Nouvelles de l'environnement

La pêche, responsable de la maladie des coraux?

  • La maladie du corail est un problème majeur pour les récifs dans le monde.
  • Des résultats contradictoires ont été mis en évidence par une poignée d'études, quant à savoir si les réserves marines aident à protéger ou non les coraux contre les maladies.
  • D'après une étude récente sur la Grande barrière de corail australienne, pêcher sur les récifs détériore les coraux, qui à leur tour génère le développement de la maladie.
Discarded fishing gear tangles a reef. Photo credit: David Burdick / NOAA.
Matériels de pêche échoués sur un récif. Photo: David Burdick / NOAA.

Les récifs de coraux, foisonnant de vie sont les lieux d’habitation d’une communauté vibrante de poissons; ils sont alors un endroit idéal pour la pêche. D’après une étude sur la Grande Barrière de corail en Australie, pêcher sur les récifs détériore les coraux, qui à leur tour génère le développement de la maladie.

La maladie du corail est un problème majeur pour les récifs dans le monde. Son taux de croissance, sa capacité à se reproduire et sa faculté à résister à d’autres maladies ou aux facteurs climatiques comme le blanchissement se trouvent affaiblis quand le corail lutte contre une infection.

De nombreux pays ont établis des zones de protection des coraux et d’autres espèces marines contre la pêche et autres activités humaines; sont-elles efficaces contre les maladies? Des résultats contradictoires ont été mis en évidence par une poignée d’études. Joleah Lamb, biologiste marin, aujourd’hui basé à l’université de Cornell à New York cherche à démontrer si le taux de maladies est moins élevé dans les zones marines protégées que celui des zones non protégées.

Lamb et ses collègues ont visité les îles de Whitsunday, un groupe d’îles sur la côte du Queensland en Australie. Ils ont choisi 21 lieux désignés “réserves marines nationales”, où la pêche est interdite et 20 autres où elle est permise, afin de déterminer si les parcs marins jouent un rôle dans la protection des récifs contre les maladies

L’équipe de biologistes a visité plus de 80800 colonies de coraux et étudié s’ils étaient ou non en bonne santé. Ils ont aussi fait d’autres observations : sur les espèces de poissons, la présence ou non de matériels de pêche abandonnés, la présence de lésions sur les coraux et s’ils étaient blanchis, mangés par des escargots ou d’autres prédateurs.

L’équipe de biologistes a visité plus de 80800 colonies de coraux et étudié s’ils étaient ou non en bonne santé. Ils ont aussi fait d’autres observations : sur les espèces de poissons, la présence ou non de matériels de pêche abandonnés, la présence de lésions sur les coraux et s’ils étaient blanchis, mangés par des escargots ou d’autres prédateurs.

Selon les chercheurs, 31 facteurs pourraient expliquer la différence d’incidence des maladies sur les récifs protégés ou non. L’explication principale serait de les préserver contre la pêche. En effet, les trois critères d’une mauvaise santé du corail et d’une utilisation intensive par la population (blanchissement, lésions des coraux et présence de lignes de pêche abandonnées) se trouvaient en plus grand nombre dans les sites non protégés plutôt que dans les autres.

Les auteurs ont conclu qu’en pêchant sur les récifs, les pêcheurs détériorent les coraux avec leur matériels de pêche qui les fissurent et permettent l’entrée de maladies pathogènes.

Les auteurs ont rapporté les observations suivantes : si l’on considère que les lésions sur la colonie et la présence en abondance d’anciennes lignes de pêche sont les facteurs principaux qui conduisent à des dissemblances entre les réserves marines et les non réserves, on conclut que c’est l’activité de la pêche en soi qui est responsable de cette différence importante du taux de maladies entre les zones protégées et celles ouvertes à la pêche, plutôt que les variétés de poissons ou autres communautés benthiques.

L’idée que la pêche cause des traumatismes qui favorisent par la suite le développement des maladies apparait logique pour Garriet W.Smith, écologiste microbien, spécialisé dans les coraux à l’université de Aiken, Caroline du Sud; il n’a pas participé à l’étude.

Les lésions des coraux ou “changement sur les microbiotes normaux” sont la première étape des symptômes de la maladie (peu importe sa spécificité). Smith a écrit dans un émail à Mongabay que ces modifications peuvent intervenir à la suite d’une lésion physique, de la hausse des températures (blanchissement) ou des changements chimiques.

Cependant certains scientifiques ne sont pas convaincus de la corrélation entre les lésions des coraux et la maladie. Thierry Work, spécialiste des maladies de la faune à la station de recherche géologicale américaine d’Honolulu nous a dit :” si le matériel de pêche responsable de ce traumatisme est vraiment la cause des maladies du corail, quel en est le mécanisme? Le traumatisme à lui seul? Je ne pense pas; après tout, les coraux sont plutôt résistants; bien qu’à la merci des prédateurs et du mouvement permanent des vagues, ils sont plutôt résistant; pourquoi le matériel de pêche leur serait-il alors plus dommageable?”.

Work, qui n’a pas participé à l’étude nous a dit :”les résultats mitigés des études examinant l’incidence des zones marines protégées sur la maladie du corail nous suggèrent que la réponse est plus complexe. Toutes ces études écologiques seront simplement associatives jusqu’à la découverte de ce qui tue vraiment les coraux.” .

La Grande barrière de corail Australie. Photo: Rhett A. Butler.

En dehors des réserves marines nationales, les chercheurs ont comparé deux sortes de sites non protégés : ceux où on avait limité le matériel de pêche que l’on pouvait utiliser et les autres où n’importe quels matériels étaient permis. Ils s’attendaient à trouver plus de coraux malades dans les endroits où les pêcheurs étaient libres d’utiliser ce qu’ils voulaient, détériorant par conséquent davantage le corail. Au contraire, ils ont découvert avec surprise deux fois plus de maladies ainsi que davantage de lésions aux coraux et de matériels de pêches abandonnés que dans les endroits avec restrictions de matériels.

Les auteurs soupçonnent que les pêcheurs ont ciblé les sites avec restrictions de matériels, parce qu’ ils pensaient qu’ils étaient moins épuisés en poissons ou peut-être plus accessibles pour accoster en bateau.

Smith l’a confirmé dans un émail : ” dans les Caraïbes, j’ai observé que les pêcheurs préféraient les zones interdites aux zones non restreintes croyant que la pêche y est meilleure (c’est souvent le cas). Les résultats appellent à s’interroger sur l’efficacité de la restriction de matériels comme stratégie de conservation.

C’est la première étude qui essaye de démontrer une corrélation entre l’activité humaine, les lésions aux coraux et la maladie. Elle met aussi en évidence un autre effet positif potentiel des zones marines de protection: le déclin de la maladie du corail.

Comme l’écrivent les auteurs dans leur rapport: ” l’interdiction de pêcher dans les réserves marines joue un rôle significatif dans la diminution de la maladie du corail sur les récifs surpêchés d’Australie, ce qui nous suggére un outil supplémentaire de protection pour réduire les maladies du corail dues à des lésions physiques.”

 

Citations:

Lamb, J. B., Williamson, D. H., Russ, G. R., & Willis, B. L. (In Press). Protected areas mitigate diseases of reef-building corals by reducing damage from fishing. Ecology.

 

 

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