- Les savoirs traditionnels vont favoriser la restauration des paysages du bassin du Congo.
- La mobilisation des jeunes, à travers des initiatives de restauration des paysages dégradés, s’avère cruciale.
- L’agroforesterie reste une solution durable pour la restauration des écosystèmes dans le bassin du Congo. Il importe de combiner les connaissances scientifiques aux savoirs autochtones pour restaurer des paysages endommagés dans la sous-région.
En prélude à la 30ᵉ conférence internationale de la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (COP 30), en novembre prochain, à Belém, au Brésil, les défenseurs de l’environnement souhaitent l’intégration d’une approche communautaire dans la restauration des paysages dégradés du bassin du Congo.
Cette mobilisation intervient au moment, où de nombreuses forêts tropicales, régulatrices du climat, dont celle du bassin du Congo, continuent de subir une destruction sans précèdent, en raison de l’activité humaine.
Les responsables du Forum mondial sur les paysages (GLF, sigle en anglais), plaident ainsi pour l’adoption des approches innovantes locales, qui favorisent la restauration des terres dégradées et développent l’agroforesterie dans cette zone critique de biodiversité.
Dans son rapport publié en 2024, l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), estime à 75 % les terres émergées de la planète, notamment des forêts, des terrains de parcours et des zones humides, qui ont été dégradées et transformées.
Les pertes économiques annuelles liées à la dégradation des écosystèmes sont comprises, selon les estimations de la FAO, entre 4 300 milliards USD et 20 200 milliards USD, et ont des répercussions néfastes sur 3,2 milliards de personnes.
Les experts observent un regain d’intérêt pour l’agroforesterie en tant que solution porteuse de transformation à la crise climatique, comme le montre son intégration, au titre de l’atténuation et de l’adaptation, dans les contributions déterminées au niveau national de 40 % des Parties non visées à l’annexe I de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques.

Des jeunes pour la gestion durable des écosystèmes forestiers
Du point de vue des responsables du Forum mondial sur les paysages, la réussite de cette mission exige d’exposer les initiatives de restauration menées avec succès par les communautés au niveau du bassin du Congo, ainsi que, les mesures incitatives et les partenariats ayant contribué à leur réussite.
« Au niveau du bassin du Congo, certaines initiatives de restauration des paysages forestiers ont réussi à associer l’écologie, les droits des hommes et des jeunes, ainsi que les pratiques de gestion des terres par les communautés », affirme Kamal Prawiranegara, Directeur du le Forum mondial sur les paysages.
Dans un entretien exclusif, Prawiranegara souligne qu’au niveau de la région du bassin du Congo, les jeunes représentent, non seulement l’avenir, mais aussi le présent de la restauration des forêts et des paysages dégradées. « Il est grand temps que leurs voix soient entendues en marge du prochain sommet sur le climat au Brésil », affirme-t-il à Mongabay.
Par exemple, le Réseau des jeunes pour la gestion durable des écosystèmes forestiers d’Afrique centrale (REJEFAC), basé au Cameroun, fait partie des initiatives en cours, qui mobilise quelques centaines des jeunes en provenance des pays du bassin du Congo autour des initiatives ambitieuses, pour restaurer leurs paysages dégradés et lutter contre la désertification.
D’après Marie Tamoifo Nkom, coordonnatrice sous régionale du REJEFAC, la jeunesse du bassin du Congo continue de se mobiliser à travers des approches ascendantes, pour générer des impacts significatifs dans la restauration des paysages dégradés. « Ces jeunes [du bassin du Congo] participent activement à la restauration des écosystèmes, mais leur accès limité au financement ne leur permet pas jusqu’ici de pérenniser ces efforts », affirme-t-elle.
Au Burundi, par exemple, l’initiative « Community of Hope » (communauté d’espoir) travaille dans l’amélioration des moyens de subsistance pour les communautés vivant autour de la forêt naturelle de Kibira, située dans le nord-ouest du pays, notamment les femmes, les jeunes et les peuples autochtones, pour limiter l’exploitation excessive des ressources naturelles dans cette région.
« Ces communautés participent aujourd’hui dans la plantation des arbres indigènes dans cette zone, parce qu’elles sont les premiers à être touchés par les conséquences de la destruction des forêts et du changement climatique », explique Schadrack Girukwishaka, chargé du Suivi-évaluation des projets pour l’ONG « Communities of Hope ».
Les activités menées focalisent également sur la plantation des arbres agroforestiers et fruitiers, ainsi que les bambous, pour protéger les berges des rivières dans la réserve naturelle de Kibira, à proximité du Parc national de Nyungwe au Rwanda. « L’objectif est de s’attaquer aux facteurs directs et indirects de la dégradation des paysages dans cette réserve naturelle », dit-il à Mongabay.

