- Le Fonds mondial pour la nature (WWF) présente dans un rapport la découverte d’une nouvelle espèce de singe en RDC, de deux nouvelles espèces d’oiseaux au Congo et en Guinée, ainsi que la première espèce de luciole de la République centrafricaine.
- Le poisson Teleogramma obamaorum, découvert au Congo, a été nommé en l’honneur de l’ancien Président américain Barack Obama et de la Première dame Michelle Obama, en reconnaissance de leur engagement en faveur de la conservation scientifique et du développement en Afrique et à l’étranger.
- Le rapport met en évidence les menaces pesant sur cette biodiversité, notamment la déforestation et le changement climatique, appelant à des efforts concertés pour protéger cet écosystème vital qui soutient plus de 75 millions de personnes.
De nouvelles espèces d’orchidées, un nouveau singe, la première espèce de luciole de la République centrafricaine, des poissons-chats à respiration aérienne, des chauves-souris, des serpents aveugles, des grenouilles en danger, deux nouvelles espèces d’oiseaux et même un poisson nommé en l’honneur de l’ancien président américain Barack Obama. Ainsi se présentent les nouvelles espèces de plantes et d’animaux découvertes et documentées dans la région du bassin du Congo en Afrique centrale, entre 2013 et 2023, par divers scientifiques issus de plusieurs institutions de recherche et universités, de musées, d’organisations gouvernementales et non gouvernementales, d’organisations de conservation, ainsi que des experts du WWF.
Concrètement, il s’agit en tout de 430 plantes, 140 invertébrés, 96 poissons, 22 amphibiens, 42 reptiles, 2 oiseaux et 10 mammifères. Au Cameroun, 238 espèces ont été trouvées, 25 en République centrafricaine, 259 en République démocratique du Congo (RDC), 59 en Guinée équatoriale, 262 au Gabon et 65 en République du Congo.
Les 742 espèces découvertes dans le bassin du Congo ont été présentées dans le rapport intitulé « Une nouvelle vie dans le bassin du Congo : une décennie de découvertes d’espèces (2013-2023) », publié en décembre 2024, par le Fonds mondial pour la nature (WWF). Au passage, il faut signaler que beaucoup de ces espèces, bien que formellement identifiées et documentées pour la première fois dans la littérature scientifique, étaient déjà connues des communautés locales depuis des générations.
« Une des plus grandes découvertes scientifiques récentes est celle du Lesula (Cercopithecus lomamiensis), un singe découvert en 2012 dans le bassin de la Lomami, en RDC, ayant des yeux comme ceux d’un humain et des fesses bleues. C’est la deuxième nouvelle espèce de singe africain identifiée depuis 1984 », a expliqué Jaap Van Der Waarde, Responsable de la Conservation pour le bassin du Congo à WWF International, au cours du webinaire de présentation du rapport.
« Comme de nombreuses espèces du bassin du Congo, le lesula est vulnérable à la chasse pour la viande de brousse. La découverte initiale du singe a été effectuée sur un individu en captivité, mettant en évidence les menaces potentielles auxquelles ils font face. Protéger cette espèce pourrait s’avérer difficile, car les espèces ayant une si petite aire de répartition peuvent passer de vulnérables à gravement menacées en quelques années », souligne le rapport.
En 2022, une nouvelle espèce de luciole, Afrodiaphanes pulcher, a été enregistrée dans un système de grottes dans la préfecture de Nana-Grébizi, à 550 m d’altitude, en République Centrafricaine. Cette espèce de 17 mm de long, a été nommée Pulcher, d’après le mot latin signifiant « beau » ou « gracieux ».
L’autre nouvelle espèce, est un poisson de la famille des cichlidés, originaire du fleuve Congo et unique parmi le genre, en raison de l’absence de différences de couleur entre les sexes au niveau des nageoires caudales. Les individus peuvent atteindre jusqu’à 75 mm (3,0 pouces) de long et sont des molluscivores, se nourrissant principalement d’escargots.
Cette espèce a été décrite en 2015 et nommée Teleogramma obamaorum en l’honneur de l’ancien Président américain Barack Obama et de la Première dame Michelle Obama, en reconnaissance de leur engagement en faveur de la conservation scientifique et du développement en Afrique et à l’étranger.
Le changement climatique, la pollution et la surexploitation menacent ces stocks de poissons et l’avenir de la pêche, dit le rapport.
Parmi toutes les nouvelles espèces de reptiles, la plus significative est sans doute le crocodile à museau fin d’Afrique centrale (Mecistops leptorhynchus), décrit comme une nouvelle espèce par les scientifiques en 2018. Dans la région du bassin du Congo, ce crocodile peut être trouvé au Cameroun, en Guinée équatoriale, au Gabon, au nord de l’Angola, en République centrafricaine, en République du Congo et en République démocratique du Congo.
Initialement considéré comme étant de la même espèce que le crocodile à museau fin d’Afrique de l’Ouest (Mecistops cataphractus), des études et des analyses minutieuses de séquençage moléculaire ont révélé qu’il s’agissait d’une espèce nouvelle.
