Déforestation à Riau. Photo de Rhett Butler
D’après une nouvelle évaluation, environ la moitié de la perte de forêt primaire indonésienne se produit en dehors des zones de concession officiellement définies. L’évaluation observe également des taux de déforestation plus élevés dans les régions où la gouvernance forestière est la plus mauvaise.
Le rapport, publié le mois dernier par Forest Watch Indonesia, se base sur une analyse de données satellites englobant l’archipel. Contrairement aux évaluations effectuées par le ministère des Forêts, les données incluent des zones hors « domaine forestier ».
Les résultats donnent à réfléchir ; ils indiquent que le couvert forestier de l’Indonésie est maintenant à 46 pour cent de sa masse terrestre, une baisse de 2,5 pour cent depuis 2009. Le couvert forestier naturel en Indonésie représente désormais 82,5 millions d’hectares, plus de la moitié existant seulement dans trois provinces : la Papouasie-Nouvelle-Guinée, le Kalimantan oriental (y compris le Kalimantan du Nord), et le Kalimantan occidental.
L’analyse de Forest Watch Indonesia conclut que l’Indonésie aurait perdu en moyenne 917 000 ha de forêt primaire par an entre 2009 et 2013, ce chiffre est bien supérieur à celui donné par le ministère des Forêts. Les régions du Kalimantan et de Sumatra totalisent plus des trois cinquièmes de cette perte.
Les données révèlent également que près de la moitié de la perte de forêt primaire a eu lieu en dehors des zones de concession. Le rapport ne fait pas le détail des facteurs de déforestation dans ces zones, mais l’agriculture, l’huile de palme, le caoutchouc et les incendies sont en général d’importants contributeurs.
Au sein des concessions, le déboisement est distribué de manière relativement égale entre les aires autorisées pour l’huile de palme, les plantations de bois de construction et les aires d’exploitation minière. Les concessions forestières ont la plus petite étendue de déforestation, bien qu’elles représentent la plus grande zone de forêt primaire. Les propriétés pour le bois de construction et les plantations d’huile de palme ont perdu le plus grand pourcentage de leur couvert forestier.
Forest Watch Indonesia a également observé un facteur inhérent important de la déforestation en Indonésie : la gouvernance forestière. Pour cinq districts, Forest Watch Indonesia a comparé la déforestation à un indice de gestion des forêts, un indicateur de la gouvernance forestière. L’organisme a découvert que « ceux ayant les indices de gouvernance forestière les plus faibles étaient les aires ayant subi le plus de déforestation par rapport aux autres districts » indiquant que « la mauvaise gouvernance forestière accélère la dégradation des ressources forestières ».
Sur le plan de la gouvernance, l’étude rapporte des pratiques contestables au sein de l’industrie des forêts, notamment 58 pour cent de concessions actives n’ayant pas acquis les certifications légales et de caractère durable. Les entreprises du bois ont planté des arbres sur une fraction seulement des terres déboisées.
L’un des principaux problèmes, explique le rapport, est la bureaucratie chargée de la gestion des forêts en Indonésie.
« Les problèmes sylvicoles sont de plus en plus complexes avec une capacité organisationnelle minimale sur le site, y compris de mauvaises relations entre le gouvernement central et ses divisions locales », affirme le rapport. « Un certain nombre de problèmes n’est pas immédiatement résolu parce que le gouvernement (notamment le ministère des Forêts) ne donne pas la priorité à la résolution des causes profondes de ces problèmes. »
Forest Watch Indonesia met désormais la gouvernance forestière au centre de son travail pour améliorer l’industrie forestière de l’Indonésie. L’organisation demande plusieurs programmes pour résoudre les conflits de propriété des forêts, protéger et restaurer les forêts, ainsi qu’en renforcer la gestion. Avant que ces programmes ne puissent être mis en place, l’Indonésie a besoin de davantage de données améliorées sur l’usage forestier, de meilleures lois pour les forêts avec une application constante, de reconnaître les droits des communautés, d’un climat des affaires juste et compétitif, ainsi que d’agences forestières locales plus puissantes.
« La faiblesse de la mise en place d’une gouvernance des forêts par le gouvernement a indirectement laissé la place au développement de pratiques corrompues, » selon le rapport. « Les systèmes corrompus et non transparents aux niveaux légal, politique et économique qui voient les ressources forestières uniquement en tant que sources de revenus et de profits, ont grandement contribué à la dégradation des forêts en Indonésie. Les disparités causées par les rôles de gouvernements médiocres et la capacité à exécuter les fonctions de suivi offrent un avantage aux acteurs forestiers peu scrupuleux pour exploiter les ressources forestières de façon destructive.»
CITATION: FOREST WATCH INDONESIA (2014). THE UNENDING DISINTEGRATION OF INDONESIA’S FORESTS