Nouvelles de l'environnement

La saisie de 15 primates à l’aéroport international de Goma en RDC suscite des inquiétudes

Plusieurs sources contactées par Mongabay démentent l’information de fraude et de trafic mais expliquent qu’il s’agit d’un transfert légal des singes et évoquent une erreur de communication entre les services de l’Etat, qui auraient été mis au parfum de l’opération de transfert des primates du Sankuru vers le sanctuaire de Jeunes animaux confisqués de Katanga. Image de Séraphin Nteko Lombole, Chef de Division provinciale de l'Environnement à Sankuru avec son aimable autorisation.

Plusieurs sources contactées par Mongabay démentent l’information de fraude et de trafic mais expliquent qu’il s’agit d’un transfert légal des singes et évoquent une erreur de communication entre les services de l’Etat, qui auraient été mis eau parfum de l’opération de transfert des primates du Sankuru vers le sanctuaire de Jeunes animaux confisqués de Katanga. Image de Séraphin Nteko Lombole, Chef de Division provinciale de l'Environnement à Sankuru avec son aimable autorisation.

  • Alors qu'une menace plane de plus en plus sur les populations simiesques, la République démocratique du Congo RDC) continue d'enregistrer des trafics illégaux de ces espèces.
  • Une quinzaine de primates ont été saisis le mercredi 21 août dernier, à l'aéroport international de Goma dans une cargaison.
  • L'Institut congolais pour la conservation de la nature (ICCN) souligne que ces espèces saisies sont totalement ou partiellement protégées par la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction.
  • En RDC, toute détention ou transport des espèces de faune et de flore sauvages vivants, de leurs peaux ou d’autres dépouilles, est sanctionné par la loi. Ceux qui sont impliqués dans le transport de ces animaux nient toute infraction et chargent l'ICCN d'avoir été préalablement saisi sur cette opération.

Une cargaison contenant 15 primates a été saisie, le mercredi 21 août 2024, à l’aéroport international de Goma, capitale de la province du Nord-Kivu, dans l’Est de la République démocratique du Congo (RDC).

D’après l’Institut congolais pour la conservation de la nature (ICCN), cette cargaison est venue de la province de Sankuru, une région située en plein cœur de la RDC.

Dans un communiqué de presse, publié le 21 août 2024 et signé par Yves Milan Ngangay, Directeur général de l’ICCN, cette saisie constitue une « infraction » au regard de l’article 71, alinéa 2 de la loi 14/003 du 11 février 2014 relative à la conservation de la nature.

L’ICCN souligne que l’ensemble de ces saisies est totalement ou partiellement protégé par la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction.

La loi sur la conservation de la nature promulguée en 2014 punit, d’un an à trois ans et d’une amende de cent mille à un million cinq cent mille francs congolais, (soit entre 35 et 527 USD) toute personne, qui « détient ou transporte des espèces de faune et de flore sauvages vivantes, leurs peaux ou autres dépouilles ».

Des caisses en fer contenant des primates saisis. Image de l’ICCN avec son aimable autorisation.
Des caisses contenant des primates saisis. Image de l’ICCN avec son aimable autorisation.

Inquiétude des défenseurs d’environnement

Cette saisie inquiète Vicar Batundi Hangi du groupe Foyer de développement pour l’autopromotion des personnes indigentes et en détresse – une structure qui milite pour l’environnement et pour les droits de l’homme au Nord-Kivu. Ce dernier garde encore les souvenirs de l’annonce du Trésor américain, qui avait sanctionné certains responsables congolais, accusés d’être impliqués dans le trafic illicite d’espèces sauvages.

« C’est une nouvelle affreuse pour nous. Les espèces animales doivent être dans la forêt et pas dans les cages », dit-t-il, fustigeant le fait que certaines personnes continuent à s’impliquer dans le trafic des espèces sauvages en RDC.

Alors que l’ICCN dit mener les enquêtes pour établir les responsabilités autour de cette affaire, John Katikomo Adam’s, un militant pro-environnement et membre du Conseil consultatif de la jeunesse africaine sur la réduction des risques de catastrophe, félicite ce service pour ce qu’il qualifie de « joli coup de filets ».

« Actuellement, nos singes disparaissent et on ne sait pas où ils vont. Parfois, on dit que c’est à cause de la guerre qu’ils fuient, mais on vient de voir, qu’il y a des personnes mal intentionnées qui les trafiquent, sachant que ce sont des patrimoines qui sont conservés dans notre pays à l’état naturel », dit-il. Il rappelle que le trafic des ces espèces est une perte énorme pour le secteur touristique du pays.

« Je crains que ces espèces soient vendues à l’extérieur pour que le tourisme puisse profiter aux pays étrangers au détriment du pays. L’ICCN a bien fait d’attraper ces gens. Je félicite la sécurité congolaise pour cette interception », ajoute Katikomo, basé à Goma.

Erreur ou trafic illégal ?

Alors que la nouvelle a fait l’effet d’une bombe à Goma et ses environs, une source contactée par Mongabay, le 22 août, révèle que ce transfert est tout à fait normal.

Cette source, qui a préféré garder l’anonymat, reconnait une erreur de communication déplorable au niveau des services.

L’ICCN n’a pas encore apporté des éclaircissements sur cette supposée erreur sur son compte X, (anciennement connu comme Twitter), où il a publié le communiqué, annonçant la saisie des primates.