Revalorisation des savoirs traditionnels
En marge de la COP 30 au Brésil, le Forum mondial sur les paysages envisage de présenter une feuille de route, qui vise à mobiliser les acteurs du secteur privé, pour appuyer des initiatives de restauration menées par les communautés locales.
« Il est important de valoriser les connaissances autochtones développées par les communautés locales en matière de restauration des paysages marginalisés, mais cela exige un financement accru dans l’adaptation et la résilience », souligne Prawiranegara.
Les estimations de l’ONU montrent qu’en moyenne, les pays africains perdent 2 à 5 % de leur Produit intérieur brut (PIB), et nombre d’entre eux, consacrent jusqu’à 9 % de leur budget à la lutte contre les phénomènes climatiques extrêmes.
Selon l’Organisation météorologique mondiale (OMM), le coût de l’adaptation est estimé entre 30 et 50 milliards USD par an, au cours de la prochaine décennie, en Afrique subsaharienne, soit 2 à 3 % du PIB de la région.

Synergie entre connaissances autochtones et scientifiques
En misant sur l’importance des connaissances autochtones dans le bassin du Congo, le Forum mondial sur les paysages préconise d’exhorter tous les acteurs, notamment des décideurs politiques et les opérateurs du secteur privé, à se mobiliser avec des actions concrètes visant à mettre fin à la déforestation, à restaurer les capacités productives, et à utiliser les forêts et les arbres de manière durable.
À cet effet, Prawiranegara note qu’en marge de la COP 30, il sera également question de démontrer que les communautés locales dans des zones à haut risque de biodiversité, comme le bassin du Congo, détiennent la solution de la restauration des forêts et des paysages. « Maintenant que la COP30 va se dérouler à nouveau au Brésil, les Conventions de Rio y ont été élaborées. Nous cherchons activement à créer des synergies et à intégrer ces trois conventions sur le climat, la biodiversité et la dégradation des forêts », dit-il à Mongabay.
Toujours en marge cette COP30, les responsables du Forum mondial sur les paysages envisagent également de lancer une plateforme visant à combiner les connaissances scientifiques aux savoirs autochtones, en vue de créer des programmes d’apprentissage, qui pourraient servir de cursus au niveau des universités africaines.
Selon Prawiranegara, la mise en synergie de ces connaissances s’avère cruciale à travers des initiatives de restauration des paysages du bassin du Congo.
Cette zone est la deuxième forêt tropicale au monde, après l’Amazonie. Il s’agit d’un domaine de 228 millions d’hectares, s’étendant en grande partie sur la République du Congo, le Cameroun, la République centrafricaine, la Guinée équatoriale, la République Démocratique du Congo, le Gabon, le Rwanda et le Burundi.
Le Forum mondial sur les paysages entend engager des actions en direction des communautés autochtones autour des initiatives permettant une gestion durable des forêts de la sous-région. « La gestion des savoirs et pratiques traditionnels et locaux dans l’aménagement des terres agricoles, ainsi que la réintroduction d’espèces sauvages, restent capitales », affirme Prawiranegara.
Image de bannière : Déforestation près de Yangambi, RDC. Image d’Axel Fassio/CIFOR via Flickr (CC BY-NC-ND 2.0).
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