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De nouvelles recherches décrivent l’effet complexe des sonars militaires sur les baleines

  • Deux études récentes décrivent les réponses spécifiques à chaque baleine aux sonars, habituellement utilisés par les navires pour détecter les sous-marins.
  • Le son des sonars est associé à une perte d’audition, aux échouages de masse et interfère dans la communication entre les baleines.
  • L’une des études montre que la distance entre les baleines et le sonar n’a pas d’importance : ces dernières s’enfuient généralement quelle que soit la distance.
  • Une autre étude montre que les sonars affectent les modes d’alimentation des baleines bleues qui plongent en eau profonde, tandis qu’ils ne troublent pas celles qui se nourrissent de plancton à la surface.

Une nouvelle recherche montre que les baleines réagissent différemment vis-à-vis des sonars, selon où elles vivent et ce qu’elles font.

Deux études, sur des espèces et dans des océans différents, permettent aux scientifiques de mieux comprendre la manière dont les baleines se protègent de ces sons. Les navires militaires utilisent des sonars pour détecter les sous-marins furtifs, et les chercheurs ont mis en corrélation les exercices d’entrainement des sonars à la perte d’audition, les échouages de masse et l’interférence dans la communication entre les baleines.

La plupart des stratégies utilisées pour minimiser les effets des sonars, prennent comme indicateur le volume du son, selon une déclaration. de Brandon Southall, un biologiste de l’Université de Californie, à Santa Cruz. Mais dans une recherche publiée le 4 mars dans le Journal of Experimental Biology. le volume ne s’est pas révélé être le meilleur indicateur lorsque l’on étudie les réponses des baleines bleues (Balaenoptera musculus) à une série d’impulsion de sonars.

Une baleine bleue créant un vague. Image de NOAA via Wikimedia Commons (domaine public).

« Certaines baleines ont réagi alors que les sons étaient à peine audibles, tandis que d’autres, à des niveaux plutôt élevés, ont semblé totalement les ignorer et ont continué à se nourrir », dit Southall, l’auteur principal de l’article.

Une étude séparée, sur les hyperoodon boréal (Hyperoodon ampullatus) dans la mer du Groënland, a trouvé que ces baleines à bec (l’un des groupes les plus affectés par les sonars) changeaient leur comportement, qu’elles soient à 0,8 kilomètres (0,5 miles) de la source du sonar ou à 28 kilomètres (17 miles).

Dans cette étude, les scientifiques ont posé des balises sur 12 baleines à bec et utilisés des microphones pour écouter ce qu’il se passaient à la surface.

Un groupe d’hyperoodon boréal reste à la surface dans le Gully, Nouvelle Ecosse, lors d’une expédition scientifique. Image de Deepdivewhales via Wikimedia Commons (CC BY-SA 4.0).

« Toutes les baleines avec une balise ont cessé de se nourrir, et les individus ont commencé à s’éloigner du site d’exposition pendant plusieurs heures à partir d’un certain seuil sonore, quel qu’était leur proximité avec la source », dit dans une déclaration Patrick Miller, un écologiste de l’Université de St. Andrews.

Miller et ses collègues ont publié leurs travaux le 20 mars dans le journal Proceedings of the Royal Society B.

Une recherche précédente insinuait que les sonars militaires distants n’étaient pas aussi gênants pour les baleines que les pulsations expérimentales utilisées par les scientifiques pour enquêter sur les changements de comportement. Cette conclusion n’a pas tenu dans l’« environnement pur » où Miller et ses collègues ont mené leurs études.

Une baleine bleue vu du ciel. Image de NOAA Bibliothèque Photo via Wikimedia Commons (Domaine Public).

« Nous utilisons des sources sonores plus petites que les sonars militaires opérationnels habituellement utilisés », dit Miller, « l’inquiétude est donc que dans la nature, les animaux répondent aux sonars militaires à des distances bien plus grande ».

Il est possible que ces baleines, ayant eu une exposition mineure aux sonars militaires, n’ont pas compris que les sons distants ne présentent pas le même danger que les proches, dit dans une déclaration Paul Wensveen, co-auteur de l’étude sur les hyperoodons boréaux et biologiste de l’Université d’Islande.

Au large des côtes de Californie du Sud où Southall et ses collègues chercheurs ont posé en 5 ans des balises à 42 baleines bleues, les réponses comportementales enregistrées vis-à-vis des sonars expérimentaux étaient variées. Pour parfaire leur compréhension, plusieurs scientifiques ont utilisé des échosondeurs afin de repérer les essaims de plancton, alimentation de base de la baleine bleue.

La nageoire dorsale d’un hyperoodon boréal. Image de Deepdivewhales via Wikimedia Commons (CC BY-SA 4.0).

L’analyse des données montre qu’en règle générale, les baleines se nourrissant à la surface restent imperturbables lorsqu’elles sont sujettes au son du sonar. Mais plus de la moitié des baleines ayant une balise, et qui se nourrissaient plus profondément dans l’océan, abandonnaient leur diner (au moins jusqu’à ce que le bruit du sonar stoppe). Une fois terminée, la plupart des baleines, qui peuvent grandir jusqu’à 30 mètres (98 pieds) et 200 tonnes métriques (220 tonnes), se régalent à nouveau.

Les chercheurs remarquent que de nombreux facteurs peuvent influencer la réaction des baleines bleues aux sonars. Malgré cela, dit Southall, leurs découvertes proposent des voies possibles pour atténuer les effets des tests de sonars militaires.

« L’impact pourrait être minimisé en réduisant le volume des sonars lorsque les baleines bleues viennent se nourrir de plancton dans les zones d’entraînement de l’armée », ajoute-t-il.

Image de bannière d’hyperoodon boréal © Christian Harboe-Hansen.

Citations

Southall, B. L., DeRuiter, S. L., Friedlaender, A., Stimpert, A. K., Goldbogen, J. A., Hazen, E., … & Harris, C. M. (2019). Behavioral responses of individual blue whales (Balaenoptera musculus) to mid-frequency military sonar. Journal of Experimental Biology, 222(5), jeb190637.

Wensveen, P. J., Isojunno, S., Hansen, R. R., von Benda-Beckmann, A. M., Kleivane, L., van IJsselmuide, S., … & Narazaki, T. (2019). Northern bottlenose whales in a pristine environment respond strongly to close and distant navy sonar signals. Proceedings of the Royal Society B, 286(1899), 20182592.

Article original: https://news.mongabay.com/2019/03/new-research-teases-apart-complex-effects-of-naval-sonar-on-whales/

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