- Le Parc national Nouabalé-Ndoki situé au nord de la République du Congo, lance l’initiative Hifor pour une conservation durable.
- Ce parc reconnu mondialement pour son intégrité écologique, devient un modèle de préservation des forêts tropicales et de la faune sauvage.
- L’initiative Hifor, soutenue par la Task Force Carbone Forestier du Congo, vise à combler le déficit de financement pour les forêts à haute intégrité. En intégrant ainsi des pratiques économiques durables, le projet promet de renforcer les efforts de conservation tout en soutenant les communautés locales.
Le Parc national Nouabalé-Ndoki, joyau de la biodiversité situé au nord de la République du Congo, est une référence en matière de préservation des forêts tropicales et de la faune sauvage. Il est devenu le premier site au monde reconnu pour son intégrité écologique selon les standards mondiaux des zones clés pour la biodiversité , un projet entériné par la Task Force Carbone Forestier de la République du Congo, en août dernier, à Brazzaville. En effet, le ministère de l’Économie forestière, en partenariat avec la Wildlife Conservation Society (WCS), a lancé, récemment à Brazzaville, l’initiative Hifor, un plan d’investissement pour les forêts à haute intégrité dans le Parc national de Nouabalé-Ndoki visant à renforcer les efforts de conservation tout en intégrant des pratiques économiques durables dans la gestion de cet espace protégé.
L’objectif poursuivi est de combler le déficit de financement pour les forêts à haute intégrité, notamment pour le cas du projet pilote concernant le Parc national Nouabalé-Ndoki. « L’initiative Hifor est un programme de paiement pour services écosystémiques visant à encourager le maintien de la régulation du climat et la conservation de la biodiversité dans les forêts tropicales à haute intégrité, en fournissant un financement à long terme aux gestionnaires des forêts », a déclaré madame Rosalie Matondo, ministre de l’Économie forestière, lors du lancement, le 30 aout dernier.
L’initiative Hifor repose sur trois piliers : la conservation de la biodiversité, la gestion durable des ressources forestières et la participation des communautés locales.
Elle vise à canaliser les financements vers les forêts tropicales à haute intégrité à travers les unités Hifor, qui sont des unités négociables et qui ont un certain nombre d’avantages en termes de climat et de biodiversité ; ce qui va permettre aux entreprises de faire des déclarations certifiées et vérifiées sur leurs contributions en matière de protection des forêts et conservation de la biodiversité.
Selon WCS, ce programme intègre des technologies de pointe, telles que la surveillance par drones et l’intelligence artificielle, pour mieux suivre les mouvements de la faune et détecter les activités illégales. En outre, le projet prévoit des activités génératrices de revenus pour les populations vivant autour du parc, notamment à travers la promotion de l’agroforesterie et de l’écotourisme.
Dan Zarin est le Directeur Exécutif du Programme sur les Forêts et le Changement climatique au sein de la WCS. Il affirme, dans un courriel à Mongabay, que le mécanisme Hifor permet aux sites, qui conservent avec succès de grands blocs de forêts à haute intégrité de produire des certificats, soumis à un audit indépendant, qui quantifient les zones conservées et leurs attributs. « Il est prévu que le revenu net généré par la vente des certificats soit partagé entre le gouvernement national, les coûts de gestion du parc, les populations autochtones et les communautés locales. Il est important de noter que ces certificats ne peuvent pas être utilisés pour compenser tout impact causé par les acheteurs dans d’autres lieux. », a-t-il dit à Mongabay.
Pour Zarin « le Parc national Nouabalé-Ndoki abrite l’une des communautés d’espèces les plus diverses et les plus intactes de la forêt tropicale en Afrique centrale, y compris des populations importantes et saines d’éléphants de forêt, de gorilles des plaines de l’Ouest et de chimpanzés. La forêt stocke d’énormes quantités de carbone et constitue un puits actif, éliminant des millions de tonnes de CO2 de l’atmosphère. Tous ces services sont menacés si la forêt n’est pas conservée avec succès », ajoute-t-il.
