Nouvelles de l'environnement

Les satellites pour suivre l’exploitation illégale et le trafic de bois précieux à Madagascar



Des experts en télédétection en Europe et aux États-Unis font appel à des images satellite à haute résolution pour identifier et suivre des cargaisons de bois exploités illégalement dans des parcs et réserves de forêts pluviales de Madagascar. Les images peuvent servir à confondre les négociants impliqués dans le trafic ainsi qu’à mettre la pression sur les compagnies qui utilisent les bois précieux originaires de Madagascar.







Des expéditions de bois sont suivies par satellite. Ces images satellite de GeoEye du 2 décembre 2009 d’Antalaha permettent d’identifier plusieurs dépôts de bois. Les quatre plans rapprochés d’un rayon de 100 m montrent les piles de bois. Nous remercions le Missouri Botanical Garden et Clinton Jenkins (Université du Maryland) pour la préparation des images du satellite GeoEye-1. Les images ont été estompées pour l’utilisation sur le Web.



L’exploitation illégale de bois précieux dans les parcs et réserves de Madagascar a explosé après le coup d’état de mars 2009. Le coup – qui a fait tomber le président, de plus en plus autocratique mais cependant élu démocratiquement, Marc Ravalomanana – a déclenché l’effondrement de la gouvernance qui s’est encore empirée lorsque les pays donateurs ont retiré leur aide financière. Sans financement et sous la pression de syndicats criminels opérant principalement dans la partie nord-est du pays, les gardes des parcs abandonnèrent leur poste et les exploitants illicites partirent à l’assaut de dizaines de milliers d’hectares de forêts protégées pour en sortir des centaines de millions de dollars de palissandre, bois de rose et ébènes. Les arbres débités en rondins étaient généralement transportés des zones forestières vers les ports où ils embarquèrent sur des bateaux. La plupart des cargaisons ont été transportées par des compagnies maritimes étrangères vers la Réunion ou Maurice avant d’être expédiées en Chine. Mais depuis que l’exploitation et le trafic de bois précieux sont illégaux, y compris au sein de la gouvernance déliquescente de Madagascar, une grande partie des rondins a été dissimulée dans des entrepôts ou enterrée sur des plages. Le mois dernier le « Pouvoir de Transition » conduit par Andry Rajoelina a de nouveau autorisé l’exportation de bois précieux en déclenchant une nouvelle vague de destruction. Les témoins oculaires ont rapporté « plus de 1000 » bucherons à l’œuvre dans le Parc National de Masoala et le Parc Naturel de Makira, tous deux renommés pour leur biodiversité, et des « files de camions » transportant les bois précieux jusqu’à Vohemar, l’un des principaux ports de la région. Tout montre que des centaines de conteneurs remplis de bois précieux sont prêts à être transportés de Vohemar à Toamasina, le plus grand port du pays, pour exportation.







Mais si les négociants peuvent se soustraire à la détection localement en cachant les produits de contrebande ou par la corruption, les stocks de bois, les camions ou les bateaux les transportant sont nettement visibles pour le reste du monde par la télédétection avec des images satellite de haute résolution. De sorte que les organismes et plus particulièrement celles chargées de faire appliquer la législation [internationale] sont en mesure de suivre le stockage et les mouvements des bois [exploités illicitement]. Par ailleurs de nouvelles techniques permettent de déterminer l’origine du bois grâce à sa composition chimique en offrant ainsi aux autorités des moyens d’enquête puissants pour faire respecter les lois portant sur le commerce comme la loi Lacey (Lacey Act) aux États-Unis et FLEGT (Forest Law Enforcement, Governance and Trade – Application des Réglementations forestières, Gouvernance et Échanges Commerciaux) en Europe. Ces réglementations responsabilisent les compagnies importatrices en les liant aux lois environnementales des pays producteurs même si ces derniers ne veulent pas ou ne sont pas en mesure de faire respecter leurs règles.








Dans le cas des bois précieux de Madagascar, des mesures ont déjà été prises sous la loi Lacey comme en novembre dernier lorsque les agents fédéraux des États-Unis ont procédé à des saisis chez le célèbre constructeur de guitares Gibson au Tennessee qui avait employé du bois de rose exploité illégalement à Madagascar. Au moins un des principaux négociants malgaches, Jeannot Ranjanoro, pourrait courir des risques dans la mesure où il fait des affaires sous Flavour Handling LLC qui est une société basée à Delaware. En tant que société américaine, si Flavour Handling s’avère être impliquée dans le trafic de bois précieux qui viole les lois environnementales de Madagascar, elle pourrait faire l’objet de poursuites sous la loi Lacey. Les images satellite et les signatures chimiques du bois serviraient alors de preuves.

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