Nouvelles de l'environnement

Parc national de Togodo Sud, un sanctuaire vert où nature, homme et culture cohabitent en harmonie

Deux hippopotames pygmées. Comme certaines des espèces que l'on trouve dans le parc national de Togodo Sud. Image par Chuckupd via wikimedia commons. (CC By ND 2.0)

  • Le Parc national de Togodo Sud abrite une faune et une flore d'une richesse remarquable, avec des espèces uniques mais menacées comme le singe à ventre roux et le petit hippopotame nain.
  • Les villages aux alentours sont impliqués dans la protection du Parc à travers l'Union des Associations Villageoises de Gestion des Aires Protégées (UAV GAP) et les éco-gardes formés par la GIZ.
  • L'exploitation raisonnée des zones périphériques du parc permet aux communautés locales de vivre décemment tout en préservant l'environnement.

Loin de l’animation urbaine de Lomé, la capitale du Togo, se trouve un sanctuaire d’une biodiversité exceptionnelle : le Parc national de Togodo Sud. À environ 106 kilomètres au nord-ouest de la capitale, caprès une marche de trois kilomètres depuis le village de Zounvi-toundji, à travers les champs de maïs et sur un sentier boueux baigné par une légère bruine, ce jour-là, apparaît le paradoxe vivant de la nature accueillante et impénétrable . « Cet espace vide marque la démarcation entre notre domaine agricole et le cœur de la forêt », indique Attiglido Kokou, éco-garde très investi dans son rôle et membre de l’Union des Associations Villageoises de Gestion des Aires Protégées (UAV GAP). Il dévoile ainsi l’entrée dans une aire naturelle quasi-mystique où le parc s’érige fièrement.

Un parc national aux multiples richesses

Établi en 1952 comme réserve faunique, le Parc national de Togodo Sud a été requalifié en parc national en 2005, s’étendant aujourd’hui sur 15 000 hectares – une superficie équivalant à 21 000 terrains de football. Cette réserve constitue une part essentielle du complexe d’aires protégées de Togodo, un segment important de la réserve de biosphère transfrontalière du Mono, reconnue par l’UNESCO. Kossi Adjonou, spécialiste en écologie forestière et enseignant chercheur, explique : « Il y a la partie qui est la réserve de faune et l’autre qui est le Parc national. Les deux constituent aujourd’hui le complexe d’aires protégées de Togodo, inscrit dans la réserve de biosphère de l’UNESCO, appelée réserve de biosphère transfrontalière du Mono entre le Togo et le Bénin ».
Une étude publiée par Kossi Adjonou en mai 2016, intitulée « Considération des caractéristiques structurales comme indicateurs écologiques d’aménagement forestier au Togo», faisait constater que les formations forestières ont subi une ou plusieurs dégradations et sont actuellement en cours de reconstitution. Cette étude, focalisée sur les îlots du complexe d’aires protégées de Togodo, précise également qu’elles regorgent encore d’un grand potentiel en matière de ressources forestières ligneuses.
Huit ans plus tard, dense et luxuriante, la forêt de Togodo Sud est un haut-lieu de la biodiversité. Scientifiques et écologistes y ont identifié des centaines d’espèces florales et fauniques. Des mammifères comme le singe à ventre roux, classé vulnérable, ainsi que le petit hippopotame nain, cohabitent avec un nombre impressionnant d’oiseaux et d’insectes dans ce labyrinthe vert, sous les ombrages épais des arbres, dont certains, en disparition, se retrouvent exclusivement parmi ceux bordant le fleuve Mono.

Une vue partielle de la forêt de Togodo. Image de Juste Edgard Agabanou pour Mongabay.

Eco-gardes, des acteurs clés de la conservation et de la protection

Aux alentours du parc, 3 000 hectares ont été redistribués par l’État aux communautés locales pour une exploitation raisonnée, conjuguant ainsi développement durable et subsistance économique. Les villageois des alentours, comme ceux de Tométy Kondji, de Sodomé ou de Zounvi-toundji, se concentrent sur l’agriculture, notamment le maïs, et n’exercent plus de pressions, à la recherche de plus de terres agricoles sur la forêt. Cette interaction harmonieuse entre l’homme et son environnement met en lumière une gestion participative où chacun prend part à la protection et à la valorisation du parc.

