Nouvelles de l'environnement

RDC : Le Gouvernement lève le moratoire en matière d’octroi des titres d’exploitation forestière

Image aérienne de la forêt tropicale du Bassin du Congo. Photo de Greenpeace à travers Hal Tarris chargé de la Communication

Image aérienne de la forêt tropicale du Bassin du Congo. Photo de Greenpeace à travers Hal Tarris chargé de la Communication

  • Au sein de Greenpeace, le Gouvernement est simplement en train de faire une chose et son contraire. D’un côté le pays veut se présenter à la #Cop26 comme un « Pays Solutions » et d’un autre côté, le même pays… est entrain de peaufiner un plan qui va détruire ses forêts ce qui est une contradiction.
  • Le Gouvernement congolais a décidé, à travers un Conseil des Ministres tenu il y a peu, la levée du moratoire en cours en matière d’octrois des titres forestiers. Il s’agit en fait de l’ouverture de l’une des grandes forêts du monde à l’exploitation, ce qui fâche les défenseurs de l’environnement dont Greenpeace.
  • La forêt tropicale du Bassin du Congo s’étend sur 3,6 millions de kilomètres carrés. La RDC regorge à elle seule plus de 60 pourcent de celle-ci, abritant près de 40 millions d’habitants dont les communautés locales et les peuples autochtones. A cet effet, la RDC est considérée comme le deuxième poumon du monde après l’Amazonie en Amérique Latine.

Au moins 10 mesures dites « urgentes pour la gestion durable des ressources naturelles de la RDC » ont été prises au cours de la réunion du conseil des ministres du 09 juillet dernier, présidé par le Président Felix Tshisekedi lui-même.

On compte entre autres mesures « la levée du moratoire en cours en matière d’octroi des titres forestiers », une décision qui frise l’indignation dans le rang des activistes de l’environnement.

C’est la récente sortie médiatique de la vice-première ministre, ministre de l’environnement, Eve Bazaiba, le 02 septembre dernier qui a mis du feu aux poudres. Sa communication sur la levée du moratoire sur  l’octroi des concessions forestières a poussé certaines organisations qui luttent contre la déforestation dont Greenpeace à dénoncer ce qu’elles qualifient de « crime contre l’humanité » .

Signé en 2002 et reconduit 3 ans plus tard, le moratoire d’octroi des titres d’exploitation forestière est en enfin levée par le Gouvernement congolais, après multiples violations de celui-ci d’ailleurs par certains membres du Gouvernement, accusent les activistes.

Bien avant cette levée annoncée tambour battant, en juin 2020 l’ancien  ministre de l’environnement, Claude Nyamugabo avait octroyé plus d’un millions d’hectares aux exploitants industriels.  Deux sociétés chinoises étaient citées dans cette affaire.

Ce moratoire, pensent les autorités congolaises, « n’était qu’une mesure conservatoire, cela étant, c’était irresponsable pour l’Etat congolais de se maintenir dans cette position plus d’une quinzaine d’années après(…)».

Cette mesure comme tant d’autres, a précisé Eve Bazaiba, « Sont motivées dans le souci d’améliorer la gouvernance environnementale et de mettre la République Démocratique du Congo au même diapason que ses pairs, au regard du contexte global dominé par le changement climatique et les enjeux politiques, économiques et financiers qui en découlent».

 

Vers la souffrance de la planète

La forêt tropicale du Bassin du Congo s’étend sur 3,6 millions de kilomètres carrés. La RDC regorge à elle seule plus de 60 pourcent de celle-ci, abritant  près de 40 millions d’habitants dont les communautés locales et les peuples autochtones.

A cet effet, la RDC est considérée comme le deuxième poumon du monde après l’Amazonie en Amérique latine. Ce qui signifie que la  forêt du bassin du Congo constitue une deuxième réserve d’oxygène de toute la planète terre.

