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Les satellites montrent des forêts tropicales fragmentées sensiblement plus sèches que la forêt intacte

Une nouvelle étude parue dans Biological Conservation indique que les orées et les parcelles de forêts sont plus exposées aux incendies parce qu’elles sont plus sèches que les forêts intactes. En utilisant huit ans d’imagerie satellite au dessus de l’Amazonie de l’Est, les chercheurs ont trouvé que la dessiccation (extrême sècheresse) avait pénétré les forêts dans un rayon de 1 à 3 kilomètres, dépendant du niveau de fragmentation.


« Les incendies sont l’une des plus grosses menaces pour les forêts tropicales mondiales, mais en général, les forêts vierges ne brûlent pas parce qu’elles sont trop humides. Cependant, les forêts exploitées ou les lisières de forêt peuvent brûler, » a déclaré Susan Laurance, écologiste tropicale et l’une des auteurs de l’étude, à Mongabay.com. « Nous pensons maintenant comprendre pourquoi cela se produit. Pendant la saison sèche ces forêts près des lisières s’assèchent, augmentant leur vulnérabilité aux incendies, alors que les forêts tropicales intactes, à la même période, ne s’assèchent pas. »


L’étude a également trouvé que l’âge de déforestation et la fragmentation faisait une différence. Les orées des forêts les plus jeunes sont plus sèches et donc plus enclines aux incendies que les lisières de forêts plus anciennes où de nouveaux arbres et plantes ont commencé à repousser, les protégeant peut-être des vents secs.



L’essartage en Amazonie crée des lisières de forêt, 2009. Photo de Rhett A. Butler

A la question du pourquoi les forêts fragmentées et les lisières sont plus sèches que les forêts intactes, Laurance admet : « nous ne sommes pas tout à fait surs. » Mais elle ajoute : « Nous pensons que cela pourrait provenir des nappes phréatiques et des conditions climatiques locales telle que le faible taux d’humidité, l’augmentation des vents secs, ou peut-être même le déclin de la pluviosité. »


Laurance dit que l’étude pourrait indiquer des conséquences aux orées des forêts encore plus importantes et méconnues à ce jour : « [cela] suggère que la déforestation au long de la frontière Est de l’Amazonie influence les conditions climatiques locales mais nous ne possédons pas de preuves concrètes à ce sujet et il y a si peu de stations météorologiques dans la région qu’il n’y a pas de données certaines. »


Selon une étude menée en 2008, chaque année, environ 70000 km2 (27000 miles2) de forêt dans l’Amazonie brésilienne serait dégradée par l’exploitation forestière ou transformée en lisière. Le pâturage du bétail, l’agriculture à grande échelle et l’infrastructure sont les premières causes de déforestation au Brésil.


Les auteurs ajoutent que cette étude devrait être appliquée à la réalité : « Les créateurs de ces réserves naturelles doivent prendre en compte ces effets à grande échelle, y compris la pénétration croissante des conditions de dessiccation au fil du temps, afin d’assurer que les réserves sont assez grandes pour maintenir de grands espaces fixes de forêts vierges.»


Cette nouvelle information rend aussi plus probable le fait que les orées des forêts seront affectées de façon plus négative par les changements climatiques, prolongeant ainsi la menace déjà grande pour la forêt amazonienne.


« Si le changement climatique augmente le risque de sécheresse ou seulement la saisonnalité des pluies, comme beaucoup de scientifiques le prédisent, alors de petits ou gros fragments (2000 ha) seront très exposés à la sécheresse, » explique Laurance. « Cela va provoquer beaucoup de changements tels que la perte de grands arbres, les changements dans la composition de la forêt, et finalement la perte complète de la forêt due aux incendies. C’est en fait ce qui est en train de se passer maintenant, et je vois tellement de choses arriver dans le court terme qu’il est nécessaire, à mon avis, de concentrer nos efforts sur le moment plutôt que de s’inquiéter de la situation dans 100 ans, quand il n’y aura certainement plus vraiment de forêts pour s’en inquiéter. »







CITATION: Gaël Briant, Valéry Gond, Susan G.W. Laurance. Habitat fragmentation and the desiccation of forest canopies: A case study from eastern Amazonia. Biological Conservation. 143 (2010) 2763–2769. doi:10.1016/j.biocon.2010.07.024.





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