Nouvelles de l'environnement

Élément d’Afrique : promesses non tenues au Ghana et en Afrique du Sud, des forêts occupées par une mine en RDC

  • La police sud-africaine a arrêté sept militants manifestant contre l’entreprise Anglo American Platinum, qui aurait négligé de rendre compte de ses engagements sociaux et professionnels envers la communauté affectée par ses activités.
  • Des communautés impactées par l’exploitation minière au Ghana sont mécontentes des accords de relogement.
  • Les militants affirment que le Canadien Alphamin Bisie opère en dehors de sa concession de la province congolaise du Nord-Kivu et occupe les forêts communautaires.
  • Élément d’Afrique est le bulletin bihebdomadaire de Mongabay qui rassemble de courts articles sur le secteur des matières premières en Afrique.

Des militants sud-africains arrêtés lors d’une manifestation contre le non-respect « lamentable » d’une mine de platine

BURGERSFORT, Afrique du Sud — Sept militants de l’organisation Sekhukhune Combined Mining-Affected Communities (SCMAC) ont été accusés d’intimidation à la suite d’une manifestation le 17 février contre le géant minier Anglo American Platinum à Burgersfort, à environ 375 kilomètres de Johannesbourg. Les militants ont été renvoyés en détention provisoire le 1er mars après leur première audience au tribunal et attendant désormais une audience de libération sous caution.

D’après le porte-parole de SCMAC, Elton Thobejane, les militants, Speeding Mokhabane, Wister Phasha, Stanley Makgopa, Selalenkwe Nkoana, Athalia Nkoana, Kgakishi Nkoana et Hans Nkabane, manifestaient pacifiquement devant le camp minier Mopetsi de la mine de platine à ciel ouvert de Twickenham lorsque la compagnie minière a appelé la police.

Le Hackney Shaft de la mine Twickenham d’Anglo American Platinum. Les communautés avoisinantes affirment que l’entreprise n’a pas respecté les engagements pris dans le cadre de son plan social. Image par Magnificent Mndebele via New Frame (CC BY-SA-4.0)
Le Hackney Shaft de la mine Twickenham d’Anglo American Platinum. Les communautés avoisinantes affirment que l’entreprise n’a pas respecté les engagements pris dans le cadre de son plan social. Image par Magnificent Mndebele via New Frame (CC BY-SA-4.0)

Nomonde Ndwalaza, porte-parole d’Anglo American Platinum, a quant à elle communiqué à Mongabay que les autorités ont été contactées lorsque les militants ont « illégalement bloqué l’entrée de la mine et menacé et mis en danger la vie de nos employés ».

La manifestation était motivée par l’absence de rapport présenté à la communauté concernant les engagements de ses plans sociaux et du travail (SLP) depuis 2014, affirme Thobejane à Mongabay.

Or, la loi sud-africaine sur l’exploitation minière exige des compagnies qu’elles s’engagent envers les communautés affectées dans le cadre de leur demande de droits miniers.

« Les compagnies minières sont légalement contraintes d’organiser à minima trois réunions par an avec les communautés affectées par leurs activités pour les tenir à jour des progrès sur leurs engagements SLP. Elles doivent aussi soumettre à l’autorité de régulation des ressources minérales un rapport annuel incluant les comptes-rendus des réunions communautaires, afin de montrer qu’elles suivent leurs SLP. Anglo American Platinum a lamentablement échoué à respecter la loi », explique Thobejane.

Selon lui, la compagnie a réalisé des bénéfices considérables tout en négligeant ses obligations sociales et environnementales envers les communautés pauvres autour de sa zone d’opération à Burgersfort.

L’entreprise, à travers Ndwalaza, indique de son côté avoir déposé plus d’une dizaine de plaintes à l’encontre de manifestants locaux. Elle a également ajouté que seuls deux des douze projets inclus dans les SLP de la mine sont incomplets, et que ceux-ci ont été ralentis par les délais d’approbation des autorités gouvernementales locales et ce qu’elle qualifie de « difficultés dans nos engagements avec des communautés souvent largement divisées et avec leur structure ».

