus d’une semaine, il s’est répandu dans la rivière Okulu, qui rejoint d’autres rivières et finit par se jeter dans l’océan Atlantique, il a touché plusieurs communautés et déplacé plus de 300 pêcheurs », Fyneface Dumnamene, responsable de l’ONG Youths and Environment Advocacy Center qui surveille les déversements dans la région, a déclaré à l’agence Associated Press.

Dumnamene a dit à Mongabay qu’un deuxième déversement s’est produit le 18 juin, cette fois en provenance d’une installation appartenant à la Nigerian National Petroleum Corporation.

Des fuites de pétrole se produisent fréquemment dans le delta du Niger. Un rapport publié en mai estime que Shell et les autres sociétés pétrolières et gazières ont déversé 110 000 barils de pétrole dans l’État de Bayelsa voisin au cours des 50 dernières années. Des décennies de production pétrolière ont sévèrement touché les communautés de pêcheurs et de paysans et compromis la riche biodiversité du delta, qui comprend des espèces menacées comme les lamantins (Trichechus senegalensis), les chimpanzés (Pan troglodytes ellioti) et le colobe bai du delta du Niger (Piliocolobus epieni).

Idris Musa, le directeur général de la NOSDRA a expliqué que la réponse de l’agence au déversement de Shell avait été retardée par les manifestations des habitants.

Dumnamene a expliqué que les populations étaient en colère et voulaient que la société paye pour les dommages causés. « Je pense qu’ils doivent communiquer avec la communauté. Si [la manifestation] est ce qui arrive systématiquement lorsqu’il y a une fuite de pétrole, les gens sont en colère. »

Il peut être difficile d’arriver à faire nettoyer ou payer les dommages environnementaux par les compagnies pétrolières et les procès peuvent durer des années.

Medium shot of a white-thighed colobus (Colobus vellerosus) in a tree, its long white tail hanging beneath a branch at Brong Ahafo, Ghana. Image by César María Aguilar Gómez via iNaturalist (CC BY-NC)
Un colobe magistrat (Colobus vellerosus) à Brong Ahafo au Ghana : l’habitat de cette espèce et d’autres espèces en danger critique est menacé par l’expansion rapide de l’extraction d’or dans les forêts restantes du Ghana. Image par César María Aguilar Gómez via iNaturalist (CC BY-NC)

Des activistes réclament que la nouvelle loi minière soit abandonnée au Ghana

Les défenseurs des forêts veulent qu’une nouvelle loi réglementant l’extraction minière dans les réserves forestières soit abandonnée, et pointent du doigt l’octroi d’un permis dans une forêt intacte en février. L’agence de protection de l’environnement (EPA) du pays a déclaré que la nouvelle loi adoptée en novembre était destinée à combler des lacunes dans les lois existantes. Des activistes disent qu’elle a en fait accordé à la présidence de nouveaux pouvoirs lui permettant d’approuver de l’extraction minière dans des zones de biodiversité d’importance mondiale.

« Si l’EPA nous dit qu’il y a des lacunes, ils devraient nous dire ce que sont ces lacunes », a dit Daryl Bosu à Mongabay. Bosu est le directeur adjoint de A Rocha Ghana, l’une des cinq ONG qui ont publié une pétition contre la nouvelle loi au début du mois.

« Le nouvel [instrument juridique] a pris une position qui fait que si la documentation nécessaire et obtenue et, en ce qui concerne les aires protégées, si le gouvernement donne son feu vert, toutes les réserves forestières risquent l’exploitation minière, au contraire de l’ancienne directive qui excluait complètement les réserves forestières protégées de toutes les activités minières », a-t-il dit.

Il a expliqué à Mongabay que les dispositions de la nouvelle loi avaient été cachées à la société civile jusqu’à ce que l’EPA en présente des détails à un séminaire à Accra en mars, mais qu’il y a déjà des preuves du danger que représente la nouvelle loi.

