Une entreprise singapourienne dénommée ISR Capital est en train de mettre en exploitation une mine de terres rares dans la péninsule d’Ampasindava à Madagascar. La société est confrontée à la fois à une enquête menée par les contrôleurs financiers et à des changements au niveau de ses principaux dirigeants.Les terres rares sont des éléments nécessaires pour les téléphones portables et de nombreux autres appareils modernes mais leur extraction peut avoir de graves répercussions sur l'environnement et la santé. Ce serait la première mine de ce genre à Madagascar.Les scientifiques ont prévenu que la péninsule d'Ampasindava abrite un certain nombre d'espèces de lémuriens en voie de disparition qui pourraient encore être plus menacées si le projet minier devenait opérationnel. Les agriculteurs locaux et les opérateurs touristiques s'opposent au projet, craignant une contamination de l'eau et des terres. PÉNINSULE D’AMPASINDAVA, Madagascar. Solondraza, un agriculteur de 63 ans du nord-ouest de Madagascar, mène une vie essentiellement paisible. Il vit avec sa femme dans une petite maison faite de ravinala, un type de palmier endémique qui prédomine le paysage vallonné. Ils gagnent de l’argent grâce aux cultures de rente comme la vanille et le cacao, qui se développent bien dans cet environnement tropical, ce qui leur a permis d’élever leurs 18 enfants et 54 petits-enfants, dont la plupart vivent dans leur village de Befitina. Mais ces dernières années, Solondraza est devenu un activiste, organisant des réunions et rassemblant des voisins. Il veut s’opposer à une entreprise étrangère, Tantalum Rare Earth Malagasy (TREM), qui cherche à exploiter des terres rares sur leurs terres. “Nos ancêtres ont survécu ici en vivant de la terre”, a déclaré Solondraza. “Si TREM vient ici pour nuire à cette harmonie, je crains fort pour l’avenir de mes enfants. Nous ne voulons pas de TREM, nous n’en avons pas besoin.” Solondraza en train d’inspecter des plants de vanille sur ses terres. Des caféiers sont aussi visibles derrière les tuteurs de vanilliers sur le même champ. Ces cultures de rente constituent les principaux moyens d’existence des familles d’Ampasindava. Photo par Edward Carver pour Mongabay. Befitina fait partie de la concession de 300 kilomètres carrés appartenant à TREM sur la péninsule d’Ampasindava, qui est une zone à forte biodiversité au bord du canal de Mozambique, à quelques centaines de kilomètres à l’est de la côte de l’Afrique continentale. Les scientifiques ont prévenu qu’Ampasindava abrite plusieurs espèces de lémuriens en voie de disparition qui pourraient être encore plus menacées si le projet minier devenait opérationnel. La péninsule se trouve également en face de l’île de Nosy Be, la principale destination touristique de Madagascar, où les propriétaires d’entreprises s’inquiètent du fait que la pollution minière pourrait éloigner les visiteurs. Les mines de terres rares peuvent avoir de graves impacts sur l’environnement et la santé, selon des recherches menées en Chine. Les travaux d’exploration de TREM ont confirmé qu’Ampasindava est riche en terres rares, éléments précieux pour les moteurs électriques, les pièces d’ordinateur, les téléphones portables et de nombreux autres appareils modernes. La compagnie gestionnaire du projet a présenté des résultats «exceptionnellement prometteurs» à Ampasindava, et la concession a été évaluée à plus de 1 milliard de dollars. Toutefois, les organismes de contrôle financier ont rejeté les méthodes d’évaluation et une troisième évaluation est en cours. Cette semaine, ISR Capital a indiqué que l’évaluation à venir serait beaucoup plus basse. C’est un dépôt d’argile ionique, qui est précieux pour obtenir des éléments de terres rares relativement faciles à exploiter et à traiter. Seuls quelques gisements de ce genre ont été découverts en dehors de la Chine, et celui d’Ampasindava est considéré comme particulièrement important. Ces cartes montrent la péninsule d’Ampasindava à Madagascar, avec sa zone marine protégée (en bleu), sa zone terrestre protégée (en vert) et la concession minière de terres rares de TREM (en rouge). Fonds de carte par Google Maps et carte de la péninsule d’Ampasindava par l’association Famelona. Une aire protégée qui couvre la superficie restante de la péninsule est directement juxtaposée à la concession de TREM. Ce statut de nouvelle aire protégée a été obtenu en 2015, juste après que TREM ait réussi à faire pression pour réduire sa taille, afin de préserver les limites de la concession. Au début de l’année 2015, deux hauts fonctionnaires du gouvernement ont rejoint Ampasindava sur un hélicoptère affrété par TREM, selon des employés du Missouri Botanical Garden de Madagascar qui gère l’aire protégée. Quelques mois plus tard, en juillet 2015, le gouvernement malgache a décidé que la zone de montagne d’Ambongomirahavavy, réservoir contenant 80% de l’eau de la péninsule et qui devait être inclus dans l’aire protégée, ferait toujours partie intégrante de la concession de TREM. “La position du gouvernement est claire: ils sont pro-miniers”, a déclaré à Mongabay un botaniste malgache impliqué dans les négociations. “Leur intérêt pour l’environnement est inexistant”. TREM a considéré les négociations différemment. “Je n’ai pas d’informations précises sur la façon dont les négociations se sont déroulées, mais TREM était évidemment intéressé par les résultats finaux et il serait logique qu’ils fassent pression pour une zone limitée à protéger dans leur concession”, a affirmé Markus Kivimäki, PDG de Tantalus Rare Earths AG (TRE AG), la société mère de TREM en Allemagne, dans un courrier électronique à Mongabay.