Les défenseurs de la nature se félicitent de la saisie par l'Institut congolais pour la conservation de la nature (ICCN) des singes à Goma. Image de l’ICCN avec son aimable autorisation.
Les défenseurs de la nature se félicitent de la saisie par l’Institut congolais pour la conservation de la nature (ICCN) des singes à Goma. Image de l’ICCN avec son aimable autorisation.

La coordination du ministère de l’Environnement et du développement durable de la province du Sankuru, lieu de provenance des ces animaux, confirme que, c’est elle qui a transféré ces espèces vers le sanctuaire de Jeunes animaux confisqués de Katanga (JACK en sigle).

Séraphin Nteko Lombole, Chef de Division de l’Environnement et du développement durable dans le Sankuru dit à Mongabay au téléphone, avoir saisi par écrit les responsables étatiques à tous les niveaux, pour les informer de cette opération de transfert.

Selon ses dires, deux personnes ont accompagné ces animaux de Sankuru à Lubumbashi, en transitant par la ville de Goma.

Il dément auprès de Mongabay toute information de fraude, de trafic illégal et rejette toute infraction comme l’a signifié le communiqué de l’ICCN.

« C’est depuis le lundi (19 août Ndlr) que j’ai écrit une lettre au Directeur national de l’ICCN, avec une copie au Secrétaire général à l’Environnement, sur les animaux qui trainent chez nous, parce que, dans la province de Sankuru, nous n’avons pas l’ICCN », dit-t-il au téléphone à Mongabay.

Plusieurs sources contactées par Mongabay démentent l’information de fraude et de trafic mais expliquent qu’il s’agit d’un transfert légal des singes et évoquent une erreur de communication entre les services de l’Etat, qui auraient été mis eau parfum de l’opération de transfert des primates du Sankuru vers le sanctuaire de Jeunes animaux confisqués de Katanga. Image de Séraphin Nteko Lombole, Chef de Division provinciale de l'Environnement à Sankuru avec son aimable autorisation.
Plusieurs sources contactées par Mongabay démentent l’information de fraude et de trafic mais expliquent qu’il s’agit d’un transfert légal des singes et évoquent une erreur de communication entre les services de l’Etat, qui auraient été mis au parfum de l’opération de transfert des primates du Sankuru vers le sanctuaire de Jeunes animaux confisqués de Katanga. Image de Séraphin Nteko Lombole, Chef de Division provinciale de l’Environnement à Sankuru avec son aimable autorisation.

Selon lui, la province du Sankuru abrite des orphelins des bonobos, des singes, de petits singes ; ceux-ci sont transférés dans d’autres régions du pays.

« Ce transfert n’est pas une première chez nous. Nous avons déjà envoyé plus de 47 autres espèces au sanctuaire de Lola Bonobo à Kinshasa. On a eu un partenariat avec un sanctuaire à Lubumbashi, et c’est comme ça que j’ai transféré ces animaux officiellement », insiste Nteko Lombole.

Dans l’Ordre de mission consulté par Mongabay, les 15 animaux, transférés sont, entre autres 5 Ascagnes (Cercopithecus Ascanius), 3 Lesula (Cercopithecus lomamiensis), 1 Brazza (Cercopithecus neglectus), 1 Mangabey doré (Cercocebus chrysogaster), 2 Mangabeys noirs (Lophocebus aterrimus), 1 Argile, 1 Métis et 1 bébé bonobo (Pan paniscus).

Le transfert de ces animaux à Lubumbashi, explique notre source, est due au manque des moyens pour les nourrir.

L’ICCN a souligné, dans son communiqué, que les enquêtes sont menées et a affirmé sa détermination à œuvrer pour la conservation et la préservation de la nature.

« Dans l’attente de la suite des enquêtes pour établir les responsabilités, l’Institut congolais pour la conservation de la nature réitère son engagement dans la lutte contre la criminalité faunique et toutes formes de commerce illicite des espèces protégées », a dit dans ce communiqué Milan Ngangay.

« Le DG de l’ICCN n’était pas informé à temps, alors que ses services avaient déjà les courriers et l’information », dit Nteko Lombole, qui déplore cet incident.

En août 2023, les Etats-Unis d’Amérique avaient sanctionné Cosma Wilungula, ancien Directeur général de l’ICCN, Léonard Muamba Kanda, ancien Chef de département de l’Autorité de gestion de la RDC pour la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages en voie d’extinction et Directeur de l’ICCN  et Augustin Ngumbi Amuri, Directeur-coordinateur de l’Autorité de gestion de la RDC pour la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages en voie d’extinction et Conseiller juridique de l’ICCN.

Ils étaient accusés d’avoir abusé de leurs postes dans les trafics des certains primates comme les chimpanzés, les gorilles, entre autres.

Image de bannière: Plusieurs sources contactées par Mongabay démentent l’information de fraude et de trafic mais expliquent qu’il s’agit d’un transfert légal des singes et évoquent une erreur de communication entre les services de l’Etat, qui auraient été mis au parfum de l’opération de transfert des primates du Sankuru vers le sanctuaire de Jeunes animaux confisqués de Katanga. Image de Séraphin Nteko Lombole, Chef de Division provinciale de l’Environnement à Sankuru avec son aimable autorisation.

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