Boin Tano, une réserve forestière de 129 kilomètres carrés dans la région de l’ouest du Ghana, est une forêt relativement intacte qui abrite le Touraco à gros bec (Tauraco macrorhynchus), le calao longibande (Tockus fasciatus) et la vulnérable pintade à poitrine blanche (Agelastes meleagrides), ainsi que le colobe magistrat (Colobus vellerosus) et le chimpanzé de l’Ouest (P.t. verus). Ces deux dernières espèces sont en danger critique d’extinction, et pourtant une concession minière a été octroyée en février. Bosu a indiqué que cela n’aurait pas été possible avec l’ancienne loi.

« Tout gouvernement sérieux, vraiment engagé en faveur de la conservation forestière et de l’action climatique ne ferait pas une loi si rétrograde », a-t-il déclaré à Mongabay. Il a également dit que le gouvernement devrait immédiatement abandonner la nouvelle loi et mener des consultations avec les parties intéressées pour en rédiger une meilleure.

Several figures standing in a pit excavated in pale orange-brown earth. Image by Peter Lewenstein (CC BY-NC 2.0)
Le programme minier communautaire du Ghana était destiné à amener les mineurs à petite échelle comme ceux-ci dans une réglementation formelle. Les habitants de la région de l’Ouest disent qu’il n’a fait qu’accélérer la destruction et endommager leurs foyers dans la région. Image par Peter Lewenstein via Flickr (CC BY-NC 2.0)

La population manifeste contre les permis miniers spéciaux

AKOON et BOGOSO au Ghana — Des habitants de deux villes dans la région de l’ouest du Ghana ont récemment manifesté contre les « programmes miniers communautaires » dans la région.

En 2021, le gouvernement ghanéen a lancé des programmes dans six zones du pays dans le but de réduire l’orpaillage illégal, connu sous le nom de « galamsey ». Le programme minier communautaire a créé un permis spécial offert uniquement aux citoyens ghanéens pratiquant l’exploitation minière à petite échelle dans le but d’améliorer la réglementation des opérations de galamsey.

Mais les habitants des communautés d’Akoon et Bogoso disent qu’au lieu d’encourager l’exploitation minière durable et responsable, le programme s’est transformé en piège mortel pour les populations locales. Ils expliquent que les effets néfastes de l’exploitation minière ont augmenté avec la nouvelle réglementation, le dynamitage des rochers provoquant d’énormes fissures dans les maisons et les autres établissements, menaçant de les faire s’effondrer.

Ils affirment aussi que des ressortissants chinois sont impliqués dans le programme minier communautaire et les accusent d’avoir introduit l’utilisation des explosifs, dont les mineurs locaux ne dépendaient pas auparavant.

« L’exploitation minière communautaire ne nous aide plus. Les Chinois ont pris le contrôle de l’exploitation minière communautaire et ils utilisent de la dynamite qui affaiblit nos maisons qui développent des fissures. Nous voulons que les Chinois arrêtent l’exploitation minière », a dit Kofi Apinko, un habitant et mineur à petite échelle.

Un autre habitant, Joshua Nsaidoo, a expliqué que les opérations minières menaçaient de couper les villes du reste de la région. « Les Chinois ont étendu l’exploitation minière jusqu’au bord de la route, ce qui rend la route difficilement praticable pour nous, en particulier au cours de cette saison des pluies. Nous avons dû faire un détour pour arriver en ville. »

Awudu Salami, Ini Ekott, et Mabel Annang Adorkor ont collaboré à la rédaction de ce bulletin.

Image de bannière : Un colobe magistrat (Colobus vellerosus) à Brong Ahafo au Ghana. Image par César María Aguilar Gómez via iNaturalist (CC BY-NC)

Article original: https://news.mongabay.com/2023/07/element-africa-ghanaian-communities-challenge-mining-regulation-and-shell-spills-more-oil-in-the-niger-delta/

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