Nouvelles de l'environnement

Grogne autour d’un projet de centrale hydroélectrique dans un parc national congolais

Centrale électrique Inga I. Photo d’International Rivers en RDC

Centrale électrique Inga I. Photo d’International Rivers en RDC

  • Global Witness, l’Union Européenne et les organisations de la société civile congolaise se disent consternées par un projet qui vise un parc national d’une superficie dépassant la moitié de celle de la Belgique.
  • Le parc national d’Upemba se trouve en République Démocratique du Congo et s’étend sur deux provinces, le Haut-Katanga et le Haut-Lomania, qui étaient créés en 1939 mais un décret qui consacre sa délimitation a été signé en 1975.
  • Une société chinoise de construction PowerChina (qui détient aussi des millions de dollars d’obligations souscrites par des banques chinoises et européenne dont Standard Chartered et Société Générale) et des sociétés américaines d’investissement parmi lesquelles BlackRock, Vanguard et Dimensional Fund Advisors sont perçues comme les constructeurs potentiels.
  • • Le gouvernement congolais et le Programme des Nations unies pour le développement avaient identifié des sites pour la construction de centrales hydroélectriques à travers le pays il y a quelques années.

L’ONG internationale Global Witness s’inquiète de la construction en cours d’une centrale hydroélectrique dans le parc national de l’Upemba, en République démocratique du Congo.

Selon elle, la construction de la centrale de Sombwe vise l’alimentation en électricité de minières implantées dans la ceinture du cuivre et du cobalt de la République démocratique du Congo.

« En submergeant de vastes étendues forestières, ce projet pourrait engendrer l’équivalent de 1,3 million de tonnes d’émissions de CO2 d’ici la fin du siècle. »

D’autres organismes de la société civile congolaise jugent illégal ce projet car, selon elles, il est associé à des individus qui ont baigné dans la corruption.

Kipay Investment, partie prenante de ce projet, serait lié à un homme d’affaires congolais qui suscite la méfiance en raison de son passé et de ses liens troubles, explique Global Witness.

Des communautés locales seraient menacées par ce projet financé par des banques étrangères comme la Commercial Bank of China et la Standard Chartered.

Kipay Investment n’a pas tardé à réagir. Son avocat, maître Hubert Thiswaka Masoka, estime que le rapport de Global Witness ne repose pas sur une étude scientifique d’experts et que l’accusation selon laquelle son client menace l’environnement n’est pas fondée.

« Le site du projet de centrale hydroélectrique de Sombwe se situe sur la rivière
Lufira, dans le territoire de Mitwaba du Haut-Katanga, précisément sur
l’espace géographique couvrant la partie réservée à la chasse », a-t-il déclaré.

Un communiqué émis par le cabinet de communication et d’influence Shigan, qui est basé en France et qui représente Kipay dans les médias internationaux, prétend que Global Witness a publié un rapport « sans avoir visité le terrain ».

Le coût de construction de la centrale dans le parc national d’Upemba s’établira à 500 millions de dollars américain, selon l’enquête de Global Witness.

L’organisme ajoute que la présence d’une centrale dans un espace protégé constitue une violation des lois congolaises.

« [Ce projet] pourrait enfreindre les législations locales et mettre en péril les forêts et les efforts de conservation de la faune dans cet important parc national », indique un communiqué de l’organisme.

Kipay Investment, représenté par maître Kasoka et Shigan, trouve plutôt qu’il présente des avantages et qu’il aidera le gouvernement congolais à faciliter l’accès à l’électricité au pays.

Animaux menacés

La construction de la centrale représente un danger pour les éléphants de savane (Loxodonta africana) et les zèbres de la République démocratique du Congo, révèle Global Witness.

La société chinoise PowerChina est aussi évoquée comme constructeur potentiel de cette centrale dans le parc national congolais dont la superficie dépasse la moitié de la taille de la Belgique et du Maryland.

Global Witness et d’autres organismes de la société civile congolaise estiment qu’au moins cinquante kilomètres carrés de forêt tropicale seraient menacés par des inondations après la construction de la centrale. Leurs effets seraient dévastateurs pour la biodiversité locale.

Les inondations produiraient 1,3 million de tonnes de carbone, ce qui équivaut à trois millions de barils de pétrole incendiés. La survie des animaux et des humains, ainsi que la biodiversité, en serait grandement affectée.

Un projet béni par le gouvernement congolais

Le gouvernement congolais appuie ce projet qui se poursuit en dépit des pressions exercées par les organismes et par Global Witness.

« Le projet a été déclenché depuis plus de sept ans et il poursuit son cours normal », indique une note de service récente de Kipay Investment.

Le promoteur considère qu’aucun motif valable ni décision gouvernementale ne remet en question le développement du site se trouvant en dehors de l’espace protégé.

Selon lui, l’ICCN, l’organe qui assure la gestion des parcs congolais a même donné son accord au projet. « L’Institut congolais pour la conservation de la nature nous a assurés qu’il ne présente aucun risque majeur pour les animaux et qu’il constitue une occasion de développement économique et social importante pour la région », ajoute le promoteur.

Une perspective inquiétante

Colin Roberston, enquêteur chez Global Witness, n’en démord pas : la construction de la centrale dans le parc national viole les lois congolaises sur l’environnement.

Thimothé Mbuya, président de l’ONG congolaise Justicia, juge que la construction d’une centrale dans l’aire protégée du parc national met en danger la vie d’animaux rares, de même que sa biodiversité.

Le promoteur réplique que les ONG ne disposent pas d’information en rapport avec l’environnement. Selon lui, certaines n’existent que sur papier ou ont protesté sans avoir pris connaissance du projet.

Il reste que la centrale hydroélectrique sera édifiée au cœur même du parc et que l’Union européenne estime que l’étude d’impact environnemental menée par Kipay Investment fait fi de la loi congolaise.

 

L’article a été actualisé le 14 avril 2022 par des réactions de Kipay à travers son avocat et l’agence de communication et de relation qui represente Kipay au sein des médias internationaux.

 

 

 

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