Nouvelles de l'environnement

Les terres autochtones possèdent au moins 36 % des derniers paysages forestiers intacts

Une nouvelle étude révèle que plus d’un tiers des forêts vierges subsistant dans le monde, aussi appelées « paysages forestiers intacts », se trouve sur des terres gérées ou appartenant à des peuples autochtones.

Publiée le 6 janvier dans la revue Frontiers in Ecology and the Environment, cette étude s’appuie sur des travaux qu’avaient menés John Fa, l’auteur principal, et ses collègues dans le but de dresser une carte mondiale des territoires contrôlés par des peuples autochtones. Au cours de la présente étude, les chercheurs ont repris ces résultats et les ont comparés à des cartes satellites faisant apparaître la localisation des paysages forestiers intacts, ou PFI. Pour être considérés comme tels, ceux-ci doivent être composés de blocs de forêt et d’autres territoires naturellement dépourvus d’arbres d’une superficie d’au moins 500 km², et ne doivent pas présenter de signe détectable de dégradation ou de fragmentation par l’homme.

Illegal forest clearing in an indigenous reserve in Colombia. Image by Rhett A. Butler/Mongabay.
Déforestation illégale dans une réserve autochtone de Colombie. Photo : Rhett A. Butler/Mongabay.

John Fa, qui est professeur en biodiversité et développement humain à la Manchester Metropolitan University, au Royaume-Uni, déclare qu’il a été « très intéressant de constater qu’une telle surface de PFI se situe en réalité sur des terres autochtones ».

L’analyse montre également que le déclin qu’ont connu les PFI au cours des deux dernières décennies a été moins marqué sur les territoires autochtones. De plus, ces derniers présentent davantage de forêts de haute qualité (soit une part plus élevée de PFI par rapport à la surface forestière totale) que des terres non autochtones dans 36 des 50 pays étudiés.

Fa, qui travaille également pour le Centre de recherche forestière internationale (CIFOR), ajoute qu’il faudrait tenter de comprendre pourquoi ces territoires subissent comparativement des pertes moins importantes, une question qui selon lui mériterait d’être approfondie. Parmi les explications possibles, il évoque les densités de population plus faibles sur les territoires occupés par des peuples autochtones et le fait que ceux-ci vivent souvent dans des lieux plus reculés, ce qui limite les possibilités de développement. Il arrive parfois même que certains s’opposent activement aux incursions des industries extractives.

An indigenous community in Suriname. Image by Rhett A. Butler/Mongabay.
Communauté autochtone au Surinam. Photo : Rhett A. Butler/Mongabay.

« Nous avons certes constaté l’existence d’une corrélation, mais il nous faut désormais découvrir comment ces ressources sont utilisées, ou encore ce qui explique la présence de PFI dans certains pays et pas dans d’autres », explique Fa.

Chaque situation est unique, a-t-il ajouté, rappelant ainsi à quel point il est nécessaire de comprendre ce qui se passe réellement sur le terrain. Cela permettra ensuite de trouver des solutions pour aider les communautés autochtones concernées à faire face à des problèmes tels que le changement climatique et la perte de biodiversité.

« Étant donné qu’elles possèdent toutes ces forêts, il est très important que ces populations soient soutenues par les institutions internationales afin de pouvoir gérer ces territoires d’une manière qui soit avantageuse aussi bien pour elles que pour le reste du monde », explique Fa.

A Yasuni man in Ecuador. Image by Rhett A. Butler/Mongabay.
Homme Yasuni en Équateur. Photo : Rhett A. Butler/Mongabay.

Victoria Tauli-Corpuz, la Rapporteure spéciale de l’ONU sur les droits des peuples autochtones, déclare que cette étude est le reflet de ce qu’elle a pu constater sur le terrain, et notamment du fait que les « peuples autochtones jouent un rôle essentiel dans la préservation des écosystèmes ».

Selon elle toutefois, « ils pourront faire encore mieux si leurs droits à gérer et à contrôler ces terres sont également respectés et protégés ».

Les chercheurs demandent la reconnaissance internationale des droits fonciers des peuples autochtones. Pour Fa, les organisations internationales doivent également élaborer des politiques qui tiennent compte du rôle de ces populations dans la préservation de l’environnement.

An indigenous forest community as seen from the air. Image by Rhett A. Butler/Mongabay.
Vue aérienne d’une communauté forestière autochtone. Photo : Rhett A. Butler/Mongabay.

S’il s’agit pour Tauli-Corpuz d’une étape nécessaire, elle ajoute que les engagements de haut niveau doivent se traduire par des actions sur le terrain.

« Les bonnes politiques ne manquent pas, déclare-t-elle. L’important est qu’elles soient réellement mises en œuvre. »

Bannière : un autochtone naviguant sur un affluent de l’Amazone en Colombie. Photo : Rhett A. Butler/Mongabay.

John Cannon est membre de l’équipe de rédaction de Mongabay. Suivez-le sur Twitter : @johnccannon

Bibliographie :
Fa, J. E., Watson, J. E. M., Leiper, I., Potapov, P., Evans, T. D., Burgess, N. D., … Garnett, S. T. (2020). Importance of Indigenous Peoples’ lands for the conservation of Intact Forest Landscapes. Frontiers in Ecology and the Environment. doi:10.1002/fee.2148

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Article original: https://news.mongabay.com/2020/01/indigenous-lands-hold-36-or-more-of-remaining-intact-forest-landscapes/

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