« Nous travaillons actuellement à clôturer le processus de consultation sur les projets de notre SLP 3 (2021-2025). Nous faisons face à des retards dans ces consultations en raison de diverses demandes de certaines communautés », explique-t-elle.

En 2016, Anglo American Platinum a déclaré que son partenaire commercial, Atlatsa Resources, avait accumulé 4 milliards de rands (215 millions de dollars) de dettes, et placé la mine de Twickenham en maintenance. Depuis lors, SCMAC a appelé la compagnie à prendre une décision : rouvrir la mine et prévoir des emplois pour les membres de la communauté, ou la fermer définitivement et rendre les terres.

S’ils sont inculpés, les militants risquent une amende de 2 300 $ ou 10 ans d’emprisonnement.

Équipement lourd à Obuasi : « C’est le devoir d’AngloGold Ashanti de nous reloger. » Image de jbdodane via Flickr (CC BY-NC 2.0)
Équipement lourd à Obuasi : « C’est le devoir d’AngloGold Ashanti de nous reloger. » Image de jbdodane via Flickr (CC BY-NC 2.0)

Les membres de la communauté Anhwiam au Ghana demandent à être relogés par la compagnie minière

Les résidents de la ville minière d’or d’Obuasi affirment qu’AngloGold Ashanti a causé des dégâts environnementaux et sociaux considérables à leur communauté, mais que la compagnie refuse d’aider les personnes affectées à se reloger comme l’exige la loi.

« [Obuasi] est devenue une concession d’AngloGold Ashanti », dit Robert Ali Tani, directeur général du Center for Social Impact Studies (CeSIS), un groupe de recherche et d’action sociale basé à Obuasi, à Mongabay. Selon lui, l’activité minière a privé les habitants de leurs moyens de subsistance. Beaucoup d’entre eux, dont les fermes ont été détruites, se sont tournés vers la collecte et la vente de bois de chauffage. Cette activité, ainsi que l’accès aux terres à d’autres fins, ont toutefois été bloqué par la compagnie.

Les résidents de certaines parties d’Obuasi ont été relogés par le passé. Cependant, selon Tani, les habitants de New Bediem, relogés en 1996, et de Dokyiwaa, relogés en 2011, ne sont pas satisfaits de leurs nouveaux foyers. La législation, révisée en 2006 et 2012, a amélioré le soutien apporté à Dokyiwaa dans les négociations, mais les deux communautés se sont plaintes de la qualité des maisons construites pour elles.

Tani a expliqué à Mongabay que les communautés considèrent les comités de relogement mis en place pour gérer les processus comme hostiles aux intérêts des résidents, car ils comprennent actuellement trop de représentants du gouvernement. Notant les plaintes des communautés relogées concernant la qualité de leurs nouvelles maisons, il a également déclaré que l’assemblée du district devrait veiller à ce que les entreprises respectent les normes de construction légales du pays.

Les résidents d’Obuasi affirment qu’ils ne disposent pas des ressources et de la capacité financière pour négocier avec le plus gros producteur d’or du Ghana, d’autant que le gouvernement détient des parts de la compagnie.

« Nous avons appelé à un relogement, mais nos voix ne sont pas suffisantes pour être entendues », a déploré Kwesi Appiah, un militant du secteur Anhwiam d’Obuasi, auprès de Mongabay. « C’est le devoir d’AngloGold Ashanti de nous reloger. Nous demandons au gouvernement de nous aider dans la progression de notre pétition. Nous faisons également en sorte d’informer les nôtres des lois sur le relogement puisque certains en ignorent l’existence. »

Appiah a indiqué que d’autres membres de la communauté et lui-même prévoient de pétitionner le ministère des Terres et des Ressources naturelles et la Mining Commission du pays pour faire pression sur la compagnie.

