- L’augmentation de la production nationale d’huile de palme brute en général est causée par la forte demande d’entreprises agroindustrielles en particulier.
- Les demandes sont estimées à 1.512 million de tonnes en 2022, selon les statistiques communiquées par Jacqui Kemleu, Secrétaire Général de l’Association des Raffineurs des Oléagineux (Asroc) lors d’une conférence de presse tenue à Yaoundé au début de cette année.
- Les agroindustries sont responsables de 26% des pertes du couvert forestier national ; et occupent la deuxième place juste après l’exploitation des forêts communales d’après le bulletin d’alerte Global Land Analysis and Discovery (GLAD) du 3ème trimestre de 2018 mise à jour en février 2022.
- Le manque de statistiques nationales sur les études d’impacts environnementaux et sociaux des activités des entreprises agroindustrielles ayant des concessions provisoires ou permanentes couvre beaucoup d’exactions de leur part. Ce qui occasionne des conséquences plus négatives que positives sur le plan humain et sur le plan environnemental.
Plus de 65.200 ha de terres ont été sollicités auprès du gouvernement camerounais par des entreprises agroindustrielles en 2022, selon Henri Eyebe Ayissi.
Lors de la semaine du foncier tenue en novembre 2022 à l’Assemblée Nationale ce ministre des Domaines, du Cadastre et des Affaires Foncières à Yaoundé a souligné que les terres sollicitées sont reparties entre plus de 46 arrêtés de concessions provisoires sur des parcelles d’une superficie de 1 200 ha. 1Dix projets de décrets selon à l’étude à la primature, selon Henri Eyebe Ayissi
Au total 11 villages, parmi lesquels Ndokbakang, font face à des exploitations des terres en faveur des sociétés qui pratiquent l’agroalimentaire au grand détriment des forêts et autres domaines protégés, regrettent des activostes de l’environnement.
Parmi les sociétés citées, notons Greenfil Palm Plantation LTD qui s’occupe de la plantation des palmiers à huile.
En septembre 2022, une correspondance, de Fouda Séraphin Magloire, Secrétaire Général de la Primature a attisé le feu.
Adressée à la société Greenfil Palm Plantation LTD, la correspondance avait comme objet : « Procédure de déclassement et de classement en compensation d’une parcelle de forêt de 5 000 ha dans le domaine privé de la commune de Yabassi. »
Les résidents de Yabassi se disent consternés par ce plan d’attribution des 5000 ha à cette société par crainte de voir les forets entièrement détruites.
Nos tentatives de joindre, par téléphone, Mirabeau Eba maire de la commune de Yabassi sont restées infructueuses.
Sept années d’activités de Greenfil Palm Plantation LTD à Ndokbakang
Ndokbakang est l’un des onze villages de l’arrondissement de Yabassi, département du Nkam, région du Littoral touchée par les activités de création des plantations de palmiers à huile de l’entreprise agroindustrielle Greenfil Palm Plantation LTD.
L’histoire avec Greenfil Palm Plantation LTD à Ndokbakang remonte en 2015. La direction de l’entreprise avait contacté, par téléphone, la cheffe du village Ndokbakang Marie Kunde avant de venir la rencontrer en présence des chefs de toutes les familles du village Ndokbakang, à Douala.
« En 2015, la société Greenfil Palm Plantationici à Douala m’a contactée et a sollicité les terres. Après débats, nous [la cheffe et les chefs de famille du village Ndogbakang, Ndlr] avons accepté de leur donner 5 000 ha pour planter le palmier à huile à condition qu’elle améliore nos conditions de vie. Ce qu’elle n’a pas respecté jusqu’aujourd’hui», regrette Marie Kunde contactée par téléphone.
Par ailleurs, Greenfil Palm Plantation LTD est accusé d’avoir coupé des arbres sur une étendue de plus de 5 000 ha et de les avoirs vendus sans rien verser à la population ou à la communauté comme les termes des contrats le stipulaient.
A part la coupe des arbres et la vente des ceux-ci, les populations de Ndubakang disent que cette société a initié des activités d’élevage de bovins dans l’espace attribué sans accord de l’autorité.
Une rivière perdue et des rapports truqués
Suite aux activités de Greenfil Palm Plantation LTD les populations de Ndobakang ont perdu une rivière qui leur était importante à cause de la pollution.
Selon la chef du village la rivière est « polluée par le déversement » des régimes de palmiers et des troncs d’arbres abandonnés lors des coupes.
En plus, les champs de maïs des populations locales sont ravagés par les hérons garde-bœufs qui accompagnent les bœufs à la recherche de pâturage.
Marie Kunde, une fois de plus, ne croit pas à la véracité d’un document sur la réalisation d’une l’étude d’impact environnemental et social que la société Greenfil Palm Plantation LTD a Ndokbakang a mis à sa disposition.
« Au début des négociations l’entreprise [Greenfil Palm Plantation LTD, Ndlr] est venue chez moi, et elle m’a photographiée. Et, c’est l’une de ces photos qu’elle a utilisées dans l’étude d’impact environnemental et social qu’elle m’a remise » ajoute-t-elle tout en arguant que la société n’a pas été honnête.
Kunde, évoque un article d’une loi de 1996 sur la gestion de l’environnement et précise que « Toute étude d’impact [environnemental et social] non conforme aux prescriptions du cahier des charges est nulle et nul effet »
Maxwell Nju’u technicien des eaux et des forêts au Cameroun pense que la présentation d’une étude d’impact environnemental et social qui n’est pas correct, dans un projet d’attribution d’un titre de concession pourrait, à coup sûr, mettre un terme au dit projet.
Il évoque, à titre d’exemple, le projet Neo Industry dans la vallée du Ntem dans la région du sud qui a été autorisé puis arrêté par un décret du Premier ministre John Ngute en 2021, entre autres, à cause de l’étude d’impact environnemental et social non conforme à la réalité.
Des propositions
Réunis dans un atelier à Douala le mois dernier, des organisations de la société civile, les chefs des villages et autres ont formulé des recommandations pour bien protéger l’environnement.
Ils demandent la suppression de la titrisation des terres attribuées en concessions afin de limiter les droits des investisseurs à l’usage.
Il s’agit, entre autres, de limiter et de réduire les superficies cessibles en concessions foncières, en tenant compte de la disponibilité présente et à venir des terres, de la nature de la croissance démographique et de la nécessité de préserver l’espace vital des communautés.
Des participants avaient aussi demandé d’ériger le village en entité juridique susceptible de jouir de la propriété sur ces terres, de mettre en place un comité interministériel de suivi des concessions attribuées et des obligations environnementales et sociales des cahiers de charges des investisseurs etc.
Au moment où certaines entreprises étendent leurs concessions sans l’accord des autorités, il a été demandé de systématiser la cartographie permettant de clairement délimiter les espaces attribués en concessions en impliquant les communautés dans la délimitation des espaces, de sorte que les espaces et les limites soient reconnus de manière consensuelle, selon Marc Anselme Kamga du CED qui a participé dans ces assises.