L’initiative de formation des éco-gardes, initiée par l’agence de coopération internationale allemande GIZ, a transformé le quotidien des habitants. Attiglido Amavi Tognevia, président de l’UAV GAP, souligne l’importance de cette transformation : « Ici , à Togodo, nous sommes une trentaine formés par la GIZ depuis quelques années pour le travail de pisteur. C’est nous qui accompagnons les agents forestiers et surveillons le parc. Après notre formation comme pisteurs, nous ne nous contentons plus de surveiller, nous participons activement à la préservation de notre héritage naturel. La chasse, naguère vitale, a laissé place à un respect accru pour la faune», affirme-t-il.
Ce changement de paradigme chez les habitants témoigne d’une baisse significative des pressions exercées sur la forêt et d’une réelle évolution des mentalités. Des parties qui ceinturent la forêt ont ainsi été reboisées et serviront pour leurs besoins domestiques.« On a planté des arbres dans la clairière, qui sert de limite pour s’en servir, quand elles vont grandir », informe Kossi Attiglido.
Les programmes de sensibilisation, pilotés par des ONG ou associations viennent accompagner les initiatives du WACA (West Africa Coastal Areas Management Program) et la gestion proactive de l’UAV GAP et de la Direction régionale des ressources forestières (DRERF-M/P). Ils permettent d’intégrer des pratiques traditionnelles dans une stratégie de conservation qui se veut durable et inclusive.

Un vue partielle de la forêt de Togodo. Image de Juste Edgard Agbanou pour Mongabay.

Des défis à relever pour assurer la pérennité de la protection du parc

Toutefois des voix averties comme celle de Kossi Adjonou estiment que le milieu n’a pas encore exploité pleinement son potentiel. Selon lui, il reste beaucoup à faire pour que la communauté reconnaisse pleinement les avantages de la protection du parc sur le long terme. Ainsi, les initiatives, telles que le reboisement et l’amélioration des infrastructures et le renforcement de la résilience des populations, s’avèrent cruciales pour assurer la continuité des efforts engagés. « Les résultats ne sont pas encore très significatifs, mais à partir du moment où les gens arrivent à trouver les vestiges pour le bois de feu, ils n’iront plus dans la réserve. »

La sanctuarisation de certaines zones du parc souligne également son importance culturelle et spirituelle pour les populations locales. Elle démontre aussi une fusion entre la conservation environnementale et la préservation des patrimoines culturels, piliers de l’identité collective.« Nous menons nos rituels dans ces espaces forestiers sacrés, ce qui renforce notre lien unique avec le parc » nous confie Attiglido Amavi Tognevia, qui conclut tout de même avec beaucoup d’émotions, en appelant les autorités et autres organisations à les accompagner davantage, notamment en équipements et en moyens financiers pour faciliter leur travail, qu’il reconnaît très fastidieux avec des moyens de bord : « On n’pas de salaires et plus d’équipements, nous travaillons avec nos motos et surtout qu’une l’aide du directeur conservateur du parc qui nous accompagne personnellement ». Une situation confirmée par Degbetchin Koffitchê, éco-garde UAV GAP, qui fait aussi remarquer sonleur impatience de voir le parc devenir un lieu touristique qui, selon lui, pourrait offrir d’autres sources de revenus consistant pour les aider à ne plus du tout être tenté de rebrousser chemin.

Il est évident que, grâce au dialogue entre la nature, l’homme et la culture, Togodo Sud se profile, non seulement comme un havre de biodiversité dans la région, mais aussi comme un modèle inspirant de conservation intégrée et de développement durable. Toutefois, pour pérenniser cet écosystème unique dans le sud du Togo, Kossi Adjonou suggère qu’il faut « continuer à renforcer les mesures de résilience des communautés, l’amélioration des conditions de vie des communautés».

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Image de bannière : Deux hippopotames pygmées. Comme certaines des espèces que l’on trouve dans le parc national de Togodo Sud. Image par Chuckupd via wikimedia commons. (CC By ND 2.0)

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