- Dans la région semi-aride du nord du Ghana, une ONG aide les communautés agricoles à faire face à une série de défis, grâce à des initiatives basées sur les connaissances autochtones, qui mettent l'accent sur les droits sociaux et les droits de l'homme.
- Regional Advisory Information and Network Systems (RAINS) soutient les pratiques agricoles régénératrices auprès des agriculteurs locaux, notamment la culture intercalaire, la culture de couverture et l'utilisation de semences traditionnelles, de compost et de fumier.
- L'organisation fait également participer des groupes habituellement marginalisés, tels que les femmes et les jeunes, à la planification de l'utilisation des terres au niveau communautaire, et s'attaque aux inégalités de genre, en permettant aux femmes d'accéder plus facilement à des systèmes d'épargne et de microcrédit.
- Les personnes travaillant avec l'ONG affirment, que ses efforts ont eu un impact significatif sur l'amélioration de la sécurité alimentaire et la réduction des incendies, et espèrent qu'elle continuera à apporter son soutien.
Dans le nord du Ghana, les communautés sont confrontées à l’insécurité alimentaire et au déclin de leurs moyens de subsistance en raison de conditions météorologiques irrégulières, de la dégradation des sols et de la disparition des forêts. L’ONG Regional Advisory Information and Network Systems (RAINS) figure parmi les acteurs, qui s’efforcent de faire face à cette situation complexe, dans la Zone de la Savane.
La Zone de la Savane s’étend sur 97 000 kilomètres carrés dans le nord du Ghana, et on y cultive depuis longtemps le maïs, le millet, l’igname, l’arachide et le soja, dans un paysage, où dominent l’amande de karité, le baobab et l’acacia. Cet écosystème semi-aride, qui abrite aujourd’hui plus de 5 millions de personnes, voit son équilibre écologique menacé. En effet, le couvert forestier y a diminué de 77 % entre 2001 et 2015, selon le Programme des Nations unies pour le développement.
« Au Ghana, de nombreuses évidences indiquent, que les températures dans toutes les zones écologiques, y compris dans la région du Nord, augmentent, alors que les niveaux ainsi que les régimes de précipitations ont généralement diminué, et sont de plus en plus irréguliers », a déclaré Hardi Tijani, directeur exécutif de RAINS, à Mongabay par courrier électronique. « La dégradation et l’érosion des sols dues à l’alternance d’inondations et de sécheresses conduisent à une désertification croissante ».
Il a déclaré que ces changements ont affecté les récoltes des habitants, incitant ces derniers à abattre des arbres pour le bois et le charbon, afin de gagner un revenu supplémentaire, ce qui aggrave les dommages causés au paysage.
Afin de contrer les menaces et conduire au changement, RAINS explique et promeut les pratiques agricoles régénératrices aux agriculteurs de toute la région, notamment la culture intercalaire, la plantation de couverture et l’utilisation de semences traditionnelles, de compost et de fumier à la place d’engrais synthétiques.
Selon Tijani, RAINS se base sur les connaissances et les pratiques agricoles autochtones, que les agriculteurs des communautés situées autour de la capitale régionale, Tamale, où l’ONG est implantée, connaissent déjà.
« Nous sommes convaincus qu’il s’agit de solutions naturelles, qui contribuent à l’amélioration et à l’adaptation des actions des communautés », a-t-il affirmé.
RAINS place les droits sociaux et les droits de l’homme au cœur de son programme. Son personnel aide les autorités locales et traditionnelles à élaborer des plans d’utilisation des terres communautaires, en veillant tout particulièrement à impliquer les personnes handicapées, les femmes, les jeunes, les enfants et les membres des groupes ethniques minoritaires dans un processus participatif, qui rassemble les membres de la communauté, afin d’identifier et de délimiter les terres détenues collectivement en vue de leur protection.
Une fois élaborés, ces plans d’utilisation des terres sont appliqués, par des comités locaux composés de représentants faisant partie de groupes souvent défavorisés tels que les femmes et les jeunes, avec le soutien des autorités traditionnelles.
Tijani a déclaré que ce processus de planification tient compte des politiques et des priorités de développement national.
« Le dialogue avec les communautés nous permet de comprendre ce qui est important pour elles et nous permet de les mettre en contact avec les ressources, dont elles ont besoin pour relever les défis liés au paysage. De plus, nous collaborons avec les acteurs étatiques et non étatiques concernés, pour remplir collectivement notre mandat, car nous pensons davantage au maintien de nos résultats, au-delà du soutien et du financement des donateurs », a-t-il indiqué.