Le rapport mentionne la découverte de deux nouvelles espèces d’oiseaux. Le Robin des forêts de Rudder (Stiphrornis rudderi), provenant de la réserve forestière de Yoko, dans le district d’Ubundu, à l’Est de la RDC, a été découvert au cours d’une expédition en 2009. Cette espèce est brune avec une gorge et une poitrine jaune-orange. Sa répartition actuelle connue est limitée à seulement deux localités près de la ville de Kisangani, en RDC : la réserve forestière de Yoko, sur le côté sud du fleuve Congo et la localité de Turumbu, sur le côté nord du même cours d’eau.
Otus bikegila ou la chouette Scops de Príncipe, une nouvelle espèce de chouette Scops, découverte en 2022 dans le parc naturel de Príncipe Obô sur l’île qui porte le même nom, en Guinée Equatoriale, est la deuxième espèce d’oiseau découverte. La chouette Scops de Príncipe est de petite taille, avec des touffes d’oreilles distinctives, un disque facial, des ailes courtes et arrondies et une courte queue. Elle habite des grands arbres, où elle se nourrit d’insectes. Les chercheurs disent qu’elle a un cri distinctif ressemblant à celui d’un chat. L’espèce est considérée comme peu nombreuse et n’habite que les forêts de cette petite zone protégée. En conséquence, les scientifiques ont demandé à l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) de déclarer l’espèce comme critiquement en danger.
Pr Eric Fokam, chef du département de Biologie animale et conservation à l’université de Buéa (Cameroun), indique qu’il n’est pas surpris par les découvertes mentionnées dans ce rapport, tant le potentiel d’espèces encore à découvrir est grand. « D’une manière globale, en ce moment, l’humanité connaît environ deux millions d’espèces qui sont existantes, mais les estimations conservationnistes disent qu’il y aurait encore entre 6 et 8 millions de nouvelles espèces qui existent, mais qui n’ont pas encore été formellement décrites et nommées par les scientifiques. Parmi les groupes charismatiques, c’est-à-dire les grands mammifères, les oiseaux, les groupes d’animaux assez visibles ou voyants de par leur couleur, par exemple, les chances d’avoir de nouvelles espèces sont de plus en plus maigres. Mais, pour tout ce qui vit dans la litière, dans le sol, il y a encore probablement des dizaines de milliers d’espèces qu’on peut décrire », dit-il à Mongabay.
La protection et le financement: des enjeux majeurs
Le rapport souligne que le bassin du Congo représente l’une des zones sauvages les plus importantes restantes sur terre et contient un total impressionnant de 18 écorégions terrestres, 20 écorégions d’eau douce et une écorégion marine. Il fournit de la nourriture, des médicaments, de l’eau, des matériaux et des abris à plus de 75 millions de personnes. Pour préserver ce patrimoine naturel, WWF recommande, entre autres actions, d’intensifier la conservation, avec des financements et des ressources accrus alloués aux zones protégées par les principaux acteurs. Cette organisation demande aussi de reconnaître le rôle significatif du bassin du Congo en tant que puits de carbone.
En réduisant les empreintes carbones, il contribue aux efforts mondiaux pour lutter contre le changement climatique, ce qui, en retour, aide à préserver la forêt tropicale.
Le directeur régional du WWF pour le bassin du Congo, Dr Martin Kabaluapa, souligne l’importance d’une action collective. « Ces espèces, souvent endémiques à des régions limitées, sont vulnérables en raison de leur rareté et de leur dépendance à des habitats spécifiques, maintenant menacés. Elles font face à de nombreuses menaces, notamment la déforestation, le braconnage et la conversion de la forêt pour l’agriculture. La perte d’habitats, causée par l’exploitation forestière et l’agriculture intensive est une menace majeure pour la biodiversité de cette région », dit-il par courriel à Mongabay.
« La conservation passe par des aires protégées renforcées, comme les parcs nationaux de Salonga en RDC, Ntokou Pikounda en République du Congo, Gamba au Gabon, Lobeke au Cameroun et Dzanga Sangha en RCA dans le bassin du Congo, et des programmes communautaires de sensibilisation. Le renforcement des lois contre le braconnage, la restauration des habitats et la recherche scientifique sont essentiels. En collaborant avec les communautés locales et en intégrant leurs connaissances, il est possible de garantir la protection durable des espèces et de leurs écosystèmes. Nous devons unir nos efforts pour assurer la sécurité maximale de ces espèces, dans l’intérêt de la nature et de l’humanité », préconise Kabaluapa.
« Avec les techniques de recherche qui s’améliorent et la capacité de l’homme d’aller explorer les endroits où il n’allait pas, tels que la cime des arbres et autres, il est très certain qu’on aura encore des milliers de découvertes. Cependant, il y a un très grand déficit d’experts pour pouvoir les découvrir et, d’une manière globale, les financements pour les expéditions d’histoire naturelle se sont beaucoup amenuisés », conclut Fokam.
Image de bannière : La tortue casquée africaine (Pelomedusa schweinfurthi) est une petite espèce de couleur foncée avec une carapace brune, que l’on trouve dans les rivières, les lacs et les marécages de la République centrafricaine. Nommée d’après l’explorateur Georg August Schweinfurth, cette tortue omnivore se nourrit d’invertébrés aquatiques, de petits poissons et de végétation, marquant la 23e espèce de son genre. Image de Charles J. Sharp.
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