- La hausse des températures reste la cause majeure d’un nombre croissant d’extinctions des espèces menacées, notamment en Afrique.
- Si les températures mondiales actuelles sont supérieures à 1,3 °C aux niveaux préindustriels, 1,6 % des espèces devraient être menacées d’extinction.
- Parmi les facteurs plus importants impliqués dans la perte actuelle de la biodiversité au niveau du bassin du Congo, il y a essentiellement les transformations des habitats, suivies par les changements climatiques.
Une nouvelle étude vient de révéler comment la hausse des températures, due au changement climatique, a un impact significatif sur le déclin actuel des espèces menacées d’extinctions dans certaines parties de l’Afrique.
L’étude, publiée ce mois, dans la revue Sciences de l’Association américaine pour l’avancement des sciences (AAAS, sigle en anglais), vise à fournir aux décideurs et aux innovateurs des informations pour prendre des dispositions dans la conservation des espèces menacées en vue de maintenir l’équilibre écologique, notamment en Afrique sub-saharienne.
Le réchauffement climatique, selon des méta-analyses d’essais randomisés sur données individuelles sur un groupe d’espèces étudiées, se traduit notamment par l’extinction d’espèces emblématiques à l’échelle mondiale, avec 1,6 % des espèces menacées à 1,3 °C de température et des risques augmentant à 29,7 %, à 5,4 °C.
« Pour l’Afrique, les risques d’extinction augmenteront avec la hausse des températures, et les risques varient de 8 à 17 % des espèces menacées d’extinction, l’Afrique du Nord étant confrontée aux risques les plus élevés », souligne Dr Mark Urban, biologiste et professeur associé en écologie et biologie évolutive à l’université du Connecticut et auteur de l’étude.
Sur une période de 10 ans, Dr Urban a constaté que la hausse des températures reste la cause majeure d’un nombre croissant d’extinctions des espèces menacées, la forte hausse de la température conduisant à l’extinction de près d’un tiers des espèces sur le plan global.
« Le bassin du Congo reste une zone suscitant un intérêt particulier pour cette recherche », a dit Dr Urban à Mongabay.
L’analyse suggère que les risques d’extinction, pour les espèces les plus menacées augmenteront par rapport aux évaluations précédentes.
« Les décideurs ne devraient plus ignorer cet impact et devraient trouver des solutions pour réduire immédiatement les émissions de gaz à effet de serre », a préconisé Dr Urban.
Les récentes estimations de l’Union internationale pour la conservation de la nature (IUCN) montrent que l’Afrique est le deuxième continent en termes de biodiversité avec quelques 15,643 espèces d’animaux comptabilisées. Au moins 19 % de la faune africaine est considérée comme menacée, là où parmi ces 2 970 espèces en voie de disparition, 555 sont « en danger critique d’extinction » et 1 029 sont « en danger », selon l’IUCN.
Les résultats de cette nouvelle étude montrent que si les températures mondiales actuelles sont supérieures à 1,3 °C aux niveaux préindustriels, 1,6 % des espèces devraient être menacées d’extinction.
Menaces avérées
Les chercheurs sont persuadés que si les températures atteignent 1,5 °C (objectif de l’Accord de Paris), les risques d’extinction augmentent à 1,8 %, puis à 2,7 % si les températures atteignent 2,0 °C.
L’Accord de Paris, signé en 2015, contraint les signataires à agir dans la lutte contre le réchauffement climatique et fixe la limite de la hausse de la température globale à “bien moins de 2°C” d’ici à 2100 ; il enjoint les États à poursuivre les efforts en direction des +1,5 °C.
Compte tenu de la tendance actuelle avec le réchauffement climatique, l’auteur de cette étude estime qu’au fur et à mesure que les espèces se déplacent ou se reproduisent ou diminuent en nombre sous l’effet, notamment du changement climatique, il est probable que la composition des espèces change dans certains points chauds de la biodiversité comme le bassin du Congo.
«En Afrique, le changement climatique devrait avoir un impact négatif sur plusieurs zones riches en biodiversité comme le bassin du Congo », affirme Dr Urban.
Parmi les autres facteurs les plus importants impliqués dans la perte actuelle de la biodiversité dans cette région, il y a essentiellement les transformations des habitats, suivies par les changements climatiques, la pollution atmosphérique.
Evaluation du risque d’extinction
Selon une synthèse de 485 études réalisées au cours des dix dernières années, la hausse des températures la plus élevée menacerait environ un tiers des espèces, notamment au niveau des zones critiques de biodiversité en Afrique: amphibiens, espèces des écosystèmes de montagne, d’îles et des eaux douces.
Moses Imani, chercheur dans le domaine de la biodiversité et chef de bureau provincial à Kindu dans la province du Maniema, en République démocratique du Congo (RDC), estime qu’au niveau du bassin du Congo, il serait souhaitable qu’il y ait une forte mobilisation et sensibilisation des scientifiques pour mener des réflexions sur l’état des lieux et la survie de la biodiversité, compte tenu de l’ampleur des phénomènes de sècheresses.
« La déforestation constitue un impact négatif sur de nombreuses espèces jusqu’ici menacées avec, notamment, les risques de sècheresse et l’augmentation de la température », dit-il à Mongabay.
Dans un récent rapport, le Centre de recherche forestière internationale et le Centre international de recherche en agroforesterie (CIFOR-ICRAF) estime qu’au cours des 20 dernières années, la région du bassin du Congo est devenue plus chaude, mais aussi la durée et l’intensité de la saison des pluies sont plus irrégulières.
« Certes, la majeure partie du continent africain sera confrontée à des risques correspondant à ces moyennes mondiales, à l’exception de l’Afrique du Nord qui se caractérise par des risques d’extinction élevés », dit Dr Urban.
Selon lui, les espèces des écosystèmes de montagne, d’île et des eaux sont les plus exposées aux risques d’extinction plus élevés en Afrique centrale.
Image de bannière : Le rhinocéros noir est l’une des espèces les plus emblématiques d’Afrique, mais aussi l’une des plus menacées. Malgré les efforts de conservations, il reste victime de braconnage et de la perte de son habitat. Il est en danger critique d’extinction selon l’UICN avec environ 5 500 individus à l’état sauvage (2023). Image de Martin Diepeveen via Flickr (CC BY-NC-ND 2.0).
Citation :
Urban C. M. (2024). Climate change extinctions. Science, 386, 1123-1128. https://doi.org/10.1126/science.adp4461
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