Nouvelles de l'environnement

Une ONG accuse sévèrement une étude de minimiser la menace de l’exploitation du bois dans la forêt tropicale du Congo

Global Witness a remis en question les conclusions présentées par une étude à propos de l’exploitation du bois dans les forêts tropicales de l’Afrique centrale.



Le groupe, qui a publié une série de rapports d’enquête sur les abus perpétrés par les entreprises d’exploitation du bois opérant dans la deuxième plus grande forêt tropicale du monde, a déclaré qu’une étude publiée lundi dans le journal Philosophical Transactions of the Royal Society B « [présente] une image erronée et prêtant à confusion de la menace actuelle et grandissante qui pèse sur la forêt tropicale du Bassin du Congo »



« L’Etude conclut que l’exploitation du bois ne constitue pas un facteur de déforestation majeur et qu’il est de “ faible impact ”, en se basant sur les prétendus récents efforts des pays du Bassin du Congo pour une gestion durable des forêts, » a déclaré le groupe par courriel à mongabay.com. « Les données utilisées pour appuyer une telle affirmation consistent en une imagerie par satellite et des statistiques officielles relative à l’extraction du bois remises par les concessions forestières à OFAC (Observatoire des Forêts d’Afrique Centrale). Selon nous, ces données ne sont pas suffisamment fiables ni représentatives pour étayer cette conclusion. »



Global Witness a poursuivi en déclarant qu’un “ excès d’exploitation du bois aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur des concessions au sein des pays du Bassin du Congo, est tout à fait illégal et non viable, » citant ses propres investigations de même que de récents rapports émanant du REM, observateur indépendant des forêts au Congo Brazzaville.



Forest cover in Congo Basin countries




Global Witness soupçonne les concessionnaires au Congo de déclarer une production inférieure afin de “ camoufler “ l’exploitation illégale du bois.



« [Notre] rapport ‘L’art de l’exploitation forestière industrielle’ explique comment les exploitants forestiers en RDC abusent des permis d’exploitation à usage artisanal afin de mener leurs activités à l’échelle industrielle, en dehors du système des concessions, » a déclaré le groupe. Cette activité n’est évidemment pas relevée dans les statistiques relatives à l’extraction du bois présentées par les concessionnaires. »



Le document en question a été publié par une équipe essentiellement constituée de scientifiques européens et dirigée par Philippe Mayaux, du Centre Commun de Recherche de la Commission Européenne en Italie. L’étude s’est focalisée sur la déforestation, définie comme un déboisement plutôt que comme une dégradation, qui est le résultat typique de l’abattage sélectif. Selon cette étude, la déforestation en Afrique centrale, en Afrique de l’ouest et à Madagascar a diminué fortement dans les années 2000 par comparaison aux années 90.






« L’Afrique a perdu 0.59 millions d’hectares de forêt tropicale annuellement entre 1990 et 2000, ce qui a baissé à 0.29 millions d’hectares par an entre 2000 et 2010, » écrivent-ils.
« Dans les trois régions, la déforestation a connu une diminution de 37% à 67% entre 2000 et 2010 par rapport à la période 1990-2000. »



« Sur la base de nos estimations, le Bassin du Congo connait un plus faible taux de déforestation que dans d’autres régions du monde à forêts tropicales. »



Les auteurs notent que si, durant la période de l’étude, on n’a pas observé de transformation à grande échelle de terrains agricoles en plantations industrielles en Afrique centrale, cela risquait de changer dans un “proche avenir”.



Dans sa réponse, Global Witness a déclaré que l’étude aurait dû être plus tournée vers l’avenir et analyser l’impact potentiel du plan visant à lever le moratoire sur de nouvelles exploitations forestières en République Démocratique du Congo et de nouveaux investissements dans les plantations d’huile de palme et autre développements agro-industriels.



« Etant donné que plus de la moitié des forêts du bassin du Congo se trouve en RDC, on aurait pu penser qu’il y aurait au moins une allusion au moratoire sur les nouvelles exploitations forestières ou le zonage multi-sectoriel devant bientôt avoir lieu. Une fois le zonage achevé et le moratoire levé, la forêt sera vraisemblablement découpée pour toutes ces activités commerciales comme l’exploitation forestière, minière et les plantations, avec un impact lourd de conséquences pour l’environnement, » a déclaré Global Witness a Mongabay.com.



« L’énorme menace émergente représentée par les plantations agricoles à grande échelle orientées vers l’export est également analysée de manière inappropriée ; l’analyse aurait pu, par exemple, détailler l’étendue des récentes et futures concessions agricoles – y compris le marché lucratif représenté par la transformation du bois – ou signaler à quel point la forêt du Congo est considérée comme favorable au développement de l’huile de palme. »




Rondins de bois de forêt tropicale au Gabon



Le décalage apparent entre les critiques de Global Witness et l’enquête qui a été menée résulte en partie de la focalisation de l’étude sur des faits passés au lieu d’être tournée vers les faits à venir. D’autres articles parus dans une édition spéciale du journal Philosophical Transactions of the Royal Society se sont plus intéressés à des questions telles que la dégradation des forêts et l’accroissement potentiel de l’exploitation forestière et agro-industrielle. Ces questions sont de grande importance car, comme l’indique Global Witness, la région est probablement sur le point de connaitre un revirement spectaculaire dans sa stratégie de développement, ce qui risque de mettre en danger le destin des forêts du Bassin du Congo.



B
Philippe Mayaux et. al. State and evolution of the African rainforests between 1990 and 2010. Phil. Trans. R. Soc. B 5 September 2013 vol. 368 no. 1625 20120300 doi: 10.1098/rstb.2012.0300 Published 22 July 2013

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