RAINS a signé un partenariat de deux ans avec le Forum mondial sur les paysages, une plateforme créée pour soutenir la protection de la biodiversité, la sécurité alimentaire et l’utilisation durable des ressources naturelles au niveau du paysage. Le financement de ce partenariat permet de soutenir des initiatives allant de la plantation d’arbres à la formation des agriculteurs, etc.
Tijani a déclaré que la pauvreté généralisée entravait la capacité des femmes, en particulier, à s’adapter à l’évolution de leur environnement.
« L’abattage d’arbres de grande valeur économique, tels que le karité, en raison du changement climatique, fait perdre beaucoup d’argent aux femmes », a-t-il déclaré. Les karités sont les piliers écologiques et économiques de cette région. Ils produisent des noix, que les femmes transforment en un beurre très prisé, ainsi que des amandes qui peuvent être utilisées comme combustible.
« Le changement climatique réduit même les possibilités pour les femmes de posséder des terres pour leurs activités agricoles. De plus en plus d’agriculteurs masculins demandent à déplacer leurs exploitations vers des terres, qu’ils jugent plus fertiles, afin de réduire l’impact des faibles pluies sur leurs récoltes », a déclaré Tijani.
RAINS aide les femmes à mettre en place des systèmes d’épargne et à accéder à des microcrédits, afin de lutter contre l’inégalité de genre, en améliorant l’accès des femmes aux ressources productives.
Tijani a constaté, que la pauvreté oblige de nombreuses familles de la Zone de la Savane à faire travailler leurs enfants, les privant ainsi d’une éducation et les exposant à des risques.
« RAINS a donc instauré des mesures de protection, afin d’améliorer la qualité de vie des enfants dans les communautés agricoles en renforçant l’accès à une éducation de qualité et en veillant à ce qu’ils prennent conscience de leurs droits et de leurs responsabilités », a-t-il expliqué à Mongabay par courrier électronique. L’ONG a réuni des travailleurs sociaux, la police et les structures communautaires, pour mettre en place des mécanismes de signalement des cas de maltraitance et d’exploitation.
Sumani Ibrahim est vulgarisateur agricole dans la municipalité de Savelugu, l’une des régions où RAINS travaille. Il affirme que les efforts de l’ONG ont eu un impact significatif sur la sécurité alimentaire. Les informations météorologiques fournies par RAINS ont notamment aidé les agriculteurs à mieux planifier leurs activités agricoles.
Ibrahim craint que la courte durée du projet ne réduise son efficacité.
« Le projet a aidé les agriculteurs de la municipalité de Savelugu et j’espère que le GLFx ainsi que les autres partenaires continueront à soutenir RAINS, car le taux de participation aux activités du projet sera plus important, si sa durée de vie peut être prolongée », a-t-il déclaré.
Tijani dit espérer qu’avec plus de soutien et de partenariats, RAINS serait en mesure d’élargir la portée de ses programmes. « Au cours des dix prochaines années, nous souhaitons orienter davantage nos activités dans les domaines de l’entrepreneuriat et de l’employabilité des jeunes, de l’agro-industrie, de la conservation, de la restauration et de l’écologisation chez les jeunes, ainsi que de la gestion de l’égalité de genre et de l’équité ».
Équité et durabilité : agir pour restaurer les paysages africains
Le réseau auquel appartient RAINS, GLFx, est un ensemble d’initiatives indépendantes, orientées vers les communautés, qui travaillent à la transformation de leurs paysages et plaident en faveur d’une politique plus soutenue. Le réseau, un projet du Forum mondial sur les paysages, vise à stimuler les acteurs locaux en leur fournissant des connaissances, des outils et des contacts, qui leur permettent d’obtenir des résultats durables.
En savoir plus sur le travail des autres membres du GLFx : au Cameroun, la restauration des forêts et des sources d’eau offre des solutions durables et le groupe de Sierra Leone aide les agriculteurs à s’adapter au changement climatique et à protéger les forêts.
Image de bannière : Des femmes triant des noix de karité dans le district de Kassena Nankana, Ghana. Image d’Axel Fassio/CIFOR via Flickr (CC BY-NC-ND 2.0).
Cet article a été publié initialement ici en anglais le 16 octobre, 2024.