Fort de ses tourbières et sa biodiversité à importance planétaire, la levée de ce moratoire représente une catastrophe climatique imminente. Selon trois organisations de défense de l’environnement comme le Rainforest Foundation UK, Rainforest Norway et Greenpeace, la décision du Gouvernement congolais aura des conséquences graves pour le monde, appelant la communauté internationale à plus de vigilance.

« Le plan de lever le moratoire national sur l’exploitation forestière, en place depuis 2002, menace d’aggraver la crise climatique à un moment où le monde est loin de maintenir le réchauffement climatique à moins de 1,5 degré Celsius au-dessus des niveaux préindustriels – le maximum nécessaire pour éviter les effets les plus dévastateurs du changement climatique(…)»,               peut-on lire dans le communiqué de ces organisations.

« La République Démocratique du Congo (RDC) abrite la deuxième plus grande forêt tropicale du monde après le Brésil.  Elle abrite 40 millions d’habitants, un réservoir de carbone et une réserve de biodiversité d’importance mondiale. C’est aussi une barrière naturelle contre la propagation des maladies zoonotiques. Alors que certaines parties de l’Amazonie deviennent maintenant des  émetteurs nets de carbone, le bassin du Congo est jusqu’à présent resté relativement intact ; bien que les taux de déforestation aient augmenté ces  dernières années »    , racontent les trois organisations.

Contactée, Irène Wabiwa, cheffe de Projet International de la Forêt du Bassin du Congo de Greenpeace, s’appuyant sur l’hypothèse selon laquelle la RDC voudrait se présenter à la #Cop26 comme « pays solutions », relève une confusion dans la démarche du gouvernement congolais :

« Au sein de Greenpeace, nous pensons simplement que nous sommes en train de nager dans la confusion, parce que d’un côté le pays veut se positionner, se présenter à la Cop26 comme un “pays solutions“ et d’un autre côté, le même pays au travers sa ministre en charge de questions forestières est en train de peaufiner un plan qui va détruire ses forêts », déplore-t-elle.

Avant de continuer «  en quoi est-ce que la RDC sera un pays solution si les mesures qui sont prises sur le terrain vont à l’encontre…constituent plutôt des problèmes. …le moratoire est une mesure conservatoire, et cette mesure conservatoire a été prise pour des objectifs précis et, ces objectifs ne sont pas encore atteints, donc il est impérieux que le pays puisse se focaliser sur l’atteinte de ces objectifs, aplanir le secteur, assainir le secteur(…)».

Les activistes locaux s’investissent aussi           

Sylvain Obedi, est un activiste du climat et de Droit de l’Homme, délégué participant à la Précop26 à Milan (Italie). Il reste cependant confiant  vis-à-vis de la cinquième mesure qu’est “l’élaboration d’une Politique Forestière Nationale pour la République Démocratique du Congo“. Il fait savoir que si la ministre a pensé  à  la  levée du moratoire c’est parce que le secteur forestier est parfois exploité de manière abusive bien qu’il y a une réglementation qui n’est pas toujours respectée, pour lui la ministre voudrait recadrer les choses autrement.

« Personnellement, je suis d’accord pour toutes les idées qui viennent positivement changer les choses. Donc si ce moratoire est levé et que le ministère de l’environnement et Développement Durable parvenait à définir un cadre d’exploitation contraignant à tout le monde  y compris les particuliers et les industriels de remplir un certain nombre des conditions avant de faire quoi que ce soit…il y a bien sûr des raisons valables qui l’ont poussée à prendre cette décision.

« Tous les jours, les bois sortent de nos forêts et sont exportés mais la situation économique n’est toujours pas améliorée » pense-t-il. Avant de dire que si ce moratoire est levé pour recadrer les choses, « moi je suis d’accord ». Selon lui, la cause est que   l’ancien système d’exploitation des forêts n’était pas durable ni rentable. Il faut alors selon lui, des plans bénéfiques avant de lever le moratoire.

 

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