Vue aérienne du territoire de Walikale. Image de Sylvain Liechti/MONUSCO via Flickr (CC BY-SA 2.0)
Vue aérienne du territoire de Walikale. Image de Sylvain Liechti/MONUSCO via Flickr (CC BY-SA 2.0)

Nord-Kivu, RDC : la société Alphamin Bisie en désaccord avec les communautés forestières de Banmwesi et Butondo

Depuis 10 ans, la société Alphamin Bisie exploite les ressources minières dans son carré minier qui couvre une partie du territoire de Walikale, au nord-ouest de Goma, dans la province de Nord-Kivu. Mais les communautés de Banamwesi et Motondo n’auraient pas été consultées comme l’exige le code minier, la loi minière en RDC, en vue d’établir des cahiers de charges pour le financement des projets de développement. Cette exigence permet aussi d’évaluer avec les concernés l’impact environnemental des activités industrielles.

Alphamin aurait prospecté furtivement la zone qui constitue son carré minier jusqu’aux forêts de ces deux localités, relate un activiste de la société civile dont le nom restera ici anonyme pour sa sécurité.

« Des hélicoptères avaient été vus. La communauté qui s’organisait pour obtenir ses titres fonciers dans le cadre du projet gouvernemental des forêts communautaires a saisi l’administrateur du territoire. À l’époque, la société avait nié toute occupation de la zone ».

Mais plus tard, explique cet activiste, on a constaté que la société avait réellement occupé la forêt de Banamwesi et de Motondo.

Les forêts communautaires de Banamwesi et Motondo comptent respectivement 13 374,48 et 23 145 hectares. Des cartes établies sur la base des données géographiques collectées par ces communautés montrent que la société minière empiète sur les forêts communautaires du centre vers le sud, et même à l’est de cette société.

Contacté par Mongabay, le président de la société civile de Walikale, Fiston Misona, a confirmé ce litige. « Cette communauté n’a pas été consultée. Elle continue à réclamer son droit. Puisque l’occupation n’a pas respecté le processus normal », indique Misona.

Carte avec hachures indiquant où les zones de concession d’Alphamin se chevauchent avec les concessions forestières communautaires de Banamwesi et de Motondo (CFCL) : l’entreprise est accusée d’exploitation minière dans ces zones sans autorisation.
Carte avec hachures indiquant où les zones de concession d’Alphamin se chevauchent avec les concessions forestières communautaires de Banamwesi et de Motondo (CFCL) : l’entreprise est accusée d’exploitation minière dans ces zones sans autorisation.

Un rapport de la société civile qui date de 2017 note que les relations sont appelées à devenir tendues entre Alphamin Bisie et les communautés qui l’environnent dans le territoire de Walikale, si la société ne prend pas en compte les doléances de celles-ci. Ce document relève, par exemple, « les processus insuffisants de négociation avec la communauté locale et l’implication de la société dans le développement local ».

À ce jour, les deux communautés veulent des discussions directes avec la société minière afin qu’elles soient reconnues comme impactées par les activités de Alphamin. Cette reconnaissance devrait ouvrir des droits pour ces communautés. Ce que n’admet pas encore l’entreprise minière.

Contacté par Mongabay, l’administrateur du territoire Walikale a préféré ne pas parler, renvoyant la responsabilité à ses supérieurs à Goma. À ce jour, les efforts pour obtenir une réaction officielle n’ont pas encore abouti.

La ruée vers l’étain et le coltan (colombite et tantalite), minerais prisés par l’industrie électronique (et aéronautique) dans le monde, alimente un trafic illicite au profit des groupes armés dans l’est de la République démocratique du Congo. Dans le Nord-Kivu, des paysans perdent aussi des terres. En plus, ils ne parviennent pas à se faire reconnaître comme « impactés » par l’exploitation de ces minerais précieux dans les environs de Banamwesi et Mutondo, dans le territoire de Walikale.

Mabel Annang Adorkor, Anna Majavu et Didier Makal ont contribué à la rédaction de ce bulletin.


Image de banière : Sylvia Mokwena : Ses enfants ont été blessés par un accident au Hackney Shaft de la mine de platine d’Anglo American près de Modimolle, Limpopo, en Afrique du Sud. Image par Magnificent Mndebele via New Frame (CC BY-SA-4.0)

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