- L’usine de Green Fuel à Chisumbanje, dans l’est du Zimbabwe, est opérationnelle depuis 2011.
- Depuis cette date, les moyens de subsistance des fermiers de la région, déjà faibles, ont été profondément mis à mal. Les plaintes des membres de la communauté et des groupes de défense contre l’entreprise s’accumulent.
- En avril, Billy Rautenbach, propriétaire des entreprises qui possèdent une participation majoritaire de Green Fuel, a été cité dans l’affaire des Panama Papers pour ses comptes à l’étranger, ce qui a incité à demander une enquête sur ses transactions financières qui pour l’heure n’a pas encore été lancée.
La propriété de Lyben Minyizeya qui se trouve à Chisumbanje, dans l’est du Zimbabwe, évoque une décharge pour vieux tracteurs et autres équipements agricoles. Les machines, rouillées et cassées, lui rappellent les bons vieux jours passés aux champs.
Chez cette communauté de fermiers située à proximité de la frontière avec le Mozambique, les étés sont très chauds. Les baobabs, les acacias et les mopanes, qui se font rares et poussent de manière éparse dans la région, font partie de l’écosystème du veld de la province de Manicaland.
Jusqu’à peu, Chisumbanje abritait des fermes productrices de maïs et de coton prospères qui permettaient à de nombreuses familles de subvenir à leurs besoins. Chaque année, durant la saison des récoltes, les camions transportaient des ballots de cotons de Chisumbanje jusqu’à la ville de Mutare, à 230 kilomètres au nord, où se faisait l’égrenage du coton. Mais les camions chargés de coton ont été remplacés par des camions transportant de la canne à sucre et de l’éthanol, et certains champs de coton ont été transformés en plantations de canne à sucre afin d’approvisionner l’énorme usine d’éthanol, opérationnelle depuis 2011.
Depuis lors, les moyens de subsistances des fermiers de la région, déjà faibles, ont été profondément mis à mal. Les plaintes des membres de la communauté s’accumulent contre Green Fuel, l’entreprise qui possède l’usine. Ils affirment que l’usine d’éthanol de Green Fuel s’est accaparé des terrains, a obligé des familles à se déplacer sans leur fournir de compensation, pollué plusieurs points d’approvisionnement en eau, a saisi du bétail et n’a jamais versé de salaire à ses employés, ne leur laissant que peu d’options dans une région frappée par la sécheresse. La situation est devenue si difficile, témoignent-ils, que certaines femmes ont été forcées à vendre leur corps en contrepartie d’un accès à un terrain. La sécheresse provoquée par El Niño, qui a causé des ravages dans le pays, a tué la plupart du bétail, principale source de revenu qui leur restait, aggravant ainsi la situation. « Green Fuel s’est accaparé mes terres. Ma source de revenu a disparu depuis longtemps. Je ne peux plus envoyer mes enfants à l’école ni nourrir ma famille », a expliqué Minyizeya à Mongabay.
Green Fuel est une joint-venture entre deux entreprises zimbabwéennes, Macdom Investments et Rating Investments, et l’Autorité de développement agricole et rural (Agricultural and Rural Development Authority, ARDA), branche du développement agricole du gouvernement zimbabwéen. Ce projet englobe plus de 9 000 hectares de champs de canne à sucre et une usine d’éthanol, pour un coût de près de 550 millions d’euros (600 millions de dollars) et une date de fin en 2020.
Avec une capacité de production de plus de 120 millions de litres d’éthanol par an et 18 mégawatts d’électricité, il s’agirait là selon le journal The Herald,de l’un des plus grands projets de production d’éthanol en Afrique et du seul en Zimbabwe.