- Une estimation dirigée par l’association Botanic Gardens Conservation International (BGCI) a trouvé que parmi les 60 000 espèces d’arbres connues, 440 sont en danger critique d’extinction.
- Aujourd’hui dans le monde, il y a plus d’espèces d’arbres menacées que d’espèces de mammifères, reptiles, oiseaux et amphibiens rassemblés.
- Parmi les points chauds de biodiversité d’arbres, qui possèdent un grand nombre d’arbres indigènes, le Brésil, l’Indonésie et la Malaisie s’en sortent mal.
- Un manque d’expertise au niveau national freine de telles initiatives, a dit Frank Mbago, un botaniste tanzanien, à Mongabay.
Lorsque Frank Mbago, un botaniste tanzanien, a appris que l’IUCN, l’autorité mondiale pour la conservation de la nature, avait déclaré l’Erythrina schliebenii éteint, il était méfiant. Son scepticisme était justifié : en 2011, une équipe qu’il avait aidé à assembler avait « redécouvert » l’arbre dans les forêts côtières du sud de la Tanzanie. Cette expédition avait trouvé une autre espèce que l’on craignait disparue : Karomia gigas.
Mais avec moins de 50 individus dans la nature, le futur des deux arbres est tout de même loin d’être assuré. Ce ne sont pas les seules espèces au bord de l’extinction, un rapport mondial publié le 1er septembre a trouvé que 440 espèces d’arbres sont en danger critique d’extinction.
« Nous avons évalué les espèces menacées et non menacées afin de dresser un tableau global de la conservation nécessaire pour les arbres », a dit Megan Barstow, une chargée de conservation avec l’association Botanic Gardens Conservation International (BGCI), qui a mené l’effort. Avant ce rapport, les estimations publiées ne couvraient que 10 000 espèces, a dit Barstow. Ce nombre s’élève aujourd’hui à près de 58 500.
Mais le tableau qu’il peint est sombre. Un nombre effarant de 17 500 espèces courent le risque de disparaître ; cela représente une espèce d’arbres sur trois. Il y a plus d’espèces d’arbres menacées que d’espèces de mammifères, reptiles, oiseaux et amphibiens rassemblés.
Mais dans l’imaginaire collectif, les formes de vie plus animées volent la vedette, laissant la flore reléguée à l’arrière-plan. Le nouveau rapport montre que la tapisserie vivante de nos paysages perd aussi ses riches détails. Pour mettre un terme à la détérioration des écosystèmes, nous devons nous cramponner à la diversité des arbres de la planète, disent les experts.
« Si nous voulons réussir une transformation ambitieuse de notre relation à la biodiversité, une transformation qui nous verrait vivre en harmonie avec la nature d’ici à 2050, nous devons mettre la conservation des espèces d’arbres au cœur du travail de restauration écologique », a dit Elizabeth Maruma Mrema, la secrétaire exécutive de la Convention sur la diversité biologique des Nations unies dans une déclaration préparée.
Parmi toutes les espèces d’arbres, environ un cinquième sont directement utilisées par les humains, que ce soit pour l’alimentation, le combustible, le bois de construction ou à d’autres fins. Malgré cela, et peut-être à cause de cela, ils sont surexploités, mal gérés et parfois menés à l’extinction.
« La végétation est en sécurité lorsqu’elle est loin des gens », a dit M. Mbago, remarquant que les forêts les plus proches des zones de peuplement sont les premières à être détruites. Une vue d’ensemble détaillée le confirme : l’agriculture et l’exploitation forestière sont deux des plus grandes menaces pour ces plantes vivaces et résistantes.
La région ayant la proportion la plus élevée d’espèces d’arbres menacées (40 %) est celle des « afrotropiques », recouvrant l’Afrique subsaharienne, la plus grande partie de la péninsule arabe et les îles de l’océan indien occidental.
Parmi les points chauds de biodiversité d’arbres, qui possèdent de grands nombres d’arbres indigènes, le Brésil, l’Indonésie et la Malaisie s’en sortent mal. Parmi les 9 000 variétés natives d’arbres du Brésil, 1 977 sont menacées. La situation est encore pire en Indonésie et en Malaisie, où près d’un quart des espèces natives sont menacées.
Le problème n’est pas limité aux tropiques ; plus de la moitié des arbres natifs d’Europe sont en danger.
Le rapport souligne aussi les menaces sur les îles où l’endémicité est élevée. À Madagascar, la quatrième plus grande île du monde, près de 60 % des espèces d’arbres sont menacées. Les incendies sont une menace annuelle, tout comme l’abattage sélectif à longueur d’année du palissandre et de l’ébène.
De l’autre côté du globe, dans les îles des Caraïbes, les abatteurs ciblent également les bois durs comme le palissandre et l’acajou. Mais le changement climatique a également un impact dans les Caraïbes. La montée du niveau de la mer menace la couverture végétale côtière. Les phénomènes météorologiques extrêmes sont également dangereux pour les arbres, certains d’entre eux étant adaptés à une bande étroite des conditions climatiques.
Le rapport établi avec l’aide de 60 institutions et plus de 50 spécialistes est un pas important pour combler les lacunes de nos connaissances sur les arbres. Un portail dédié qui présente des informations sur les efforts de conservation triés par espèce et géographie est maintenant accessible.
Même cette évaluation des périls auxquels font face les arbres est probablement une sous-estimation. De nombreuses espèces ne font pas encore partie du portfolio de la science moderne. « Les étudiants d’aujourd’hui pensent que si ça n’est pas sur Google, ça ne n’existe pas », a dit M. Mbago. « Ce qu’ils ne réalisent pas, c’est que les gens doivent aller sur le terrain pour recueillir les informations qui vont sur internet. »
Rien qu’en Tanzanie, il y a encore des étendues inexplorées de forêts et de paysages, de nouvelles espèces étant découvertes chaque année. La nation d’Afrique de l’Est est chanceuse à bien des égards, a expliqué M. Mbago. Son histoire depuis l’indépendance n’a pas été agitée comme celles d’autres pays sur le continent. La recherche s’est poursuivie en grande partie sans interruption depuis que le pays a obtenu son indépendance du Royaume-Uni en 1961.
Pour les afrotropiques, des estimations de plus de la moitié des espèces d’arbres connues ont été consolidées et publiées dans les cinq dernières années dans le cadre de l’effort mené par BGCI.
L’univers des arbres s’étend, mais pas la population de dendrologistes. Du moins pas là où l’on en a le plus besoin, a dit M. Mbago, pointant un manque d’expertise au niveau national. Documenter la diversité de la flore des recoins sous-explorés de Tanzanie ne peut pas être fait par des chercheurs en hélicoptère. De longues périodes de travail sur le terrain, plusieurs visites et une compréhension des conditions locales donnent souvent les résultats les plus satisfaisants.
« Nous avons des milliers d’espèces d’arbres, mais pas assez de botanistes pour les étudier », a dit M. Mbago.
Image de bannière : Graines de Karomia gigas. Image fournie par Kirsty Shaw/BGCI
Citation:
Clarke, G. P., Burgess, N. D., Mbago, F. M., Mligo, C., Mackinder, B., & Gereau, R. E. (2011). Two ‘extinct’ trees rediscovered near Kilwa, Tanzania. Journal of East African Natural History, 100(1-2), 133-140. doi:10.2982/028.100.0109
Malavika Vyawahare est la journaliste titulaire à Madagascar pour Mongabay. Retrouvez-la sur Twitter :@MalavikaVy
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Article original: https://news-mongabay-com.mongabay.com/2021/09/one-in-three-tree-species-is-in-the-red-new-global-assessment-says/