Joint au téléphone par Mongabay, l’expert en Environnement, climat et développement durable, Félicien Okamba Esseke souligne, quant à lui, l’importance de ne pas juger l’initiative avant qu’elle ait eu l’opportunité de démontrer son plein potentiel. « WCS est partenaire de longue date du Congo, Il apporte une initiative qui allonge la source des financements ; il est sage d’expérimenter l’idée et de l’évaluer après, le Congo n’a-t-il pas été le premier pays à cloner les eucalyptus au monde », dit-il. « Les idées du projet pilote Hifor du Parc national Nouabalé-Ndoki entrent dans le canevas du Congo en matière de protection de l’environnement. Evaluer ce projet sur de simples idées serait hasardeux », dit Okamba.
Il souligne également que l’efficacité des nouvelles technologies, bien qu’indispensable, dépendra de la formation des équipes locales et de la maintenance des équipements, ce qui pourrait constituer un défi à long terme dans une région aussi reculée.
Défis de conservation des forêts et des écosystèmes associés
Le cœur de l’initiative Hifor réside dans sa capacité à équilibrer les retombées économiques et écologiques. En diversifiant les sources de revenus des communautés locales, le projet espère réduire la pression sur les ressources naturelles du parc.
Le ministère de l’Économie forestière assure que toutes les mesures nécessaires seront prises pour la réussite du projet. « Ce projet marque une étape très importante dans le développement des mécanismes financiers innovants permettant à notre pays de tirer le meilleur parti de ses efforts de conservation des forêts et écosystèmes associés », a affirmé la ministre Matondo.
Parmi les défis soulevés pour justifier la mise en place de cette initiative, on peut citer « le braconnage des espèces sauvages, la pêche illégale et l’exploitation forestière illégale. Le paysage environnant est également de plus en plus menacé par la déforestation, les incendies et d’autres pressions », a expliqué Richard Malonga, Directeur National de WCS Congo.
Et malgré ces défis soulevés, l’initiative Hifor pourrait bien représenter un tournant dans la gestion des aires protégées en Afrique centrale. Si les promesses du plan Hifor sont tenues, Nouabalé-Ndoki pourrait devenir un modèle pour d’autres pays de la région en quête de solutions pour conjuguer développement durable et préservation de la biodiversité. « Les communautés locales sont déjà activement impliquées et nous nous attendons à ce que le projet HIFOR permette d’étendre cette implication. Le système HIFOR exige que tous les projets développent un mécanisme transparent de distribution des bénéfices, avec le consentement libre, préalable et informé des peuples autochtones et des communautés locales. Ce processus de conception a commencé pour le projet pilote du Parc national de Nouabalé-Ndoki », dit Malonga.
Le lancement de cette initiative procède du Mémorandum d’entente signé le 4 décembre 2023 à Dubaï, aux Émirats arabes unis, entre la Wildlife Conservation Society (WCS) et le ministère de l’Économie forestière de la République du Congo, en marge de la COP28.
Pour rappel, le Parc Nouabalé-Ndoki qui est le pilote de cette initiative, situé dans le département de la Sangha, a été créé en 1993. Il existe d’autres forêts similaires, selon la WCS, qui est en train d’évaluer l’étendue de ces forêts à haute intégrité dans trois pays du bassin du Congo (Congo, RDC et Gabon). Des forêts à haute intégrité qui jouent un rôle essentiel dans l’atténuation du climat, à la fois en tant que vaste réserve de carbone et en tant que puits actif. « Les forêts à haute intégrité du monde entier emmagasinent environ 30 % des émissions de carbone de l’humanité, grâce à ce processus, et si nous n’investissons pas dans le maintien de ce service essentiel, il diminuera, ce qui accélérera le changement climatique et la perte de biodiversité », a dit Zarin.
Ce projet pourrait être étendu à d’autres zones à haute intégrité après audit de cette première expérience. L’initiative Hifor est porteuse d’espoir pour le Parc national Nouabalé-Ndoki, mais il reste à voir si elle tiendra ses promesses tout en préservant l’équilibre délicat entre économie et écologie.
Image de bannière: Il est attendu davantage une implication des communautés locales à l’image de celles de Bomassa, porte d’entrée du Parc national de Nouabalé-Ndoki , en République du Congo dans le projet HIFOR. Image de S. Ramsay avec l’aimable autorisation de Wildlife Conservation Society (WCS).
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