Nouvelles de l'environnement

Un tribunal malgache confirme la condamnation d’un activiste écologiste

  • En septembre 2017, un fermier du nom de Raleva a remis en cause les permis d’une société minière, lors d'une réunion dans son village du Sud-Est de Madagascar. Il a été immédiatement arrêté au motif de se faire passer pour un responsable local.
  • En octobre, il a été reconnu coupable et condamné à deux ans de prison, puis immédiatement libéré sous caution - une pratique courante à Madagascar qui semble viser à faire taire l'opposition.
  • Le 22 mai, une cour d'appel a annoncé sa décision de maintenir la condamnation.
  • Les militants essaient aujourd’hui de constituer une équipe juridique pour porter l'affaire devant la Cour suprême de Madagascar.

Un fermier, devenu militant écologiste et déclaré coupable d’infraction pénale après avoir remis en cause les permis d’une société minière, a été débouté par un tribunal malgache.

La décision du mois de mai renforce les inquiétudes vis-à-vis des positions prises, ces dernières années, par les tribunaux malgaches envers les militants écologistes.

L’affaire du fermier, qui s’appelle Raleva, a commencé en septembre dernier, lorsqu’il s’est confronté aux représentants de Mac Lai Sima Gianna, une société aurifère sino-malgache, lors d’une réunion dans son village de Vohilava, situé près de la ville de Mananjary, dans le Sud-Est du pays. Lorsque Raleva a demandé à voir les permis de l’entreprise, qui n’avaient en fait pas été accordés, , il s’est fait arrêter au motif de se faire passer pour un responsable local, charges que les populations locales et les associations de défense des droits de l’Homme considèrent inventées de toutes pièces.

En octobre, après un mois environ de détention préventive, Raleva a été reconnu coupable et condamné à deux ans de prison, mais immédiatement libéré sous caution. De nombreux militants reçoivent des condamnations avec sursis, de cette manière. Selon les associations de défense des droits de l’Homme, les autorités leur offriraient une sorte de liberté conditionnelle en échange de leur silence.

Raleva et son équipe ont fait appel, et l’affaire a été portée le 24 avril devant la cour d’appel de Fianarantsoa. Le 22 mai, le tribunal a annoncé sa décision de maintenir la condamnation.

Raleva just before he was taken away by the authorities on September 27 after publicly questioning a gold mining project near his village, Vohilava. His full name is Rajoany, but everyone calls him Raleva. Photo by Anonymous.
Raleva juste avant qu’il ne soit emmené par les autorités le 27 septembre pour avoir remis en cause publiquement un projet d’extraction d’or près de son village, Vohilava. Image par Anonymous.

Les associations de défense des droits de l’Homme ont critiqué la décision du tribunal. « Cela … envoie un message effrayant à quiconque souhaite s’exprimer pour ce qu’il croit être juste : qu’il peut finir en prison », écrit Tamara Léger, conseillère du programme Madagascar à Amnesty International, dans un courrier électronique adressé à Mongabay. « C’est de cette façon que la voix de la société civile finit par s’éteindre, avec des activistes qui finissent par pratiquer l’autocensure pour se protéger et protéger leurs familles. »

« C’est particulièrement décevant que l’entreprise chinoise et ses alliés locaux aient plus d’influence sur le système judiciaire que toutes les communautés, la société civile et les associations des droits de l’Homme qui travaillent ensemble », écrit dans un courriel à Mongabay Zo Randriamaro, coordinateur du Centre de Recherche et d’Appui pour les Alternatives de Développement – Océan Indien (CRAAD-OI), un groupe de la société civile basé à Antananarivo. Randriamaro y déclarait que le système judiciaire malgache était corrompu et dysfonctionnel.

Map shows the location of Vohilava, Madagascar, Raleva's village. Map courtesy of Google Maps.
La carte indique l’emplacement de Vohilava (Madagascar), le village de Raleva. Image avec la permission de Google Maps.

Lors du premier procès en octobre, Raleva a été reconnu coupable d’'”usurpation de titre” pour avoir prétendu être, lors de la réunion de septembre, le chef de district de Mananjary, c’est-à-dire un fonctionnaire local. Les partisans de Raleva insistent sur le fait qu’il n’avait aucune raison de prétendre être un représentant du gouvernement car il s’agissait d’une réunion avec les gens de son village, qui savent qu’il est fermier. Le réel chef de district de Mananjary était également présent à la réunion pour soutenir la compagnie minière, et c’est lui, selon les personnes présentes, qui a ordonné l’arrestation de Raleva.

Des groupes de défense, notamment Amnesty International et CRAAD-OI, essaient maintenant de constituer une équipe juridique pour porter l’affaire devant la Cour suprême de Madagascar.

Le bureau du Premier ministre n’a pas souhaité faire de commentaires sur la décision de la cour d’appel.

Mac Lai Sima Gianna a tenté à plusieurs reprises en 2016 et 2017 de débuter les travaux à Vohilava, mais pas depuis la réunion de l’année dernière. Cependant, l’entreprise continue d’opérer dans la communauté voisine d’Ambaladara – illégalement, selon des sources locales.

Banner image: A blue coua (Coua caerulea) in Ranomafana National Park, about 30 miles west of Vohilava. Image by Rhett A. Butler.
Image de la bannière : Un coua bleu (Coua caerulea) dans le parc national de Ranomafana, à environ 48 kilomètres (30 miles) à l’ouest de Vohilava. Image par Rhett A. Butler.
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